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surtout appréciable lorsque la disposition du nerf soumis à l'expérimentation permet de placer les deux pôles de la pile sur deux faisceaux nerveux différents, comme l'a fait M. Chauveau sur le nerf facial du Cheval. On voit alors se contracter exclusivement les muscles qui sont animés par le rameau nerveux avec lequel le pôle négatif est en contact. On peut rendre les effets encore plus saillants, en appliquant l'un des électrodes sur le nerf facial d'un côté, et l'autre sur le même nerf du côté opposé. Les muscles d'un seul côté se contractent, et ce sont ceux qui sont sous la dépendance du nerf sur lequel est appliqué l'électrode négatif. Pour ce physiologiste, la contraction que l'on observe au moment de l'ouverture et au moment de la fermeture du courant serait due à des extra-courants instantanés qui se développeraient alors, et qui seraient beaucoup plus intenses que les courants continus. D'après la plupart des auteurs, il serait nécessaire, pour obtenir un effet, d'appliquer les deux pôles suivant l'axe longitudinal du nerf soumis à l'expérience, et les effets seraient nuls si l'on applique les deux pôles suivant l'axe transversal. Or, M. Chauveau a fait voir le peu fondement de cette proposition. Il a montré qu'il suffisait que le nerf fût assez gros et que les deux pôles fussent séparés par une distance suffisante, comme ils peuvent l'être, par exemple, sur le nerf facial du Cheval, pour observer des contractions musculaires sous l'influence d'une excitation transversale du nerf.

L'effet des courants continus n'est pas tout à fait le même, suivant que le courant est direct ou qu'il est inverse. On sait que le courant est nommé direct quand le pôle positif de la pile est appliqué vers le côté central du nerf

et le pôle négatif vers le côté périphérique; il est dit inverse, lorsque l'on place les pôles en sens contraire. Or, le courant continu direct affaiblit et épuise assez rapidement l'excitabilité des nerfs, du moins dans la portion de leur trajet qu'il a parcourue. On peut, en effet, comme je vous le montre ici, en plaçant les électrodes sur une autre partie de la longueur du nerf, déterminer encore des contractions dans les muscles auxquels se rend le nerf. Lorsque l'on soumet un nerf à un courant inverse, en observe d'abord une première période, période assez longue, pendant laquelle l'excitabilité du nerf paraît exagérée; mais, au bout d'un certain temps, survient une période d'affaiblissement. Ainsi, le courant direct et le courant inverse finissent par faire disparaître momentanément l'excitabilité nerveuse; seulement on arrive plus vite à ce résultat avec le courant direct qu'avec le courant inverse. Lorsque le passage du courant inverse dans un nerf a duré un certain temps, il se produit ordinairement, comme l'a montré surtout M. Matteucci, des contractions violentes, tétaniques même, au moment où l'on interrompt le courant. Ces contractions peuvent durer plusieurs secondes: on les fait cesser dès qu'on rétablit le courant. C'est là un fait bien remarquable; il montre que sous l'influence du passage d'un courant inverse, le nerf se charge, pour ainsi dire, d'influx nerveux, lequel se décharge sur les muscles, dès qu'il cesse d'être soumis à l'action coercitive du courant. Cette expérience prend aussi un intérêt d'un autre genre, lorsqu'on la rapproche de celles de M. Eckhard, expériences dont je vais parler dans un instant; car elle nous offre un exemple de l'action suspensive d'un courant électrique sur un nerf dont l'activité est en jeu.

B. Courants intermittents. Ces courants peuvent être engendrés par des appareils divers, mais l'effet est toujours le même; il se produit une contraction pendant tout le temps que l'on fait agir le courant jusqu'à ce que le nerf ait perdu son excitabilité. Du reste, l'épuisement du nerf arrive beaucoup plus vite par les courants intermittents que par les courants continus.

