La nuit: poésies

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Mercure de France, 1911 - 375 páginas
 

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Passagens conhecidas

Página 47 - ... vents parfumés flotte un mal ironique. Tu t'es faite, ô ma sœur, gardienne à l'hôpital, Pour mieux repaître tes regards d'oiseau de proie Du spectacle écœurant, cruel et plein de joie De la chair qui se fend sous le couteau brutal. Dans le grouillis rougeâtre et gluant des viscères, Des muscles découpés, des tendons mis à nu, Des nerfs, où vibre encore un vouloir inconnu, Des glandes qu'on incise et des flasques artères, Tu plonges tes deux bras polis, avidement, Tandis qu'erré...
Página 13 - Etalent salement dans leurs contorsions Les ulcères cachés des noires passions. J'ai palpé les secrets douloureux des grands drames. Puis, les deux bras encor teints d'un sang scrofuleux, Poète, j'ai noté dans mes vers scrupuleux Ce que mes yeux aigus ont vu dans ces ténèbres. Et s'il manque un sujet au couteau disséqueur, Je m'étends à mon tour sur les dalles funèbres Et j'enfonce en criant le scalpel dans mon cœur.
Página 53 - Voici qu'à l'horizon coule un fleuve de sang. De sa pourpre lugubre et splendide il inonde, Sous les cieux consternés, l'orbe muet du monde, Où l'horreur d'un grand meurtre invisible descend Ainsi qu'au lendemain des épiques désastres Pour les princes vaincus on drape l'échafaud, La nuit, sur le zénith, debout comme un héraut, Étend l'obscurité de son deuil larmé d'astres.
Página 7 - L'Aube et La Lumière. L'auteur l'avoue en tremblant : il tente d'accomplir sur un plan lyrique le sublime pèlerinage de l'Enfer, du Purgatoire et du Paradis. Ici toutefois, ce n'est pas un voyageur qui erre dans ces mondes augustes et redoutables et qui décrit ce qu'il y voit, c'est un acteur multiple et passif, qui les trouve dans l'intérieur de son âme, qui souffre tour à tour tous les supplices de l'Enfer, qui pleurera toutes les larmes du Purgatoire...
Página 54 - Étend l'obscurité de son deuil larmé d'astres. Exsangue et phosphoreuse, ô tête dont la chair A gardé la pâleur et le froid de l'épée, — Lumineusement roule une lune coupée Dans le silence noir et la terreur de l'air. Rien ne s'anéantit. Tout ce qui fut, persiste. Les crimes d'ici-bas renaissent dans les cieux. Ce soir, dans le palais aérien des dieux, Hérodiade a fait décoller Jean-Baptiste.
Página 48 - De putréfactions ranees, dont tu t'égaies. Car ton âme de monstre est folle des gaîtés Cocasses de la couche où le mourant se cabre Dans les convulsions de la danse macabre, Et la Mort a pour toi d'hilarantes beautés. Qui nous expliquera ta funèbre hystérie, Pauvre femme, produit de ce siècle empesté? On dit que ton baiser trouble la volonté Et communique aux os une lente carie. Mais de ton mâle cœur monte un puissant amour. Comme un vin orgueilleux, plein de rouges prestiges, Sa riche...
Página 116 - Dans les quartiers lascifs des modernes Sodomes Où le meurtre et le viol cachent leurs voluptés, Quand j'introduis, le soir, mes regards attristés, J'ausculte en frissonnant les monstres que nous sommes; Je sens peser sur moi tous les crimes des hommes Et je pousse des cris vers les cieux irrités.
Página 125 - Sur les gazons soyeux un agneau tendre et pur Rêve dans la candeur renaissante des choses. LE MENSONGE J'ai creusé mon cachot dans le mensonge épais, Impénétrable et sombre, où geôlier de moi-même, Je m'enferme à l'abri même de ceux que j'aime, Plus seul quand j'ai parlé qu'aux temps où je me tais. Ma parole est un mur sans porte ni fenêtre Qui monte autour de moi, dur, puissant et massif, Avec maint bas-relief gai, trompeur et lascif : Et nul œil curieux jusqu'à moi ne pénètre....
Página 47 - O vierge au bistouri, vierge au cœur de Huron, Le resplendissement serein d'une Madone. Sur ton sein, les stylets, les pinces, les ciseaux, La spatule, la scie équivoque et les sondes, Bijoux terrifiants et breloques immondes, Comme un bouquet d'acier étoilent leurs faisceaux. Tes doigts fins, à tremper dans les pus et les plaies, En ont pris le tranchant affilé des scalpels ; Et l'odeur de ton corps suave a des rappels De putréfactions rances, dont tu t'égaies. Car ton âme de monstre est...
Página 149 - ... miracles, Des cieux pleins de dieux morts je tisse ton linceul. LA DOULEUR DU MAGE Le vieux mage, sous les sévères colonnades, Laisse traîner son lourd manteau sacerdotal De pourpre et d'hyacinthe, au long des balustrades Sur les dalles d'onyx, de jade et de cristal. Sur les lys écrasés et les roses foulées Où coulent lentement ses longues franges d'or, Les pesantes vapeurs des essences brûlées Comme des serpents bleus se déroulent encor. Et des paons merveilleux d'azur et d'émeraude,...

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