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CHAPITRE VII.

CANCER ET AFFECTIONS CONFONDUES AVEC LE CANCER
DANS LES CENTRES NERVEUX.

SECTION PREMIÈRE.

CANCER ET TUMEURS NON CANCEREUSES DU CERVEAU.

Nous nous occuperons, maintenant surtout, des tumeurs cancéreuses et des productions accidentelles confondues avec le cancer de la portion encéphalique des centres nerveux, en y comprenant tou tefois les enveloppes membraneuses et osseuses, les méninges et la boîte crânienne; car on ne saurait réellement pas séparer, lorsqu'on veut arriver à un résultat pratique, les produits accidentels de toutes ces diverses parties. Quant à la description de ces mêmes maladies dans la moelle épinière, elles y sont à la fois plus rares et bien moins connues; et comme nous avons sur ce point peu de faits personnels, nous nous contenterons de donner un résumé des recherches de M. Ollivier (d'Angers).

Quant aux matériaux qui nous ont servi dans nos recherches sur plusieurs espèces de tumeurs cérébrales, nous avons, au contraire, un véritable embarras de richesse; car la science, tout en étant incomplète encore sur plusieurs points importants de leur histoire, & cependant été dotée depuis cent ans d'un grand nombre de travaux sur les tumeurs crâniennes, méningiennes et encéphaliques, et plusieurs sont fort remarquables par les détails d'observation et par les généralisations judicieuses auxquelles elles ont donné lieu. Nous commençons par éliminer toutes les tumeurs qui ne tiennent pas à ces organes par un lien vasculaire et circulatoire. De cette façon nous n'avons point à nous occuper de la grande classe des affections tuberculeuses, qui, du reste, ne sont, pour la plupart temps, dans le cerveau qu'un dépôt secondaire. Nous éliminons aussi les hydatides et surtout les cysticerques, qui ne sont pas rares dans le cerveau de l'homme. Nous n'avons pas à nous occuper non plus des kystes de nature diverse, et qui ne sont, la plupart du temps, que des abcès enkystés ou des restes d'épanchements sanguins. Nous

du

nous en tiendrons de préférence à la description des tumeurs cancéreuses proprement dites, et de celles que le plus grand nombre d'auteurs ont confondues avec le cancer, et qui, comme nous le démontrerons plus tard, sont bien souvent composées de tissu fibro-plastique, point sur lequel nous avons déjà insisté dans notre Physiologie pathologique.

Cette distinction entre les tumeurs cancéreuses et fibro-plastiques fera aisément comprendre pourquoi, avant cette distinction, on avait déjà généralement remarqué que les tumeurs fongueuses de la duremère étaient souvent uniques dans l'économie.

Nous démontrerons aussi, par l'analyse de faits nombreux, que depuis la surface du péricrâne jusqu'au fond de la base crânienne, pas un tissu, pas un organe n'échappe au développement primitif de ces tumeurs, et que celles-ci, par conséquent, peuvent naître dans le péricrâne, dans le tissu osseux, surtout dans le diploé, à la surface externe et interne de la dure-mère, sur ses parties planes, et dans les sinus ou sur le tranchant même de la faux, dans l'arachnoïde et la pie-mère, dans tous les points enfin de la pulpe cérébrale et cérébelleuse.

Nous n'aurions évidemment pu être complet sur tous ces points si variés de l'anatomie et de la pathologie de ces tumeurs, si nous nous étions borné à nos propres observations. Quoique recherchant depuis longtemps les tumeurs crâniennes et intra - crâniennes dans tous les hôpitaux de Paris, nous n'avons pu réunir, pour les tumeurs qui nous occupent ici, que 21 observations, chiffre qui est également supérieur à celui des observations originales de chacun des auteurs sur cette matière. Nous en avons observé 3 nouveaux cas depuis l'analyse de nos anciennes observations.