Il est un point de l'étude des effets des courants sur lequel j'appelle votre attention. Le phénomène dont je veux parler se manifeste tout aussi bien lorsqu'on emploie les courants continus que lorsqu'on met en usage les courants intermittents. Voici un nerf que je viens d'épuiser par un courant direct. J'essaye en vain l'action d'un courant de cet ordre, je n'obtiens aucun effet: si je laissais le nerf en repos, au bout de quelques minutes, il aurait recouvré, en partie au moins, son excitabilité; mais je puis rendre immédiatement à ce nerf son excitabilité. Pour cela il me suffit de renverser le courant, de remplacer le courant direct par un courant inverse. Si j'avais épuisé ce nerf par un courant inverse, l'application du courant direct lui rendrait également sur-le-champ son excitabilité. On peut, après avoir rendu ainsi au nerf son excitabilité, laisser les électrodes en contact avec lui jusqu'à ce que cette excitabilité soit épuisée de nouveau, et elle renaîtra dès qu'on renversera le courant ; et l'on peut même détruire ainsi et faire renaître plusieurs fois de suite l'excitabilité d'un nerf par des renversements alternatifs du sens du courant. Ce sont là des phénomènes qui ont été connus dès la première période des études faites sur l'action physiologique des courants galvaniques: Volta les a décrits, et on leur a donné le nom d'alternatives voltaïques.

Je ne puis terminer ce court exposé des effets produits par les courants sans vous dire quelques mots des carac tères différentiels qu'on avait cru pouvoir tirer de la comparaison de leur action sur les nerfs moteurs et sensitifs : ce sera un pas de fait vers la solution de la question qui est le sujet véritable de la première partie du cours, à savoir, l'examen de la valeur des traits distinctifs que l'on a indiqués entre les fibres nerveuses motrices et les fibres nerveuses sensitives. On a constaté qu'en faisant passer un courant continu au travers d'une certaine partie de la longueur d'un nerf mixte, on observe, lorsque le nerf a un peu perdu de son excitabilité primitive, qu'il n'y a de contractions musculaires qu'au moment de la fermeture du courant, s'il est direct, et au moment de l'ouverture ou de l'interruption, si le courant est inverse. MM. Longet et Matteucci ont cherché si les phénomènes seraient les mêmes dans le cas où l'on ferait passer les courants par la racine antérieure, racine exclusivement motrice, des nerfs. Or, ils ont vu que l'on ne produit alors des convulsions qu'au commencement du courant inverse et à l'interruption du courant, direct. On voit que les résultats sont tout à fait renversés, et il paraissait naturel de conclure que la différence était due au mélange des fibres sensitives aux fibres motrices dans les nerfs mixtes: l'on arrivait donc à déduire de ces expériences une preuve puissante tendant à démontrer qu'il y a une différence constitutionnelle entre les nerfs sensitifs et les nerfs moteurs. Ajoutons même que les effets que nous venons d'indiquer se montrent, avec le même contraste, lors même que les nerfs sont récemment mis à nu, à condition que la pile soit très-faible. Cette observation, due à M. J. Regnauld, répon

drait à l'objection sérieuse que l'on a fondée sur ce que, pour obtenir les effets précédents, il faudrait, suivant les premiers observateurs, attendre un certain temps, parce que, dans une première période qui suit la préparation des nerfs, on verrait les contractions se produire aussi bien à l'ouverture qu'à la fermeture du courant, quel que fût le sens de celui-ci.

Ainsi donc, les expériences de MM. Longet et Matteucci sembleraient fournir un argument sérieux en faveur des physiologistes qui admettent une dissemblance radicale, profonde, entre les fibres nerveuses sensitives et les fibres motrices. Mais quelle est la valeur réelle de cet argument? Toutes les expériences récentes tendent à montrer qu'elle est nulle. En effet, M. Cl. Bernard a fait voir, le premier, que ces expériences, exactes dans les conditions où elles ont été faites, ne donnent plus les mêmes résultats dans les conditions véritablement physiologiques. Lorsque les racines des nerfs sont intactes, et que l'excitabilité des nerfs est encore normale, les contractions ne se montrent jamais qu'au moment de la fermeture du courant, quel que soit le sens de ce courant, et que le nerf sur lequel on agit soit mixte, ou purement moteur. Ces résultats out été confirmés par M. Em. L. Rousseau et par M. Chauveau. On n'est donc pas autorisé à tirer des expériences que nous avons relatées la conclusion qu'on en avait tirée tout d'abord, puisque ces expériences ne s'appliquent pas aux phénomènes normaux de la physiologie des fibres nerveuses. Il est probable d'ailleurs que ces résultats, qui ont, en tout cas, un certain intérêt, peuvent s'expliquer par les différences considérables d'excitabilité que présentent les divers points d'un nerf quelconque, et par

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