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des Césars ou des Laridons. C'est là une vérité d'une extrême importance, dans une société où tous sont soldats, et que les éducateurs de la jeunesse ne doivent jamais perdre de vue.

C'est donc par ces pépinières d'instituteurs qu'on appelle les écoles normales que doit commencer la renaissance physique. Si les jeunes maîtres sortent de là avec le goût des exercices athlétiques, ils seront naturellement portés à le faire partager aux enfants dont ils auront la direction. Et combien est puissant l'exemple d'un maître qui affirme sa supériorité non seulement dans les choses de l'esprit, mais encore dans celles du corps! Que les directeurs encouragent donc, par tous les moyens dont ils disposent, le culte de la gymnastique. Je sais d'ailleurs que dans certaines écoles celle-ci n'est pas négligée, tant s'en faut, et j'en puis apporter de récents témoignages. Dans le concours du 18 mai entre les établissements scolaires de la Ville de Paris, dont j'étais un des organisateurs, et dont l'ensemble a été des plus satisfaisants, c'est un élève de l'école normale d'instituteurs qui a obtenu le prix du championnat offert par M. le Président de la République. Il en a été de même au concours de Dreux. Voilà de bons exemples à suivre pour les autres écoles normales. Qu'elles ne négligent aucune occasion de s'associer à ces fêtes régionales ou fédérales qui se généralisent d'une façon si heureuse sur toute l'étendue de notre territoire. Ne serait-il pas possible aux normaliens (c'est une idée que j'émets sous toutes réserves) de se constituer en sociétés régulièrement organisées, ayant leur nom, leurs insignes, et affiliées à l'Union générale des sociétés de gymnastique et de tir? J'en ai la conviction, ils tiendraient dans les concours un rang fort honorable, et les récompenses qu'ils y gagneraient stimuleraient leur zèle et leur activité. Puis une fois sortis de l'école, et dispersés par les besoins du service, ils seraient à leur tour les porteurs de la bonne parole et recruteraient dans la jeunesse des adhérents pour ces associations dont l'utilité patriotique a été si hautement reconnue par tous nos ministres de la guerre.

Mais en attendant l'âge où les enfants peuvent utilement pratiquer la gymnastique proprement dite, il importe de faire tourner leurs récréations mêmes au développement de leur corps, en les animant par des jeux actifs et variés. Ce n'est pas ici le lieu de donner un catalogue de ces jeux ou d'en faire la description; il existe assez de manuels complets sur la matière; les instituteurs n'auront qu'à y puiser et à faire un choix. De plus, en mainte province survit encore la tradition de quelque divertissement local, ici la paume, là les quilles, ailleurs le gouret. Cette tradition devra être soigneusement entretenue et au besoin ressuscitée. Est-ce trop compter sur le dévouement des maîtres que de leur demander de s'intéresser aux récréations des enfants en les dirigeant et en les encourageant? Nous ne le pensons pas, d'autant plus que ce serait un excellent moyen pour établir entre eux et les élèves ces rapports d'affection réciproque qui doivent,

REVUE PÉDAGOGIQUE 1890. 2. SEM.

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selon l'esprit des nouvelles théories pédagogiques, remplacer la crainte, autrefois seule base de l'autorité. Car l'enfant est profondément reconnaissant, j'en ai fait maintes fois l'expérience, aux grandes personnes qui condescendent à s'amuser avec lui et à partager ses distractions. Il serait enfin à souhaiter qu'à l'occasion de quelque fête locale, ou si l'on veut de la fête nationale, on organisât entre les élèves de plusieurs écoles voisines des concours d'adresse, d'agilité et de force, présidés par les autorités, et à la suite desquels on récompenserait ceux qui auraient fait la preuve de leur supériorité physique. Le jour où la moindre commune de France, à l'exemple de ce qui existe en certains pays, aura un emplacement pour y pratiquer la gymnastique et les jeux athlétiques, et où toutes les provinces, celles du nord comme celles du midi, la Bretagne comme la Savoie, seront entraînées dans le mouvement régénérateur, alors, mais alors seulement, on pourra se flatter que la cause de l'éducation physique est entièrement gagnée.

Je ne prétends pas avoir trouvé un moyen infaillible pour atteindre le but, et je n'ignore pas de combien d'obstacles la route est semée. Bien des difficultés matérielles ou autres retarderont longtemps l'exécution intégrale de ce grand dessein. Mais j'estime qu'il n'y a pas lieu de se décourager, et c'est pourquoi je fais appel à tous ceux qui envisagent avec une angoisse patriotique l'avenir de la race française, menacé au dehors par tant d'ennemis, et compromis au dedans par l'étiolement progressif des générations. Loin de nous d'ailleurs la pensée de vouloir brusquement bouleverser le système pédagogique qui a prévalu jusqu'ici. Un grand corps comme celui de l'enseignement primaire ne saurait changer sa méthode d'un jour à l'autre, et ce n'est qu'en prenant les plus grands ménagements que l'on assure le succès des plus modestes réformes. Quel était donc le but de cet article? De résoudre la question? Non, mais de la poser. Le champ est ouvert aux discussions contradictoires. Les propositions que j'ai suggérées en provoqueront d'autres, et de ce débat surgira sans doute quelque résultat pratique. J'espère que les directeurs d'école normale sous les yeux desquels tomberont ces lignes voudront bien apporter ici le concours de leurs lumières et de leur expérience. Beaucoup mieux que nous ils connaissent leur personnel et les ressources dont il dispose: ils savent exactement ce qu'on en peut attendre et ce qu'il serait chimérique d'en vouloir exiger. A eux donc de nous proposer des solutions ou de nous adresser des objections les unes seront accueillies avec reconnaissance et les autres discutées avec impartialité.

