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M. Flourens, désirant terminer des travaux importants dont il s'occupe en ce moment, m'a chargé de faire cette année le cours de physiologie comparée. C'est une marque d'estime qui me touche profondément. C'est à lui, je ne l'oublierai pas, que je dois l'honneur de prendre la parole dans ce Muséum célèbre où se sont fait entendre et où se font encore entendre chaque jour tant de professeurs éminents. Je devais, avant tout, l'en remercier publiquement. Je dois aussi des remercîments à M. Philipeaux, son aide

VULPIAN.

PHYS. DU SYST. NERV.

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naturaliste, auquel revenait de droit cette suppléance, et que sa vive amitié pour moi a poussé à s'effacer pour me laisser asseoir à cette place qu'il eût pourtant si bien tenue.

L'objet du cours de cette année est la physiologie comparée du système nerveux. Or, avant tout, il nous faut bien déterminer quelles sont les parties du corps des animaux que l'on réunit sous le nom de système nerveux, et quelles sont, d'une façon très-générale, les attributs physiologiques et les fonctions de ce système.

Lorsqu'on étudie les êtres placés dans les rangs inférieurs du règne animal, on voit que les plus simples d'entre eux ne consistent qu'en une masse limitée d'une substance homogène, ne contenant aucun élément anatomique figuré. Toutes les fonctions s'exécutent chez eux au moyen de cette substance homogène, uniforme, de ce sarcode, pour employer le nom que lui a donné Dujardin. Ces animaux se nourrissent sans tube digestif, respirent sans organes respiratoires, ont une sorte de circulation sans organes circulatoires, se meuvent et sentent sans système nerveux, sans muscles et sans organes des sens. Parmi ces Protozoaires, il en est cependant quelques-uns chez lesquels commencent à se dessiner, sous la forme la plus rudimentaire, des organes particuliers, soit pour la locomotion, soit pour la circulation. Mais ce n'est là qu'une ébauche de ce qu'on trouve en gravissant quelques degrés de l'échelle animale. Bientôt on rencontre des animaux dont le corps est entièrement composé par des éléments anatomiques distincts. Ici apparaissent des cellules accolées les unes aux autres; ce n'est plus une matière amorphe.

Il est vrai que ces animaux sont encore composés par des cellules à peu près semblables, et destinées presque toutes au même usage. Tels sont les Polypes d'eau douce célèbres par les expériences de Trembley.

On sait, en effet, que la cavité digestive chez les Hydres est constituée par un simple enfoncement de la substance du corps, communiquant à l'extérieur par une seule ouverture qui sert à la fois de bouche et d'anus. Trembley, en renversant ces polypes comme un doigt de gant, en substituant la paroi extérieure à la paroi digestive, a vu la vie persister et les phénomènes digestifs s'accomplir par cette paroi extérieure devenue intérieure. Bien plus, Trembley mutilait ces animaux, les segmentait en tous sens, et chacun des segments, loin de périr, se développait et reproduisait un animal complet. Vous le voyez, les fonctions sont encore diffuses chez ces animaux; toutes les cellules ont la même structure, les mêmes aptitudes physiologiques, et elles peuvent ainsi se suppléer les unes les autres.

Faisons quelques pas encore, et, parmi les éléments anatomiques qui constituent l'animal, nous en distinguons qui ont des formes particulières et des destinations fonctionnelles spéciales. La division du travail physiologique, cette grande loi de perfectionnement mise en évidence par M. Milne Edwards, commence à s'effectuer. Certains éléments vont s'unir sous des formes déterminées pour constituer des appareils de digestion, de circulation et de respiration. D'autres éléments de forme, de structure, de composition chimique distinctes, seront chargées de la motilité ce seront les éléments musculaires formant les muscles. D'autres éléments, enfin, non moins distincts par

leurs divers caractères, le seront tout autant par leurs fonctions ce seront les éléments nerveux. Des cellules particulières, une matière granuleuse spéciale, et des fibres différentes de tous les autres éléments anatomiques se grouperont en offrant une disposition qui leur est propre, et le système nerveux sera constitué.

Or, le système nerveux, dès qu'il apparaît, va jouer le plus grand rôle, non-seulement dans les fonctions de la vie animale, mais encore dans celles de la vie organique. Vous savez que depuis Bichat, qui a emprunté l'idée et les éléments principaux de cette distinction à Buffon, on appelle vie animale l'ensemble des fonctions qui appartiennent exclusivement aux animaux, et vie organique l'ensemble des fonctions qui, avec des modifications variées, souvent profondes, appartiennent également aux animaux et aux végétaux.

Nous adopterons cette distinction, qui offre de grands avantages pour l'exposition des faits, mais qui ne doit pas être acceptée comme l'expression absolument exacte de la vérité, puisque les fonctions dites animales peuvent exister, à un degré évidemment très-inférieur, chez les végé– taux, et qu'on les voit d'autre part s'effacer peu à peu chez certains animaux inférieurs, au point qu'elles semblent même disparaître chez quelques-uns d'entre eux. Mais laissons de côté pour le moment ces difficultés, et contentons-nous pour le moment de ce groupement systématique des fonctions que nous venons d'indiquer.

Quelles sont les fonctions animales? La sensibilité, la motilité, l'instinct et l'intelligence. L'animal entretient, pour ainsi dire, un commerce continuel avec le monde. extérieur, en reçoit des impressions et réagit. Tantôt ces

impressions déterminent un phénomène de sensibilité, une sensation, à l'occasion de laquelle l'animal exécutera des mouvements variés, souvent adaptés à un but, et il y aura phénomène sensitivo-moteur et automatique, sans délibération préalable. Tantôt les impressions venues du monde extérieur ne produiront pas de sensations, et cependant il y aura encore une réaction constituée par des mouvements en général peu compliqués relativement, mais qui parfois présentent aussi une adaptation bien déterminée à un but; il se produira là ce que l'on désigne sous le nom d'action réflexe.

Dans les conditions dont je viens de parler, il y a véritablement relation entre le monde extérieur et l'animal. Le monde extérieur fournit les excitations, et l'animal réagit; mais voici un autre ordre de phénomènes dans lequel le rôle du monde extérieur, comme agent excitateur, n'est plus aussi direct. On voit chez les animaux se manifester des mouvements qui ne paraissent déterminés par aucune provocation extérieure. L'excitation naît ici dans l'animal lui-même: une sorte de tendance impérieuse le pousse à exécuter divers actes souvent très-compliqués et qui sont en rapport avec la conservation de l'individu ou de l'espèce. Ce sont les phénomènes de l'instinct dont je veux parler, vous le comprenez bien.

Enfin, au lieu de sensations brutes pour ainsi dire, l'animal aura des perceptions, et à l'occasion de perceptions actuelles ou de perceptions anciennes exhumées par la mémoire et fixées par l'attention, il pourra se livrer à une sorte de délibération, à des jugements suivis d'ordinaire d'une décision; et alors des mouvements pleinement volontaires pourront se produire. Ce sont là les phénomènes

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