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ÉPIQUE.

I.

Origine de l'Épopée.

Le plus noble genre de poésie est en même temps un des plus anciens. L'Epopée n'a été précédée que par la poésie lyrique, qui, consacrée comme elle à chanter les héros et les dieux, avoit produit dès les premiers siècles de la Grèce les hymnes de Linus, d'Orphée et de Muséc. Mais lorsque le perfectionnement graduel de la langue, la succession des grands événements, et surtout les célèbres expéditions des Argonautes, de Thèbes et de Troie, eurent donné à l'esprit humain une impulsion nouvelle, les poëtes, proportionnant leurs plans à l'étendue de leurs sujets, consacrèrent dans leurs vers les annales de la Grèce ; et suppléant par le secours du merveilleux à l'insuffisance de l'histoire, ils formèrent une foule d'ouvrages détachés, que l'on pouvoit considérer comme autant de chants de triomphe. Telle fut l'origine de l'Epopée, bornée d'abord à de simples improvisations que les rhapsodes chantoient de ville en ville, dans la joie bruyante des festins ou dans la pompe des sacrifices. Mais l'idée de rassembler en un seul tableau une multitude de personnages divers, de donner à leurs discours la forme dramatique, et surtout de les grouper tous autour d'un

ETUDES GRECQ. SUR VIRG. II PARTIE. I

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seul héros sur qui repose l'intérêt principal, cette idée sublime, qui constitue l'essence du poëme épique, a été créée par Homère. Aussi ses ouvrages ont-ils fait oublier tous ceux de ses devanciers, dont l'existence même s'est perdue dans mille traditions fabuleuses.

I I.

HOMÈRE.

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Ce poëte illustre naquit à Smyrne, selon l'opinion la plus vraisemblable. Il fleurit environ neuf siècles avant l'ère vulgaire, trois cents ans après la ruine de Troie, l'époque où les colonies ioniennes, chassées du Péloponèse par les Héraclides, venoient de s'établir sur les côtes de l'Asie Mineure. On ne sait rien de certain sur sa vie ; on peut seulement conjecturer, d'après quelques passages de ses poëmes, qu'il voyagea beaucoup, qu'il vécut pauvre, et qu'il devint aveugle dans sa vieillesse. Ce fut pendent ses longues excursions dans les pays les plus civilisés du globe, dans l'Egypte, la Phénicie et la Crête, qu'il recueillit successivement cette foule de connoissances variées, répandues dans le cours de ses ouvrages. Abandonnant la trace des premiers rhapsodes qui raconil ne toient dans leurs chants toute la vie d'un héros, choisit dans l'histoire du siége de Troie que deux, circonstances épisodiques: la Colère d'Achille et le Retour d'Ulysse. Ce sont ces incidents, si peu importants en apparence, qui, fécondés par son génie, rattachés aux aḍtiques souvenirs de la Grèce, et développés dans le rhythme harmonieux de la plus belle des langues, ont pro

duit l'Iliade et l'Odyssée, ces monuments impérissables, qui sont encore, après vingt-six siècles, l'objet de l'admiration des peuples et le modèle le plus parfait de l'art. Nous allons en donner l'analyse.

ILIADE.

La colère d'Achille outragé par Agamemnon, la vengeance que Jupiter exerce sur les Grecs, la mort de Patrocle suivie de celle d'Hector; tel est le plan succinct de ce beau poëme. Mais par combien de ressorts ingénieux Homère ne sait-il pas en prolonger Vaction, la varier, l'enrichir sans cesse, faire succéder tour-à-tour dans l'âme des spectateurs l'admiration, la pitié, le plaisir et l'effroi! Avec quelle majesté ce vaste tableau ne se déroule-t-il pas à nos regards!

Les Grecs rassemblés depuis neuf ans sous les murs de Troie, pour rendre Hélène à Ménélas et pour venger l'honneur de leur patrie, n'ont pu encore faire tomber sous leurs coups cette reine puissante de l'Asie. Elle résiste à tous leurs efforts, défendue par le nombre de ses troupes, par la bravoure de ses auxiliaires, et surtcut par l'héroïsme d'Hector, la gloire et le soutien de l'empire de Priam.

1. Au premier chant, un pontife vénérable se présente dans le camp des Grecs pour redemander sa fille, captive d'Agamemnon. L'orgueilleux fils d'Atrée la refuse, et bientôt le courroux d'Apollon répand sur son armée une contagion mortelle. Achille, éclairé par Calchas, ose seul interpeller le roi des rois; la discorde éclate entre les deux chefs, malgré les représentations de Nestor; Agamemnon fait enlever Briséis, et Achille, couché sur le bord de la mer, invoque contre son ennemi l'assistance de Thétis. Jupiter, sensible à sa douleur, lui prépare une vengeance éclatante, et

tandis qu'Ulysse, abordant à Chrysa, offre un sacrifice à Apollon, le maître des dieux, sourd aux plaintes de Junon, médite la destruction des Grecs.

2. Abusé par un songe trompeur, Agamemnon prend la résolution de livrer un assaut général. Pour éprouver le courage de ses troupes, il leur propose de retourner en Grèce. Elles sont prêtes à céder, quand Ulysse les arrête, et, par un discours plein d'une noble éloquence, les enflamme d'une nouvelle ardeur. C'est alors qu'on voit se déployer toutes les phalanges de l'armée grecque. Chaque nation, caractéle nombre risée les villes qu'elle habite, par ses usages, par de ses vaisseaux, marche à la suite des chefs qui la commande, et se range en bataille sur les rives du Scamandre. Les Troyens, sous les ordres d'Hector, sortent également en foule des murs de Troie, suivis de leurs nombreux alliés, et se dessinent sur le tableau du poëte dans leur attitude étrangère et sauvage.

par

3. Les deux armées sont en présence: on n'attend plus que le signal. Tout à coup la scène change: Pâris et Ménélas s'avancent seuls dans la plaine, et se défient à un combat singulier. Tout s'intéresse à cet événement mémorable dont l'issue doit réconcilier l'Europe avec l'Asie. L'antique Ilion s'ouvre à nos regards; nous y voyons Hélène sur la tour de Pergame, nommant à Priam les chefs de l'armée grecque. Bientôt le traité est juré; les deux rivaux combattent; Pâris est vaincu; mais sauvé de la mort par l'intervention de Vénus, il rentre dans cette ville dont il est le fléau, et la divinité qui le protège ramène auprès de lui la malheureuse Hélène.

4. Cependant l'Olympe attentif délibère sur le sort des deux peuples. La perte de Troie est résolue; mais le sang des Grecs doit inonder ses murs pour satisfaire le ressentiment d'Achille. Une flèche partie des rangs troyens va frapper Ménélas; le ivre traité est rompu; la guerre est déclarée. Agamemnon, de vengeance, parcourt les rangs, anime ses troupes. Les principaux chefs de son armée, les deux Ajax, Idomé

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