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de relation. On pourrait en dire autant des Actinies et d'un grand nombre d'autres Zoophytes, mais c'est au Règne végétal que nous allons maintenant demander des argu

ments.

B. Nous allons, en effet, trouver dans ce Règne deux ordres de mouvements: des mouvements provoqués par une excitation, comme chez un animal, et des mouvements spontanés. Les exemples abondent; nous n'en citerons que quelques-uns. On sait que si l'on irrite une feuille de la Laitue sauvage, lorsque la plante est en fleur, il se produit une exsudation de suc laiteux. De même, si l'on presse les poils tubuleux de l'Ortie, il y a contraction des organes vénéneux qui sont à leur base et issue du produit toxique. On connaît très-bien aussi le mouvement des filets de l'Épine-vinette, lorsqu'on excite leur base. Le filet s'incline vers le style, et l'anthère chargée de pollen touche le stigmate. Nous ne ferons également que rappeler les phénomènes que présentent les feuilles de la plante nommée Dionaea muscipula, et qui lui ont fait donner son nom; et nous en viendrons immédiatement à des exemples plus connus encore.

Chez quelques Oxalidées, mais surtout chez des Mimosées, et en particulier la Sensitive (Mimosa pudica), si l'on touche les feuilles, on voit les folioles, horizontales avant l'excitation, se replier dans toute la longueur de la feuille, de façon que les folioles situées d'un côte du pétiole commun viennent s'appliquer par leur face supérieure sur la face supérieure des folioles placées de l'autre côté; c'est comme une feuille simple qui se fermerait par l'accolement des deux moitiés latérales de la feuille. Vous voyez le phénomène se produire ici sous vos yeux. Puis, la feuille entière se fléchit en s'inclinant vers la terre. Comme méca

nisme, ces mouvements ont une grande analogie avec ceux que l'on peut provoquer chez cette Grenouille dont on a enlevé tout l'encéphale, et qui n'a plus de volonté : j'excite légèrement un des membres, et ce membre exécute aussitôt un mouvement. Mais ces mouvements ne se bornent pas à la feuille ou à la foliole irritée, ils peuvent se montrer d'une façon bien plus remarquable dans une serre chaude et bien éclairée; le mouvement, si l'excitation est intense, se propage de la foliole touchée, en passant par le pétiole, à toute la plante. Si l'on agit sur la partie centrale de la plante, au lieu d'agir sur la périphérie, si l'on fait tomber sur les racines quelques gouttes d'acide sulfurique, par exemple, on voit le phénomène se produire en sens inverse, c'est-à-dire du centre vers la périphérie, du pétiole vers les folioles, et toutes les feuilles de la plante peuvent successivement, de bas en haut, s'infléchir vers la terre.

Analysons ce phénomène, et nous y voyons une irritation portée sur la plante, une transmission de l'excitation reçue, et enfin une réaction qui se manifeste par le mouvement produit. On n'observe pas autre chose chez certains animaux, et les actions réflexes les plus simples chez une Grenouille décapitée sont des phénomènes peu différents de ceux que présente la Sensitive. Mais comment tenter d'expliquer ce phénomène ? Dutrochet, le physiologue célèbre qui nous a fait connaître l'endosmose, avait fait de nombreuses expériences pour arriver à découvrir la cause des mouvements dans les végétaux excitables. L'opinion définitive qu'il a émise sur ce sujet n'élucide guère la question. Les mouvements des feuilles seraient dus, suivant Dutrochet, à un mécanisme très-différent, suivant qu'il s'agit de l'abaissement des feuilles

ou de leur redressement. «J'ai fait voir, dit-il, que l'abaissement du pétiole reconnaît pour agent un tissu fibreux qui se courbe lorsqu'il a acquis de l'oxygénation, et que l'élévation de ce même pétiole a pour agent un tissu cellulaire qui se courbe par implétion de liquide avec excès ou par endosmose.» D'après lui, «par le fait de l'excitation, ce tissu incurvable reçoit instantanément un surcroît d'oxygenation qui détermine son incurvation; puis il y a désoxydation, redressement du pétiole et déploiement des folioles. Ce dernier mouvement est simplement le résultat de l'afflux de la séve lymphatique dans le tissu cellulaire incurvable parendosmose, tissu qui est l'agent de ce mouvement. » Je vous avouerai que je trouve cette explication très-insuffisante; j'irai même plus loin, je ne la comprends pas. Sans approfondir la question, je crois qu'il faut voir dans ces phénomènes quelque chose d'analogue à ce qui se passe dans les muscles des animaux supérieurs. On trouve, en effet, aux points d'attache des folioles et dans les renflements qui se trouvent à la base des pétioles, des cellules contenant une gelée finement granuleuse : cette gelée a de l'analogie avec la substance contractile des fibres musculaires des animaux supérieurs. Ces cellules se raccourcissent, se contractent sous l'influence des excitations, ainsi que je m'en suis assuré en observant à l'aide du microscope ce qui s'y passe au moment où a lieu le mouvement produit par une excitation. On connait d'ailleurs des faits du même genre. Ainsi M. F. Cohn, de Breslau, a trouvé dans les filets des anthères des Cynarées, des cellules allongées, présentant des stries longitudinales lorsqu'elles sont en repos: ces cellules peuvent se contracter sous l'influence de certains excitants, de l'électricité entre autres, et offrent alors des stries

