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tact le Règne végétal et le Règne animal. Ils sont d'une organisation aussi élémentaire que possible; c'est la matière organisée et vivante dans sa plus simple expression. Pour certains naturalistes qui considèrent toutes les espèces animales comme issues peu à peu d'un très-petit nombre d'êtres primitifs et rudimentaires, par une série de perfectionnements successifs, ce seraient là les ancêtres primordiaux de tout le Règne animal! Ai-je besoin, d'ailleurs, de vous dire que cette conception n'a encore pour appui aucun fait important, sérieusement observé ?

Mais ce que je tiens à faire bien remarquer, c'est la simplicité extrême de la structure des Protozoaires, l'absence d'organes véritables, bien distincts, et de fonctions localisées. Chez eux, tout est diffus. Ils jouissent bien évidemment d'excitabilité, ils exécutent des mouvements; mais ils ne paraissent pas avoir une lueur d'instinct : les organes qui président d'ordinaire à ces phénomènes que nous venons d'indiquer, n'existent point. Nous ne trouvons chez ces animaux ni système nerveux, ni muscles. Leur corps est composé d'un protoplasme amorphe, ne contenant aucun élément anatomique figuré.

Nous avons donc vu que la motilité et la sensibilité existent chez certains animaux, à un degré faible, il est vrai, mais d'une façon non douteuse, sans agents spéciaux, distincts, qu'on puisse comparer aux organes de l'innervation et de la musculation. Or, nous avons constaté quelque chose d'analogue dans le Règne végétal. Nous ne trouvons pas, en effet, non plus de muscles ni de système nerveux dans le Sainfoin oscillant, ni dans la Sensitive. Les Zoospores et les filaments mobiles des Anthéridies nous ont offert aussi des mouvements spontanés très-analogues à ceux de

certains Protozoaires; et, enfin, nous avons mentionné des êtres qui, par leurs caractères les plus importants appartiennent au Règne végétal, mais qui présentent une motilité si remarquable, rappelant si bien celle des Infusoires, que naguère encore les naturalistes discutaient sur la détermination définitive de leur nature, et sur leur classement dans l'un ou l'autre Règne. Témoin le Volvox globator, par exemple.

Quelles doivent être nos conclusions? Sommes-nous autorisés à inférer de ces faits que les propriétés physiologiques peuvent exister sans leur substratum ordinaire, c'està-dire en l'absence des éléments anatomiques musculaires, nerveux, etc.? Non; une pareille conclusion ne serait pas légitime, quant à présent. Les mouvements qu'on observe dans ces différents cas ne sont pas absolument semblables à ceux que produit la substance musculaire, lorsque elle est mise en activité. Et il n'est pas nécessaire de supposer que cette substance existe ici dans un état particulier, avec une constitution propre. Nous trouvons chez les Protozoaires une substance très-remarquable dont ils sont presque entièrement formés : c'est le protoplasme, lequel, outre les diverses propriétés communes à toute matière organisée, possède certaines propriétés spéciales très-remarquables, à savoir, une sorte de motilité spontanée, et une excitabilité, pour ainsi dire, sensitive, au moyen desquelles s'exécutent les fonctions dont nous avons tracé un tableau rapide.

C'est du moins ainsi, ce me semble, que l'on doit interpréter les manifestations d'activité spontanée qui se montrent chez certains Protozoaires, chez les Rhizopodes par exemple.

