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étudier la diffusion des cellules sur laquelle M. Virchow (1) a fait beaucoup de recherches dont nous aurons occasion de parler avec détail plus loin.

Le suc cancéreux est quelquefois rougeâtre par son mélange avec le sang; mais en multipliant les coupes de la tumeur, en essuyant leur surface avant d'en exprimer le suc, on obtiendra ordinairement celui-ci avec ses caractères essentiels. Dans le cancer mélanique, ce suc est teint en brun ou presque en noir, teinte dont le fond ressemble toujours à celle de la sépia, et qui trouble l'eau en brun plus ou moins foncé. Lorsque le cancer, renferme beaucoup d'éléments gras, le liquide, sans changer de couleur, paraît plus trouble et plus épais, et c'est alors que la compression fait sortir du tissu cancéreux le suc sous forme de petits vermisseaux. Dans le squirrhe, le suc est généralement plus ténu que dans l'encéphaloïde; quant au suc du cancer colloïde, il y a plusieurs variétés importantes à signaler. Il existe une forme de cancer colloïde qui se rapproche beaucoup de l'encéphaloïde et qui, dans la même production, peut alterner avec lui. Dans celui-ci on rencontre tantôt un suc peu épais, tantôt le suc par petits grumeaux gélatiniformes que l'on obtient aussi du tissu cancéreux plus franchement colloïde. Selon leur plus ou moins grande quantité d'éléments cancéreux mêlés à la gelée tremblotante, on reconnaît également dans ces cas des cellules cancéreuses au moyen de l'inspection microscopique, et l'on dirait que le sérum de ce suc y existe à l'état coagulé. Une forme intermédiaire entre le sérum liquide de ce suc et les grumeaux que nous venons de décrire est constituée par cette matière d'apparence muqueuse que l'on a appelée pyine.

La description générale que nous venons de donner du suc cancéreux s'applique au cancer de tous les organes. En effet, quel que soit le siége du cancer, le suc, avec ses variétés ou altérations, est presque aussi constant et caractéristique que la présence de la cellule cancéreuse.

2o De l'aspect du tissu cancéreux sur une coupe fraîche.

Le tissu cancéreux, tout en ayant des caractères constants, offre à côté de ceux-ci des variétés d'aspect, de consistance, de coloration, de vascularité, de mélange avec des éléments gras ou gélatiniformes, qui ont fait envisager ces caractères fortuits comme suffi

(1) Virchow, Archiv fur pathologische Anatomie und Physiologie, t. III.

sants pour établir autant d'espèces différentes. Il y a là une profonde erreur. Le cancer affecte des formes différentes, mais il ne peut pas être sous-divisé en espèces; il constitue toujours une unité pathologique bien tranchée.

Les caractères constants et fondamentaux du tissu cancéreux sont bien simples une trame molle ou plus ou moins dure, presque homogène, d'apparence fibreuse, généralement infiltrée d'un liquide trouble, lactescent et blanchâtre, tout à fait fluide ou mêlé avec une substance molle et incomplétement transparente. Ce tissu, avec sa trame solide et son suc infiltrant, différencie le cancer de tous les tissus de l'économie. Qu'on le compare, en effet, aux tissus simples, tels que le tissu cellulaire, fibreux, musculaire, cartilagineux; qu'on le compare ensuite à des tissus plus composés, aux membranes séreuses, muqueuses, au tissu glandulaire : il suffira toujours d'avoir les notions les plus élémentaires en anatomie générale, pour ne retrouver nulle part les caractères du tissu cancéreux. On pourrait objecter que, si celui-ci diffère des tissus normaux à l'état de développement complet, il offre cependant de la ressemblance avec les tissus embryonaux. Il faut avoir peu présent à l'esprit le développement des tissus et des organes pour commettre une pareille erreur, et si cette comparaison a eu pendant longtemps des partisans, c'est qu'on n'avait pas suffisamment étudié la vraie texture des tissus naissants des êtres vivants en voie de formation.

Ce tissu cancéreux mou ou presque homogène, d'un blanc pâle et jaunâtre, forme le type que l'on a décrit comme cancer mou, sous les noms de cancer cérébriforme, d'encéphaloïde, de sarcome médullaire. Lorsque le tissu a une plus forte consistance et que la trame fibreuse, à peine ébauchée, dans l'encéphaloïde très mou, est plus fortement développée et offre un aspect finement fibreux et réticulaire, on a sous les yeux une forme intermédiaire entre le cancer mou, encéphaloïde, et le cancer dur, le squirrhe.

