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reste fortement coagulable, la tension du ventre a diminué; le malade mange avec appétit. Il peut se promener quelques heures; les jambes ont désenflé ainsi que la face; le pourtour des malléoles et les paupières restent seuls œdématiés. L'œdème pulmonaire est dissipé; les battements du cœur restent énergiques et lents, le foie reste volumineux.

La robuste constitution du malade nous permet de recourir encore à quelques déplétions sanguines faites avec réserve, soit par les ventouses, soit par la lancette. Vésicatoires sur les reins, une purgation par semaine, l'infusion de quinquina et la tisane de fleurs de genêt complètent le traitement pendant une nouvelle quinzaine.

Le 12 avril, le malade se trouve bien, et si ce n'étaient les hallucinations qui reviennent la nuit et la céphalalgie circulaire qui apparaît de temps en temps, il se croirait guéri. Les paupières seules restent dématiées. L'urine est très-abondante (11 à 12 cents grammes en vingt-quatre heures), elle est claire, tirant sur le jaune, elle précipite toujours fortement, sa densité est à 1016.

Pendant deux mois le malade se trouve bien; des cautères ont été posés sur les reins. Il a continué à se purger tous les huit jours; il a fait constamment usage du quinquina, et de plus il a pris quotidiennement 20 à 25 gouttes de perchlorure de fer à 20 degrés en dilution; cependant ses urines ont toujours précipité abondamment.

Au milieu de juin l'anasarque reparaît et progresse rapidement. Le malade se met entre les mains d'un confrère qui est médecin de la société des ouvriers menuisiers. Nous restons trois mois sans le voir. Pendant ces trois mois, on a eu recours aux préparations iodées sous diverses formes à l'intérieur, et en frictions à la peau; on a administré une trentaine de bains de vapeurs.

Le 8 octobre, notre malade nous demande de nouveau; il est énormément infiltré; la respiration est tellement gênée, qu'il est obligé de passer ses nuits dans un fauteuil. Il y a double œdème pulmonaire aux bases.Les bourses sont tellement infiltrées, que nous sommes obligé de faire des mouchetures; l'intelligence est devenue obtuse; la face est bouffie, plaquée de rouge sur un fond jaunâtre; il y a teinte jaune des sclérotiques. Il est survenu des vomissements; l'urine est rare, 3 à 400 grammes au plus dans les vingt-quatre

heures, acide; elle précipite plus que jamais. Pendant trente-cinq jours nous cherchons à combattre les accidents par les divers moyens connus dans la science; les purgatifs sont toujours bien supportés ; l'acide nitrique à la dose de 15 à 30 gouttes par jour en dilution, les frictions à la peau avec les teintures de digitale et de quinquina, quelques nouveaux bains de vapeurs, tout reste sans résultat. Il est survenu un double érythème aux jambes et une escarre au sacrum. L'infiltration est énorme, et la cavité péritonéale contient beaucoup de liquide.

Le 16 novembre survient une somnolence délirante avec teinte violacée de la face; le 17, le malade tombe dans le coma complet et expire en cet état dans la nuit du 17 au 18.

CL OBSERVATION.-Mal de Bright chronique, anasarque, éclampsie, hémiplégie.

M. Sar..., peintre en voitures, 51, rue de la Pépinière, quarante-six ans, blond, lymphatique, a été adonné à la boisson depuis l'âge de vingt ans. Depuis qu'il est établi, il a toujours beaucoup bu. Jusqu'à quarante-cinq ans, il s'était toujours bien porté, à ce qu'il assure. Cependant, depuis nombre d'années il était sujet à rendre des eaux le matin, à la pituite, et il était tourmenté de rhumatismes sur différents points du corps, notamment aux reins. En 1855, vers le milieu d'avril, sa santé s'est ébranlée sérieusement. Il a éprouvé de grands malaises, de la céphalalgie, des vertiges, des vomissements, et il a perdu l'appétit.

