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Nous avons étudié avec un soin tout particulier le mode d'altération de la fibre musculaire et du tissu osseux, dans les dépôts cancéreux secondaires. Nous protestons ici encore contre le terme vicieux de transformation. Le dépôt cancéreux qui se fait dans l'interstice des fibres musculaires, ou dans la membrane médullaire des os, fait disparaître les éléments de ces tissus par absorption et par compression, et de plus les vaisseaux chargés de la nutrition normale de ces parties paraissent avoir changé de rôle et ne plus charrier, pour ainsi dire, que les éléments nutritifs du cancer.

En examinant au microscope les adhérences qui s'établissent entre le mamelon et les parties sous-jacentes, on y trouve du tissu cellulaire, tantôt simplement hypertrophié, tantôt mêlé de tissu cancéreux englobant les conduits galactophores ratatinés, et atteignant, dans un certain nombre de cas, les lames profondes du derme; c'est alors que la circulation, réduite à un moindre espace, doit produire un état hypérémique de la surface, et bientôt un travail érosif et ulcéreux s'établit par suite d'une circulation de plus en plus impossible.

L'ulcère cancéreux montre au microscope les globules spécifiques plus ou moins altérés et ceux du pus et du sang, les uns et les autres rarement en bon état ; quelquefois on y trouve des paquets entiers de fibres élastiques bien plus résistantes à la fonte cancéreuse que les fibres ordinaires; de plus, une multitude innombrable de petits vibrions recouvrent la surface de l'ulcération.

Un fait important, que l'examen microscopique nous a révélé, est l'existence de globules cancéreux dans les glandules de l'aisselle à peine engorgées chez plusieurs malades qui avaient succombé aux suites immédiates d'une opération du cancer du sein.

Nous avons trouvé que des tumeurs, extrêmement dures, mettaient un obstacle au développement quantitatif des cellules, tandis que les tumeurs très molles le favorisaient indubitablement, et quelquefois d'une telle façon que les cellules se formaient en quantité trop notable pour qu'elles puissent se bien développer individuelle

ment.

Nous avons constaté une fois l'existence du suc cancéreux dans les vaisseaux lymphatiques de la région axillaire, et plusieurs fois dans les tumeurs même du sein. Lorsque des tumeurs cancéreuses existaient dans un grand nombre d'organes, la forme et les dimensions des cellules étaient ordinairement les mêmes dans tous.

Lorsque l'examen microscopique nous a révélé la persistance de petits lobules glandulaires au milieu du cancer, nous les avons gé

néralement trouvés atrophiés et dépourvus de leur épithélium. Un dernier point à noter, enfin, est la présence d'éléments fibreux et fibro-plastiques dans le tissu fibro-colloïde que l'on rencontre quelquefois conjointement avec le cancer.

2o Infection cancéreuse consécutive au cancer du sein.

Nous possédons en tout 34 observations de cancer du sein, dans lesquelles l'autopsie cadavérique a pu être faite. Sur ce nombre, 25 nous appartiennent en propre ; les 9 autres nous ont été communiquées par notre ami M. Broca, 2 avec des observations complètes, et les autres en résumé seulement; aussi les deux premières seules entreront-elles plus tard dans l'analyse de l'observation clinique. Pour ne pas toujours les grouper à part, nous dirons tout de suite ici que, sur ces 9 cas, 4 femmes sont mortes un certain temps après l'opération, dont 3 montraient l'infection cancéreuse et 1 l'absence d'infection, tandis que sur 5 femmes mortes des suites immédiates de l'opération, 4 fois il y avait absence et 1 seule fois présence de dépôts cancéreux secondaires.

Si, à présent, nous jetons un coup d'œil sur l'ensemble des 34 autopsies, nous pouvons les diviser en quatre catégories dont les particularités ressortiront dans le tableau suivant :

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Il résulte de ce tableau que, dans 34 autopsies, l'infection cancéreuse a existé dans près des 5/70s des cas, et qu'elle n'a manqué que dans les 2/7, proportion d'infection qui doit être classée parmi les plus fortes dans le tableau de la généralisation du cancer des divers organes. Nous avons, de plus, un enseignement fort utile dans ce tableau: c'est que sur 11 décès qui ont suivi de près l'opération, dans plus de la moitié l'infection manque, tandis que dans les 23 autres cas, elle n'a manqué que chez 1/6e à peu près des individus, ce qui démontre évidemment que la mort, dans ces circonstances, a été trop précoce pour laisser à la maladie le temps de produire des

dépôts secondaires et multiples. Hâtons-nous de faire observer tout de suite ici qu'il ne faut pas prendre le chiffre de 11 individus morts par opération comme chiffre proportionnel par rapport aux 34 décès, car nous y comptons les 5 cas de M. Broca, pour lesquels la proportion de mortalité, par rapport au nombre des opérés, ne nous a pas été indiquée. Notre proportion, à nous, est de 6 cas de mort par suite de l'opération, sur 34 individus qui l'avaient subie.

Nous arrivons à présent à la question de savoir quelle était l'affinité des diverses parties de l'organisme par rapport à ces cancers métastatiques et secondaires. Voici, avant tout, le tableau synoptique qui résulte du dépouillement des 23 autopsies dans lesquelles l'infection a eu lieu :

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10° à 17° Le médiastin, la surface du pancréas, les ovaires, la veine cave, le trajet des gros vaisseaux du thorax, celui des vaisseaux mammaires, la membrane externe des artères, le névrilème, 4 fois chaque.

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Nous voyons donc que, sans compter la fréquente extension du cancer d'un sein à l'autre, il y a surtout une prédilection non douteuse aux dépôts secondaires dans le système osseux, dans le foie, dans les glandes lymphatiques, dans les voies respiratoires, les muscles pectoraux et brachiaux, et dans la peau, surtout celle des parois thoraciques.