L'esprit de systématisation a fait envisager le cancer de consistance élastique comme encéphaloïde à l'état de crudité, et celui d'une consistance molle et pulpeuse, comme encéphaloïde ramolli. Dans cette manière de voir, on n'a pas tenu compte du fait bien facile pourtant à constater qu'il n'y a là que des variétés d'embléeet en aucune façon des phases différentielles de développement.

Le tissu cancéreux offre souvent sur une coupe fraîche un aspect plus franchement fibreux. On voit alors des réseaux irréguliers, d'un

tissu ferme et blanchâtre, renfermer dans les interstices un tissu plus mou, d'un gris jaunâtre, duquel la compression fait sourdre de nombreuses gouttelettes de suc cancéreux. La vascularité y est ordinairement inégale. On y découvre, comme dans le tissu précédent, des points ou des interstices plus étendus, d'un aspect jaune et terne, qui tranchent sur l'aspect ordinairement luisant du tissu du cancer. Ce tissu cancéreux dur, peut varier depuis la fermeté élastique jusqu'à la dureté du fibro-cartilage, et constitue le cancer dur, la forme décrite comme squirrhe. Quant au tissu d'un jaune pâle et terne que l'on rencontre par grains et par plaques, dans le cancer mou, aussi bien que dans le cancer dur, nous y trouvons déjà une altération du tissu cancéreux, qui consiste en une infiltration moléculaire granuleuse et graisseuse. Si le cancer dur et le cancer mou constituent deux formes bien distinctes dans leurs types extrêmes on ne rencontre pas moins entre eux d'innombrables variétés de transition.

Un troisième aspect du tissu cancéreux est celui décrit sous le nom de gélatiniforme ou de colloïde, nom sous lequel on a confondu, du reste, des tissus morbides bien différents.

En effet, beaucoup de chirurgiens et de pathologistes ont conclu que tous les tissus accidentels d'apparence gélatiniforme étaient des cancers, parce qu'on rencontre le tissu gélatiniforme dans un cer tain nombre de tumeurs cancéreuses. Nous reviendrons sur ce point plus tard. Nous dirons seulement, dès à présent, qu'il n'est pas rare de rencontrer dans le cancer quelques portions demi-transparentes, ayant de la ressemblance avec de la gélatine tremblotante ou plus ferme, et que l'on observe ici tous les passages entre un tissu diaphane et un tissu gélatiniforme plus trouble et plus terne. Il n'est pas rare non plus d'observer dans la même tumeur une partie dure, une autre partie molle et une troisième gélatiniforme. On trouve en outre, chez des cancéreux, le caractère colloïde du tissu morbide dans un organe, tandis qu'un organe voisin renferme un tissu assez franchement encéphaloïde ou squirrheux.

L'aspect de la coupe correspond dans tous les cas au degré de mélange de ces tissus. La matière gélatineuse n'est pas, par ellemême, cancéreuse, mais elle est souvent combinée avec le cancer. Du reste, ce tissu colloïde est rarement homogène et la substance demi-transparente est ordinairement renfermée dans une trame fibreuse aréolaire fine, tandis que le colloïde, plus terne, affecte plus volontiers la forme finement lobulée.