Mais d'autres animaux inférieurs, les Infusoires par exemple, présentent des phénomènes bien plus nets de sensibilité et de mouvement; chez plusieurs d'entre eux, il paraît même y avoir de faibles lueurs d'instinct. Il ne faut pas dissimuler l'embarras que l'on éprouve en cherchant à expliquer l'existence de ces phénomènes chez des animaux qui ne paraissent pas avoir non plus d'éléments anatomiques musculaires et nerveux. On n'est pas moins embarrassé lorsqu'il s'agit des Polypes d'eau douce, ces animaux constitués entièrement par une réunion de cellules à peu près semblables toutes les unes aux autres, et chez lesquels les manifestations caractéristiques de la vie animale sont encore plus accentuées. Ferons-nous plier de force tous les faits pour les adapter à des vues systématiques? Si l'étude de l'immense majorité des animaux nous montre les propriétés physiologiques comme des attributs dévolus exclusivement à telles ou telles variétés d'éléments anatomiques, nous refuserons-nous d'admettre des faits exceptionnels ? Quoi ! l'Hydre d'eau douce n'aurait ni contractilité, ni neurilité, ni pouvoir réflexe, ni instinct, parce qu'il n'y a incontestablement, chez cet animal, ni fibres musculaires, ni fibres nerveuses, ni cellules nerveuses! Mais les faits sont là; et aucun raisonnement n'a la vertu de changer des faits ? Pourquoi, d'ailleurs, ne pas reconnaitre que, chez certains animaux, la matière organisée peut offrir simultanément, et mêlées les unes avec les autres, les diverses propriétés qui se séparent chez les animaux plus élevés! Ne peut-on pas admettre, comme une hypothèse assez plausible, que, dans cette matière organisée, les diverses substances qui doivent se dissocier ailleurs pour former des éléments anatomiques distincts, sont amalga

mées, pour ainsi dire? Il faut bien remarquer, en définitive que les propriétes physiologiques appartiennent non pas à l'élément anatomique figuré, mais à la matière qui le compose. La figure que revêt cette matière, pour constituer l'élément anatomique, peut bien avoir de l'influence sur le sens dans lequel s'exerce l'action physiologique ; mais elle ne peut avoir au fond aucune influence sur l'existence même de la propriété. Elle n'est, suivant toute vraisemblance, qu'un mode de perfectionnement, et apparaît lorsque les substances douées d'une activité physiologique spéciale se séparent pour remplir isolément leurs rôles. Tant que la chimie physiologique ne sera pas assez avancée pour reconnaître telle ou telle matière, contractile, nerveuse ou autre, sous quelque forme et en quelque quantité qu'elle se trouve, nous ne saurons pas d'une façon exacte quelle est la valeur de l'hypothèse que nous venons d'indiquer et qui nous paraît le mieux rendre compte des faits.

Il est clair, d'ailleurs, qu'un pareil état de choses doit nuire à la perfection du mécanisme des fonctions. Aussi cette diffusion des propriétés physiologiques ne peut exister que dans des organismes très inférieurs. Dès que les fonctions exigent une grande précision, des éléments anatomiques distincts, doués des propriétés spéciales, apparaissent; il y a dès lors des organes, des appareils plus ou moins séparés les uns des autres; il y a des fonctions confiées exclusivement à tels ou tels organes, à tel ou tel appareil.

C'est ainsi que se fait la division du travail physiologique, ce grand procédé de perfectionnement, dont j'ai déjà dit un mot dans ma première leçon, en vous rappelant que cette vue philosophique est due à M. Milne Edwards.

C'est ainsi que se constituent les organes nerveux. Ce sont donc là des instruments de perfectionnement. Au fur et à mesure que nous nous éleverons vers les animaux supérieurs, nous verrons le perfectionnement faire de nouveaux progrès.

Nous verrons alors, outre les instruments servant immédiatement à la fonction, d'autres organes, des centres chargés de contrôler le travail individuel, de le coordonner et de l'harmoniser. L'animal pourra alors associer un certain nombre d'actions distinctes vers une résultante, vers un but déterminé; et pour cela, il aura un système nerveux complexe, formé de parties ayant un rôle spécial à remplir et reliées les unes aux autres par d'intimes connexions.

Mais on ne passe peut-être pas brusquement des animaux dénués de tout système nerveux à ceux chez lesquels toutes les fonctions de relation s'exécutent exclusivement au moyen de ce système. On rencontre d'abord des organisations inférieures qui pourraient bien former, pour ainsi dire, la transition. Ainsi il n'est pas certain que l'innervation soit entièrement concentrée dans le système nerveux des Planaires. Il n'est pas impossible que chez ces animaux, que Dugès réunissait à d'autres sous le nom de neuro-myaires, il y ait encore une sorte de diffusion des fonctions de motilité et d'excitabilité sensitive et motrice. Dans cette hypothèse, il n'y aurait encore chez ces animaux qu'une centralisation partielle: mais c'est ce qui ne ressort pas des expériences d'une façon suffisamment claire. On sait qu'on peut diviser ces animaux en segments assez petits, dont quelques-uns seuls contiennent une partie du centre nerveux: il serait bien intéressant de pouvoir

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