Il s'est confié aux soins d'un médecin qui l'a beaucoup purgé, lui a fait plusieurs applications de sangsues, etc. Au mois de juillet, il s'est aperçu que les jambes et la figure enflaient. Il avait alors des vertiges plus fréquents, de grandes lassitudes, une tendance au sommeil, peu d'aptitude à la marche. Bref, on l'envoya aux bains de mer. Il y fit un séjour d'environ un mois et ne put prendre qu'une vingtaine de bains. A la suite du dernier bain, en sortant de l'eau, il se sentit pris d'un vertige plus fort que tous les autres, tomba et perdit connaissance. Sa femme raconte qu'on prit cette attaque pour un coup de sang. A la manière dont elle nous dépeint cette attaque, nul doute que ce ne fût une éclampsie épileptiforme. Il eut une dizaine d'attaques en quarante heures,

ALBUMINURIE PERSISTANTE OU DURABLE. séparées à peine par des intervalles de dix minutes à trois quarts d'heure; sa femme était effrayée du grimacement de la face et des contorsions des membres. Dans l'intervalle des attaques, le malade tombait dans l'état comateux, les membres restant dans la rigidité et la connaissance étant complétement abolje.

Au deuxième jour de la première attaque, M. Sar... recouvra un peu de connaissance. Il reçut, au Havre, les soins éclairés d'un confrère pendant une dizaine de jours environ. A la suite de ces attaques, il resta paralysé de tout le côté droit, la bouche et les traits de la face déviés à gauche. C'est en cet état qu'on le ramena à Paris dans le mois d'août. A son retour, il se remit entre les mains de son médecin ordinaire jusqu'au mois de novembre. La paralysie persistant, M. Sar... s'adressa à un électriseur.

Ce nouveau médecin lui infligea vingt électrisations pour la somme de 400 fr. sans obtenir, bien entendu, le moindre résultat favorable.

Depuis son retour du Havre, M. Sar... a eu encore de nombreuses attaques d'éclampsie; il n'est jamais resté plus de trois semaines sans en éprouver. Chaque fois qu'il en a eu, il en a subi plusieurs à la suite les unes des autres.

Finalement, le 2 décembre, nous sommes appelé à lui donner des soins. Voici son état infiltration générale, œdème très-prononcé aux jambes avec rougeur érysipélateuse plus prononcée à la jambe droite; un peu d'épanchement dans le péritoine; épanchement pleural droit occupant le tiers inférieur; œdème du poumon gauche dans son tiers inférieur; toux atroce suivie d'expectoration de crachats rougis de sang, non visqueux; gêne horrible de la respiration qui oblige le malade à se tenir assis sur le lit; impossibilité de mouvoir la jambe et le bras droits; anesthésie cutanée sur ces membres; face très-bouffie et violacée, expression anxieuse; difficulté dans la parole, tendance à l'assoupissement sans sommeil, rêvasseries; ouïe dure, étincelles et bluettes par moments à la vue. Le malade a été quelquefois comme aveugle; dans ce moment il voit assez bien, et néanmoins il ne peut distinguer les objets fins; céphalalgie sus-orbitaire persistante; vertige prononcé; il semble au malade que tous les objets tournent autour de lui. Dans la nuit on est obligé de tenir allumées plusieurs bougies, parce que, dans l'ombre, il voit mille figures fantastiques

plus ou moins effrayantes. Le pouls est à 102 et concentré. L'urine est assez abondante, claire, limpide, acide, pesant 1011. Elle précipite énormément par l'acide nitrique et la chaleur, et le précipité est formé par des flocons blancs, cotonneux. Nous avons affaire au mal de Bright chronique, avec des accidents dits urémiques très prononcés.

Prescription: Potion émétisée à 0,35, une cuillérée par heure jusqu'à vomissement; vésicatoire de 4 pouces de diamètre sur la face postérieure du thorax.