Pour réunir en doctrines toutes les notions éparses sur ce point de la pathologie, nous avons dû puiser dans les nombreux travaux de nos prédécesseurs. Voici en deux mots le choix de nos matériaux. Nous avons étudié avant tout les travaux plus anciens sur cette matière, à commencer par le célèbre mémoire de Louis (1). Nous avons ensuite comparé et cherché à contrôler les opinions divergentes émises par ceux qui se sont occupés de ce sujet après le travail de l'illustre secrétaire de l'ancienne Académie. De ce nombre sont surtout Sandifort, Siebold, les frères Wenzel, Walther, Graefe, Klein, Chélius.

(1) Mémoire sur le fongus de la dure-mère (Mémoires de l'Académie de chirurgie, t. V).

Nous rendons surtout hommage à ce dernier auteur qui, s'il n'a pas encore compris la différence des tissus et de nature des tumeurs décrites comme cancéreuses dans ces régions, a au moins le premier démontré la diversité et la multiplicité de leur siége, ainsi que leur point de départ dans les parties dures, molles, compactes, membraneuses et parenchymateuses de tous ces organes. Les auteurs de cette première période nous ont donc plutôt fourni, par la lecture, des notions générales que des observations complètes susceptibles d'une analyse détaillée.

Nous avons emprunté de fort bons matériaux ensuite pour nos analyses aux auteurs plus récents que nous appellerons de la seconde période, et qui, tout en ayant moins généralisé, ont cependant observé ces tumeurs avec plus de détails, et à la fois d'une manière plus éclectique et plus physiologique. Avant tout nous trouvons, dans les Bulletins de la Société anatomique, des matériaux fort précieux. Parmi les nombreux faits de tumeurs cérébrales et crâniennes que renferme cet excellent recueil, il y en a 33 qui ont pu nous être de quelque utilité. Tous, il est vrai, n'ont pas pu nous servir au même degré; mais tous au moins sont rapportés avec des détails suffisants pour les points sur lesquels nous invoquons leur témoignage.

Abercrombie (1) nous a également fourni de précieux matériaux. Deux de ses observations détaillées ont pu entrer en entier dans nos analyses. De plus, nous trouvons, dans l'appendice de la troisième partie, sur le nombre des 46 faits rapportés en extrait, 27 qui ont pu nous être de quelque utilité. Nous empruntons, de plus, pour notre analyse, 7 observations à M. Andral (2), 6 à M. Cruveilhier (3), un fait curieux à M. Rayer (4), un fait fort remarquable d'une tumeur cérébrale avec perforation du crâne, à la thèse de M. Malespine (5), et 2 observations, enfin, à un manuscrit sur les maladies cérébrales que M. Durand-Fardel a eu la bonté de mettre à notre disposition.

(1) Des maladies de l'encéphale et de la moelle épinière, traduit de l'anglais par M. Gendrin. Paris, 1835.

(2) Clinique médicale. Paris, 1834, t. V.

(3) Anatomie pathologique du corps humain. Paris, 1829-1842,

8. livraison.

(4) Mémoire sur le cancer de la glande pituitaire (Archives générales de médecine, 1823, t. III, p. 350 à 367).

(5) Thèse sur le fongus de la dure-mère. Paris, 1846, no 44.

Le nombre total des faits qui nous ont servi s'élèvent ainsi au chiffre de 101; mais comme plusieurs ne sont complets que pour les détails anatomiques, tandis que dans d'autres les symptômes sont plutôt décrits avec soin, sans que la même exactitude ait été portée dans la description des lésions, nous arrivons au chiffre de 98 faits analysés dans la partie anatomique et à celui de 90 dans la partie pathologique de ce travail.

Nous aurions pu porter le nombre de nos matériaux beaucoup plus loin en y faisant entrer les faits anciens qui sont rapportés avec détail, et en utilisant le très grand nombre d'observations publiées dans ces dernières années dans les ouvrages physiologiques et pathologiques sur les centres nerveux, ainsi que dans les divers recueils périodiques. Mais ces matériaux trop nombreux n'auraient servi qu'à embrouiller plutôt qu'à éclairer les doctrines, si confuses encore, sur ces maladies.