VULPIAN. PHYS, DU SYST. NERV.

transversales très-prononcées, ce qui leur donne une certaine analogie d'aspect avec les fibres musculaires striées.

Si Dutrochet me paraît n'avoir pas bien compris le véritable mécanisme du phénomène, il est juste de reconnaître qu'il a, au contraire, déterminé de la façon la plus nette la voie par laquelle se fait, dans la Sensitive, la transmission des excitations. La destruction isolée, soit de la moelle, soit de l'écorce, n'empêche pas le phénomène de se produire; d'autre part, ni la moelle seule, ni l'écorce seule, ne peuvent servir à cette transmission. C'est donc par le tissu fibro-vasculaire qu'elle s'opère.

On a tenté par les poisons de démontrer l'existence d'un système nerveux chez les végétaux. Macaire Princeps arrosait une Sensitive ou un pied d'Épine-vinette avec une solution d'opium, ou avec de l'acide prussique, ou encore avec une solution de sublimé corrosif ou d'arsenic, et l'expérimentateur a dû ressentir une grande joie en voyant que la plante perdait son excitabilité, car il a pu croire que ce résultat démontrait nettement la présence d'un appareil nerveux dans ces végétaux. Mais il est bien certain que cette expérience ne prouve en rien que la Sensitive soit aussi merveilleusement douée. Il n'y a d'abord à tirer aucun argument de l'action des solutions de sublimé corrosif ou d'arsenic, j'ai à peine besoin de le dire; et quant aux solutions d'extraits végétaux, l'effet obtenu s'explique par le procédé opératoire employé. On faisait, en effet, une plaie aux racines pour favoriser l'absorption du poison, et ce fait seul suffit déjà pour faire perdre à la plante presque toute apparence d'excitabilité. Les expériences de Goeppert et celles de Dutrochet ont démontré que, lorsque l'expérience est faite d'une autre façon, lorsque, par exemple,

on se borne à arroser la plante avec des solutions aqueuses de substances toxiques végétales, non-seulement elle n'en souffre pas, mais encore elle paraît prospérer davantage. D'autre part, Dutrochet a pu abolir l'excitabilité en arrosant une plante, dont il avait blessé les racines, avec une solution de sucre, qui est, comme vous le savez, complétement sans action sur le système nerveux. M. Leclerc, de Tours, et plusieurs observateurs, entre autres M. W. Coldstream, ont fait voir que, soumise aux vapeurs du chloroforme ou de l'éther, la Sensitive perd son excitabilité, et qu'elle conserve l'attitude qu'elle avait au début de l'expérience. Vous pouvez constater, par l'expérience qui est sous vos yeux, l'exactitude des assertions de ces expérimentateurs. Mais le chloroforme et l'éther agissent chimiquement sur la plante, et il n'est pas besoin d'invoquer là l'existence d'éléments nerveux de disposition quelconque, sur lesquels se porterait l'action de ces substances. Enfin, je vous rappellerai que M. Cl. Bernard a prouvé que le curare ne détruit en rien l'excitabilité de la Sensitive.

Si des mouvements provoqués nous passons aux mouvements spontanés, nous en trouverons un exemple bien remarquable chez le Desmodium gyrans, Sainfoin oscillant du Bengale. Comme vous le voyez, chaque feuille se compose de trois folioles. Une grande, médiane, et, de chaque côté, deux petites. La foliole médiane est à peu près immobile en dehors des heures de sommeil; dans les conditions fâcheuses seulement, à l'ombre, par exemple, elle s'incline légèrement vers sa base. Il n'en est pas de même des latérales vous voyez que l'une s'abaisse, tandis que l'autre se relève. Ce mouvement s'exécute en trente secondes en

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