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rèse. Urine abondante, encore un peu alcaline et ne précipitant que quelques rares flocons albumineux.

Nous avons continué à traiter ce malade pendant deux mois encore, et l'urine n'a plus précipité.

Vers la fin du mois d'avril, nous pratiquions sur lui une opération grave qui avait pour but de reséquer une portion de l'omoplate, si, comme nous le pensions, sa fracture en éclats laissait séparée du corps de l'os toute la portion externe de bas en haut, sans aboutir dans la cavité glénoïde même. Nous étions assisté, dans cette opération, par nos confrères les docteurs Versiny père, opérateur distingué d'Ajaccio, Millet, Besson, chirurgien principal à l'hôpital militaire, et Fournier, chirurgien sous-aide au même hôpital. Une longue incision verticale de 5 pouces de long fut donc pratiquée sur la plaie de sortie, dans cette intention, le 23 mai; tous les tissus furent ensuite disséqués couche par couche pour mettre l'os à nu; et quand cette dissection fut achevée, nous pûmes nous convaincre que, trouée en éclats dans sa portion écailleuse, l'omoplate était ensuite divisée de haut en bas, y compris le col articulaire, en deux portions, dont l'externe était mobile sur l'interne.

Il fallut nous arrêter devant cette découverte, puisqu'il devenait nécessaire de désarticuler le bras en même temps qu'on aurait enlevé toute la portion externe de l'omoplate, ou de tailler dans l'articulation scapulo-humérale, pour enlever la moitié externe de l'omoplate et chercher à obtenir une ankylose en laissant le bras en place, ce qui exposait à d'immenses dangers.

Du reste, les fragments, quoique séparés inférieurement, étaient maintenus en place par les attaches musculaires; et, supérieurement, ils restaient assez bien affrontés pour qu'on pût en espérer l'adhésion.

Le seul bénéfice de cette opération fut d'extraire une longue et dernière esquille à laquelle on pouvait rattacher les derniers accidents apparus.

Nous eûmes pour accident, dans le cours de cette opération, une abondante hémorrhagie qui compromettait la vie du malade déjà épuisé. Elle fut de courte durée, car pendant qu'on comprimait l'axillaire, nous pûmes lier le vaisseau qui la fournissait.

Trois mois après, le malade était guéri avec une fausse ankylose de l'épaule.

XXXVIII OBSERVATION.-Albuminurie observée pendant sept jours, dans le cours d'une infection purulente.

Un jeune paysan de Menil-Saint-Blaise (Belgique), le nommé Soy..., s'était blessé à l'indicateur de la main gauche en coupant de l'herbe avec une faucille. La blessure avait porté sur la face dorsale, tout près de l'articulation de la phalange avec le métacarpien; elle était profonde, et le tendon de l'extenseur avait été divisé. C'était en juin 1848.

Ce jeune villageois, au lieu de recourir aux lumières d'un médecin, suivit tous les conseils qui lui furent donnés de part et d'autre; il fit différentes applications sur sa plaie et fit usage notamment d'une herbe dite merveilleuse. Après deux jours de ce dernier pansement, il survint un gonflement de tout l'avant-bras, puis du bras c'était un érysipèle phlegmoneux.

Le quinzième jour de l'accident on nous demanda en consultation; le malade était dans le délire depuis vingt-quatre heures; il avait eu de nombreux frissons depuis deux jours. Voici ce que nous pûmes constater immédiatement: stupeur profonde, le malade ne peut répondre à aucune question; délire tranquille, marmottement; face à teinte ictérique avec plaque rouge sur les pommettes; langue sèche, ligneuse, fendillée; selles diarrhéiques depuis quarante-huit heures; peau chaude, sèche; pouls concentré, dur, avec une certaine fréquence (98). Tout le bras, l'avant-bras et la main gauche offrent un volume énorme. Sur la face dorsale de la main existent trois larges phlyctènes remplies de sérosité jaunâtre, la face interne de l'avant-bras et du bras présente, sur les points où repose le membre, une teinte violacée en forme d'ecchymose; la peau est, partout ailleurs, d'un rouge plus ou moins vif ou foncé. L'articulation scapulo-humérale du même côté est considérablement tuméfiée, mais sans fluctuation.

Le creux axillaire participe à cette même tuméfaction.

Dans toute l'étendue du bras et de l'avant-bras, on perçoit une fluctuation profonde indiquant de vastes décollements.

Nous trouvons des urines du matin ; elles offrent un nuage avec pellicule à leur surface; elles bleuissent légèrement le papier de tournesol rougi; traitées, après filtration, par l'acide azotique, elles donnent un faible précipité albumineux à petits flocons; soumises ensuite à l'eau bouillante à 100 degrés, elles nous fournissent un précipité plus considérable avec la même ténuité des flocons en suspension. Si l'on sature d'une certaine quantité d'acide azotique le liquide qui a fourni le précipité, ce précipité persiste sans se dissoudre.

De l'avis unanime des consultants, on déclare qu'il y a, chez ce malade, commencement d'infection purulente; on convient de faire immédiatement plusieurs ouvertures et contre-ouvertures au bras et à l'avant-bras, de panser ensuite avec un onguent digestif et d'entourer le membre de fomentations chaudes. Nous proposons de donner le tartre stibié à haute dose, ce qui est accepté; potion émétisée à 0,80, cuillerée par heure.

Le lendemain 29 juin, le malade avait eu quatre selles à la suite de l'administration de l'émétique à la dose de 80 centigrammes, mais il n'était point sorti de sa stupeur; urine un peu rougeâtre, légèrement acide et plus albumineuse que la veille.