Le 3. Le malade a beaucoup vomi et se trouve un peu moins gêné pour respirer. Même état des urines. Oxymel scillitique, deux cuillerées par jour; tisane pectorale, une tasse d'infusion de quinquina.

Le 4, on nous appelle en toute hâte à dix heures du matin. M. Sar... vient d'être pris d'une attaque. Décubitus dorsal avec incurvation à droite, roideur tétanique des membres paralysés. Le bras gauche éprouve des secousses convulsives avec adduction, les doigts fléchis dans la main, la jambe gauche est alternativement roide et secouée convulsivement, le pied dans l'abduction forcée; les muscles du côté gauche de la face sont agités de convulsions, tandis que ceux du côté droit sont dans l'immobilité, ce qui donne un aspect hideux au malade; l'œil gauche, à pupille contractée, roule dans l'orbite; l'œil droit est fixe et dirigé en haut, la pupille dilatée; une bave sanglante s'écoule de la bouche, la langue ayant été mordue; la respiration est ronflante, rare; teinte violacée de la face avec gonflement des jugulaires. Au bout de quelques minutes le malade tombe dans le coma complet.

Glace sur la tête, potion avec 0,20 de musc, sinapismes aux bras et aux cuisses.

Le 6, le coma a duré environ trente heures, interrompu de temps en temps par de nouvelles convulsions. Le malade a recouvré maintenant sa pleine connaissance; il éprouve la crainte de succomber dans une nouvelle attaque. Il se plaint d'étouffer. Il est obligé de rester assis sur son lit. Il y a toujours de l'œdème à la base du poumon gauche, et l'épanchement du côté droit persiste. L'anasarque progresse loin de diminuer. Urine claire, peu abondante (environ 600 grammes dans les vingt-quatre heures), précipitant avec une telle abondance que le coagulum occupe les cinq

sixièmes de l'éprouvette. L'érysipèle de la jambe droite, qui est énormement enflée, est très-intense; il s'y est formé des gerçures suintantes.

Purgation avec 40 grammes de sulfate de soude, oxymel scillitique deux cuillerées par jour. Infusion de quinquina.

Du 7 au 25, le malade va de mal en pis; il a des attaques d'éclampsie tous les trois et quatre jours. Le 26, nouvelle et dernière attaque suivie d'un coma, qui se termine par la mort au bout de six heures.

CLI OBSERVATION. Affections organiques du cœur, hypertrophie granuleuse du foie. Mal de Bright latent survenant en dernier lieu. Mort dans le coma.

Madame Gob..., 46, rue de Laborde, cinquante-deux ans, de petite taille, de bonne constitution, éprouve depuis quelques années des palpitations et de l'essoufflement. Nous l'avons soignée à trois reprises différentes, en 1857 et 1858. Nous avons constaté, dans ces circonstances, une hypertrophie considérable du cœur avec bruit de souffle râpeux au premier temps, une hypertrophie non moins considérable du foie, qui pouvait être saisi avec les mains. Chaque fois nous avons eu à combattre l'œdème des extrémités inférieures et des accidents du côté des poumons, engorgement ou œdème; nous sommes parvenu chaque fois à maîtriser les accidents, et madame Gob... a pu reprendre ensuite ses occupations. Nous avons, à ces diverses époques, analysé soigneusement les urines tous les jours, et nous ne les avons jamais trouvées albumineuses. Par conséquent les affections du cœur et du foie ne se compliquaient pas de mal de Bright.

Le 3 août 1859, nous sommes rappelé pour la quatrième fois auprès de madame Gob... L'anasarque est revenue; l'enflure des jambes remonte jusqu'au haut des cuisses, le ventre est tendu, et la cavité péritonéale contient une certaine quantité de liquide; la face est bouffie et offre une légère teinte ictérique; il y a un léger épanchement dans la cavité pleurale droite, et des râles bronchiques humides disseminés dans toute la face postérieure du poumon droit. La malade est orthopnéique; elle est tourmentée par une toux incessaute; le sommeil est pénible, rare, traversé par des

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