La vascularité offre des degrés bien variables dans le cancer. Presque nulle dans certaines tumeurs dures ou molles, irrégulièrement distribuée par îlots dans d'autres, elle est surtout uniformément développée dans la forme molle du cancer; cependant nous avons rencontré des squirrhes très vasculaires, et entre autres un véritable squirrhe hématode du sein. Lorsque la vascularité est uniforme et générale, elle constitue la forme décrite sous le nom de cancer hématode ou de fongus hématode, affection qui a été souvent confondue avec les tumeurs érectiles non cancéreuses. Nous n'entrerons pas ici dans les détails sur les divers ordres de vaisseaux contenus dans le cancer, vu que nous devons revenir sur ce point en parlant de sa nutrition. On a souvent confondu les épanchements sanguins qui sont si fréquents dans le cancer, avec cette surabondance de vascularité. Quant au sang extravasé, on le trouve tantôt sous forme d'ecchymoses capillaires pour ainsi dire, tantôt sous celle d'épanchements véritablement apoplectiques et même très étendus. Ces épanchements qui subissent du reste de curieux changements par leur résorption partielle ne constituent que l'altération hémorrhagique et non une forme spéciale de ce tissu. Nous insisterons souvent sur la nécessité de séparer, même dans les tissus morbides, les formes qui proviennent de la prédominance d'un de leurs éléments et de leurs phases de développement, de leurs altérations, qui à leur tour, sont de véritables maladies du produit morbide. C'est par cette raison que nous n'admettons pas l'infiltration granuleuse et graisseuse comme une forme particulière de cancer, et Mueller, en établissant le cancer réticulaire comme espèce particulière, n'a pas tenu compte de la valeur de ce réticulum.

Une cinquième forme ou aspect du cancer est celle dans laquelle une matière colorante noirâtre prédomine, au point de donner à tout le tissu une teinte particulière, la teinte sépiacée ou mélanique, qui colore les tumeurs tantôt dans leur totalité, tantôt partiellement, et leur donne ainsi un aspect que l'on a comparé à celui des truffes. Nous hésitons d'autant moins à regarder le cancer mélané comme une forme particulière, que la matière colorante, brune ou noirâtre, se rencontre d'emblée, et souvent dans des tumeurs de ce genre qui sont encore tellement petites, qu'on ne les apercevrait même pas sans cette nuance de couleur. En outre, il y a des organes qui ont une prédilection vraiment marquée pour la forme mélanique du cancer. Tels sont, surtout, la peau, l'œil et l'orbite. Nous avons fréquemment observé dans des tumeurs cancéreuses

des traînées ou de petites places occupées par un pigment jaune particulier, auquel nous avons donné le nom de xanthose, et que nous avons le plus souvent rencontré sous forme d'infiltration d'ap. parence graisseuse et opalisante, et en dehors de toute trace d'épanchement sanguin antérieur, pigment qui nous paraît avoir de l'analogie avec la matière qui colore le tissu adipeux ou le jaune de l'œuf. Cette matière, quoique bien visible, ne s'est cependant point trouvée, dans nos observations, en quantité assez notable, pour nous autoriser à en faire une forme particulière de cancer pigmentaire xanthique.

Nous venons de tracer, d'après l'aspect du tissu cancéreux, ses cinq formes principales : le cancer mou comme prototype, l'encéphaloïde ; le cancer dur, le squirrhe; le cancer gélatiniforme ou colloïde; le cancer très vasculaire ou hématode; le cancer pigmenté enfin, ou mélanique. Nous signalons, dès à present, comme deux altérations fréquentes du cancer, les épanchements hémorrhagiques et le tissu d'un jaune terne ressemblant à de la matière tuberculeuse, auquel nous donnons, à cause de cette ressemblance, le nom de phymatoïde (μa, tubercule). Nous avons été conduit à créer ce nom nouveau par la nécessité d'éviter de longues circonlocutions, telles que tissu jaune pâle et terne, tissu d'apparence tuberculeuse, etc.

Après avoir ainsi caractérisé les deux points les plus essentiels de l'anatomie générale du cancer, le suc et l'aspect de ce tissu en général, nous allons jeter un coup d'œil sur quelques autres de ses propriétés moins importantes et moins essentielles. Nous allons ainsi passer en revue le volume, la surface et la consistance des productions cancéreuses.

3o Caractères externes, accidentels du cancer.

A. Volume. Le volume des tumeurs cancéreuses est extrêmement variable. On en voit depuis celui d'une tête d'épingle jusqu'à celui d'une tête d'adulte, et même la cavité abdominale peut, en majeure partie, en être remplie. Toutefois cette grande variété est encore soumise à quelques règles générales qui sont surtout en rapport avec les lieux où 'le cancer se développe, et nous verrons de plus que pour plusieurs organes, les tumeurs très volumineuses, réputées cancéreuses, ne le sont pas en réalité. Aussi tout ce qui a été dit sur le volume du cancer avant l'époque où les études microscopiques ont été invoquées pour la détermination des produits morbides doit être accepté avec une extrême réserve,

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