Nous allons d'abord faire quelques remarques sur chacun de ces organes, par rapport aux dépôts carcinomateux métastatiques, et nous citerons ensuite le résumé très succinct des cas les plus remarquables d'infection que nous ayons observés, pour donner au lecteur la physionomie pour ainsi dire du mode d'extension et de multiplicité de ces altérations.

1o Le système osseux, infecté chez 14 sujets, a offert plusieurs fois des dépôts multiples, non seulement dans le même os, mais même

sur divers points du squelette. Nous avons trouvé 8 fois le sternum malade, 6 fois l'un des fémurs ou les deux fémurs, 4 fois les côtes, 3 fois les os du crâne, 2 fois les clavicules et 1 fois l'os des iles. On a dit que, lorsque le cancer secondaire avait son siége dans les os, c'était surtout la partie médullaire de l'os qui en était le lieu d'élection. On y a évidemment trop généralisé; cependant cela est vrai pour le fémur, ainsi que pour le diploé des os du crâne. Il en est tout différemment pour le sternum et les côtes, qui, tantôt sont atteintes par continuité, par usure, tantôt offrent des dépôts secondaires sous forme de tumeurs à leur face postérieure, tandis que leur intérieur, rarement le siége d'une véritable tumeur, est ordinairement plutôt infiltré de suc cancéreux. Nous avons enfin vu, dans la clavicule, l'extrémité articulaire tout entière se perdre dans une masse encéphaloïde dont le point de départ primitif aurait été difficile à déterminer. C'est dans les côtes et les fémurs que les fractures cancéreuses se sont présentées à notre observation; l'os atrophié et aminci se rompt alors brusquement dans un effort musculaire, le cancer pullule entre les fragments, et un travail incomplet de réparation, se bornant à de simples réseaux de matière calcaire, se fait à la surface et finit par constituer, au moyen de quelques plaques ossiformes, un cal des plus imparfaits. Le système osseux subit dans le cancer du sein une autre altération fort remarquable, savoir, une diminution générale dans la nutrition, qui a pour suite un amincissement, une plus grande flexibilité, des déformations comme rachitiques; en un mot, une véritable atrophie des os, tant dans leurs parties calcaires que dans leurs parties organiques.

20 L'infection cancéreuse des deux seins peut se faire de deux manières différentes. Dans quelques cas exceptionnels le cancer d'un sein s'étend à l'autre par continuité; mais le plus souvent les dépôts secondaires s'y font d'une manière indépendante, et même d'une manière tout à fait tardive, et se distinguent en cela des récidives après l'opération qui, par contre, sont plus fréquentes dans la cicatrice ou dans les environs du sein primitivement affecté.

3° L'infection des glandes lymphatiques est, on le sait, un des premiers signes de la généralisation du cancer du sein; aussi le chirurgien qui doit opérer une de ces tumeurs les regarde-t-il comme de mauvais augure. 8 fois sur 9 nous avons trouvé les ganglions de la région mammaire, axillaire et sus-claviculaire affectés, et c'est surtout dans le cancer du sein que leur accumulation, dans le creux axillaire, produit l'œdème par compression dont nous parlerons plus loin. Chez

3 de ces 9 malades les deux régions inguinales étaient également le siége de ganglions cancéreux multiples; une fois nous avons trouvé les glandes cervicales et une fois les glandes bronchiques cancéreuses. L'infection des glandes de la région mammaire et axillaire appartient à l'infection précoce, tandis que celle des autres glandes est propre à l'infection tardive.

4o Le foie offre une aussi grande disposition aux dépôts secondaires dans le cancer du sein que dans les autres cancers externes, et l'on y observe les masses multiples de l'intérieur de son parenchyme aussi bien que les masses plus superficielles qui offrent une surface déprimée en forme de godet. M. Virchow a cru que cette dépression était un signe de condensation et de retrait cicatriciel du cancer. Nous ne pouvons nullement partager cette manière de voir, et aussi bien à la plèvre qu'à la surface du foie, cette dépression ne nous paraît indiquer autre chose que le dépôt primitif de ces cancers dans le tissu cellulaire sous-séreux; et comme ces productions ne franchissent pas alors la surface du péritoine ou de la plèvre, mais croissent de préférence du côté du parenchyme hépatique ou pulmonaire, de dehors en dedans, on comprend aisément qu'elles entraînent une portion de la surface de la séreuse, tandis que celle-ci est bombée, au contraire, lorsque les tumeurs cancéreuses se sont développées primitivement de dedans en dehors. Il est digne de remarque aussi que le cancer du foie et des plèvres, dans le carcinome du sein, appartient aux dépôts tardifs, qui généralement vont en augmentant jusqu'à la fin, et sont, par conséquent, bien loin de montrer la moindre tendance curative.

5o Les organes respiratoires s'infectent, nous l'avons vu, également avec une grande fréquence. Sur 9 cas, nous avons observé 6 fois des cancers secondaires dans les poumons, 5 fois des plaques grisâtres sous-pleurales, et 2 fois de nombreux réseaux lymphatiques à la surface des poumons remplis de suc cancéreux. Évidemment la fréquence des dépôts secondaires dans le foie et les poumons tient en premier lieu à l'infection du sang, qui tout naturellement produit de préférence les exsudations morbides dans les parties les plus vasculaires de l'économie.

6 Nous avons vu la peau devenir le siége d'une multitude de petits tubercules cancéreux dans ses lames profondes; 2 fois nous en avons rencontré dans celle des parois abdominales, et 5 fois dans le pourtour des seins cancéreux : il y avait alors plus de 100 tubercules squirrheux, dont le volume n'excédait pas celui d'un pois.

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