Quoique nous ayons mis un soin extrême à tirer de toutes ces observations le parti le plus complet possible, nous sommes cependant obligé d'avouer que, par suite de leur manque d'homogénéité, les résultats statistiques et numériques qui pourraient en être déduits, tant sur la fréquence comparative des lésions que sur celle des symptômes, n'auront peut-être pas toute la rigueur et toute l'application générale désirables. D'un autre côté, cependant, nous espérons être à même de tracer, avec ces matériaux, l'histoire de tous les points essentiels de ces tumeurs, sans sortir de la voie de l'observation, la seule compétente en pareille matière.

Avant d'aborder les résultats de nos propres analyses, nous allons jeter un coup d'œil historique rapide sur les travaux que nous considérons comme ceux de la première période, en ce qui concerne les doctrines sur les tumeurs cérébrales, méningiennes et crâniennes.

Louis a, sans contredit, le mérite d'avoir le premier attiré d'une manière générale l'attention des médecins sur ce sujet, en réunissant des matériaux épars, qui par cela même étaient auparavant restés sans portée, en un ensemble homogène dans son mémoire sur le fongus de la dure-mère. Cependant il y fait plutôt preuve d'une grande sagacité et d'un rare talent de généralisation que d'une méthode d'observation rigoureuse et exacte. Bien que la description générale du fongus de la dure-mère y soit tracée assez fidèlement et que les principaux symptômes de cette affection y soient analysés avec discernement, il n'est pas moins vrai que les 20 observations

qui servent de base à ce travail laissent, pour beaucoup d'entre elles, des doutes légitimes sur la nature, le point de départ et le siége des altérations décrites. Pour commencer par la première observation, la seule, à peu près, qui appartienne en propre à Louis, la lecture attentive de ce fait laisse évidemment de l'incertitude sur la question de savoir si la tumeur provenait réellement de la dure-mère ou des méninges sous-jacentes. Le passage suivant ferait supposer que la tumeur n'était nullement située à la surface externe et libre de la dure-mère, et qu'elle avait plutôt poussé celle-ci audevant d'elle « La substance fongueuse de la dure-mère était » revêtue d'une membrane qui en circonscrivait exactement l'é» tendue.

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Nous devons, avant tout, faire remarquer que nous éprouvons une difficulté dans l'indication du chiffre des observations, et c'est pour cela que nous serons obligé chaque fois d'y ajouter le nom des auteurs, car le chiffre 10 se trouve pour deux observations, pour celle de Marrigues et pour celle de Heister. Nous désignerons donc l'une par le chiffre et l'autre par celui de 10 a. L'observation de Fabrice de Hilden, qui est relatée à la fin, est sans chiffre; nous la désignerons sous le n° 20 a.

Sur le nombre total il n'y en a que 12 dans lesquelles les tumeurs nous aient paru tirer leur origine des méninges, sans que nous puissions cependant décider si c'était de la dure-mère exclusivement ou des autres membranes du cerveau. Ces 10 observations sont : la l de Louis, la 5 de Février, la 6o de Sivert, la 8e de Rey, la 10 de Marrigues, la 11e de Chopart, la 13e de Saltzmann, la 14° de Volprecht, la 15° de Jauchius, la 16° de Grima, la 17° de Pohlius et la 18 de Phillippe. Les 12 et 19 observations de Koenig et de Sand ne nous paraissent être autre chose que des cas de carie crânienne. Les observations 2o d'Ambroise Paré, 3o de Petit, 4o de Engerran, 7 de Robin, 9o de Legrand, 10 a de Heister, ce qui fait six observations, sont trop incomplètes pour qu'on puisse bien se rendre compte de la nature et du siége des lésions. Deux observations enfin, la 20 de M. A. Severin et la 20 a de Fabrice de Hilden, laissent des doutes bien plus légitimes encore que les précédentes par rapport au diagnostic, vu qu'elles traitent d'un prétendu fongus de la dure-mère guéri par l'opération. On jugera combien pous avons raison d'accepter ces faits avec réserve en les citant textuellement. Voici d'abord celui de Marc-Aurèle Severin.

Cet auteur, en parlant des opérations qu'on pratique sur les

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