Le 30, le tartre stibié a été complétement toléré; le malade a eu une abondante diaphorèse, il se trouve encore en moiteur au moment de notre examen. Il commence à sortir de la stupeur et répond à quelques questions; le pouls a perdu de sa dureté, mais conserve sa fréquence (90). Il y a eu plusieurs mictions copieuses; l'urine est acide, rougeâtre, sédimenteuse, précipite de l'albumine et des sels uriques par l'acide nitrique et par la chaleur; les flocons albumineux sont en suspension dans la colonne de liquide; les sels ont gagné le fond du tube, ils sont de couleur gris cendré. Continuation du tartre stibié à 90 centigrammes; tolérance.

Le 1 juillet, le malade a recouvré sa connaissance; il se plaint encore de vertiges; ses forces sont anéanties, le besoin d'aliment se fait sentir; le bras a diminué considérablement de volume; les plaies y ont pris un bel aspect; il n'y a plus de gonflement à l'épaule ni dans le creux axillaire correspondant. Nous nous attendions à ne plus rencontrer d'albumine dans l'urine d'après cet état

de choses; il n'en est rien, l'urine est encore assez fortement albumineuse.

Les 2 et 3 juin, le tartre stibié à haute dose est continué, quoique la tolérance ait cessé dès le 2, à cause de sa salutaire influence sur les désordres locaux autant que sur le phénomène plus général de l'infection; l'urine a encore précipité pendant ces trois jours, puis nous n'avons plus trouvé un atome d'albumine pendant les trentesept jours que le malade a encore mis pour arriver à sa complète guérison.

f.-Albuminurie dans la fièvre puerpérale.

Bien que les discussions académiques n'aient pas abouti à grand'chose au sujet de la fièvre puerpérale, qu'elles aient plutôt établi ce qu'elle n'est pas que ce qu'elle est en réalité; bien que les opinions et même parce que les opinions des hommes qui ont le plus observé diffèrent sur un grand nombre de points à son sujet, nous établissons que la fièvre puerpérale bien caractérisée et à un moment de son évolution, se rapproche à plus d'un titre de l'infection purulente dont elle offre tous les symptômes, sinon les lésions anatomiques dans tous les cas.

Son caractère d'épidémicité la rapproche du typhus; c'est donc un typhus des femmes en couche. Son point de départ dans des cas bien constatés où l'on perçoit, à l'origine, des phénomènes inflammatoires du côté de l'utérus ou de ses annexes, d'une phlébite utérine, la rapproche de l'infection purulente. Au reste, l'infection purulente ne se montre jamais si fréquemment que quand le typhus règne dans les hôpitaux ou dans les camps. Si infection purulente il y a dans la fièvre puerpérale, cette infection ne se manifeste jamais mieux qu'en temps d'épidémie.

S'il y a lésion locale initiale, le fait d'épidémicité entraîne promptement et souvent les phénomènes d'infection.

Le typhus est une fièvre d'infection; la fièvre puerpérale est une fièvre d'infection. L'infection purulente se traduit par une fièvre et des caractères qui indiquent l'infection: voilà des identités. L'infection purulente est sporadique à la suite d'une blessure ou d'une plaie; elle est épidémique et elle se manifeste sur un

grand nombre d'individus atteints de plaies, c'est incontestable; il en est de même de la fièvre puerpérale.

On l'observe à l'état sporadique: elle succède alors à des lésions utérines et peut s'accompagner de signes d'infection purulente; elle est épidémique, et beaucoup de femmes en couches en sont atteintes alors, qu'il y ait eu ou non lésions utérines, mais par le fait même des couches, et on observe encore mieux et plus souvent les symptômes de l'infection purulente.

Pour tous ces motifs, nous plaçons l'étude de l'albuminurie, dans la fièvre puerpérale, entre celle qui accompagne l'infection purulente et celle qui se montre dans le typhus ou la fièvre typhoïde grave. Sa place ne pourrait mieux être choisie et son étude plus en harmonie avec ce que nous venons de dire quant à l'infection purulente, et ce que nous avons à dire quant au typhus.

Nous avons recherché l'albuminurie dans un nombre de cas d'accidents puerpéraux s'élevant à une quarantaine.

Généralement nous ne l'avons pas rencontrée dans ces accidents localisés et sans ce grand retentissement général qu'on observe fréquemment : ce qui prouverait que la métrite ou la métro-péritonite, suites de couches, ne doivent point être considérées comme causes de ce phénomène. Mais toutes les fois que les phénomènes locaux et généraux ont permis de diagnostiquer une vraie fièvre puerpérale arrivée au degré de l'infection, l'albuminurie n'a jamais fait défaut pendant un temps plus ou moins long.

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XXXIX OBSERVATION. Fièvre puerpérale extrêmement grave terminée par la guérison, albuminurie constatée pendant cinq jours.

Madame Usc..., mercière, 22, rue du Rocher, âgée de 23 ans, enceinte pour la cinquième fois, ayant eu deux couches à sept mois, une troisième à terme, avait avorté à trois mois dans sa quatrième grossesse. Devenue enceinte sept mois après cet accident, elle parcourt heureusement les trois premiers mois de la grossesse, lorsque le 7 du mois d'avril 1857, sans violence extérieure, sans secousse morale, elle éprouve une hémorrhagie utérine effrayante. En vingt minutes, elle avait perdu une énorme

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