:

G. STREHLY,

Membre de la Commission de gymnastique au Ministère.

LE BASSIN DE LA SEINE

(conseils a de jeunes professeurs de l'école NORMALE)

Remarquez que vous avez affaire à des élèves d'école normale, qui, admis après examen, sont censés avoir déjà des notions du sujet que vous devez traiter.

De plus, ces élèves ont entre les mains des atlas, des livres, où ils trouveront plus d'éléments de nomenclature que vous ne pourrez jamais leur en fournir en une heure. Par conséquent, ne visez pas à tout dire. Vous n'y parviendrez pas; et alors même que vous y parviendriez, vous n'aboutiriez qu'à faire une leçon confuse et trop chargée.

Vous devez viser à dire en une heure l'essentiel, et rien que l'essentiel. Or, l'essentiel, dans une leçon de ce genre, ce sont les aspects généraux, que l'élève est toujours porté à négliger, pour s'attacher aux détails (abus de la mémoire, substituée à la réflexion).

Avant tout, ayez sur le mur une grande carte murale, qui soit bonne. Non pas une mauvaise carte comme celles d'il y a vingt ans, mais une carte donnant le vrai relief du terrain.

Soyez debout devant la carte, une baguette à la main, et ne dites rien que vous ne puissiez montrer à l'instant.

Exigez que chacun de vos élèves ait un atlas ouvert devant lui, vérifie sur cet atlas ce que vous lui aurez montré sur la carte murale.

Veillez à ce que les élèves prennent des notes, mais ne prennent pas trop de notes. Un élève qui vise à sténographier les paroles du maître ne sait pas prendre des notes. Inutile, par exemple, de noter ce que la carte et l'atlas disent clairement ; que la Seine passe à Troyes, à Montereau, à Melun, etc. L'élève doit noter 1° les idées générales, d'un mot, d'un seul mot, qui suffira à les lui rappeler, quand, rentré à l'étude, il essaiera de reconstruire la leçon dans sa mémoire; 2° les faits statistiques que la carte n'exprime pas.

Que ces notes, quand l'élève est rentré à l'étude, soient mises

au net rapidement, sur un cahier spécial, où les notes recopiées alterneront avec les croquis (1).

Vérifiez souvent les cahiers, pour vous assurer que le travail de l'étude, contre-partie et complément du travail de la classe, se fait avec exactitude et d'une manière intelligente.

De plus, l'examen des cahiers contribuera, plus que toute chose, à vous faire connaître vos élèves, à vous montrer s'ils ont bien suivi la leçon; s'ils l'ont bien comprise, et comment chacun d'eux l'a comprise; c'est une sorte d'interrogation muette. Dans la façon même dont les notes auront été prises et transcrites, vous pourrez remarquer la rapide compréhension de l'un, la minutie puérile de l'autre, la négligence de celui-ci, etc.

Enfin rappelez-vous que ce qui fait l'action du maître sur ses élèves, c'est la méthode, l'art d'enseigner. S'il ne s'agissait que d'exposer devant les élèves un certain nombre de faits ou d'idées, invariables comme le catéchisme ou la théorie militaire, puis de les leur faire réciter, il n'y aurait pas besoin de maître; le premier surveillant venu serait à la hauteur de cette tâche. Mais il n'en est pas ainsi. L'art d'enseigner existe. De là, la nécessité d'un maître. Or, si les règles de l'art d'enseigner sont les mêmes pour tous les maîtres, s'il n'y a et ne doit y avoir qu'une méthode générale, il faut admettre néanmoins que cette méthode générale doit se plier dans une certaine mesure au talent particulier de chacun d'eux; chacun, dans le cadre de la méthode commune, se fera, selon son tempérament intellectuel, sa méthode particulière; ce sera sa part d'originalité et c'est précisément par là qu'il aura prise sur ses élèves, qu'il exercera sur eux une action sérieuse. Mais plus le maître tiendra à son plan, à son système, à sa méthode d'enseignement, plus il devra veiller à ce que cette méthode règne, non pas seulement dans la classe, mais encore dans l'étude, à ce que les élèves s'y astreignent dans leur travail personnel; le maître ne devra pas seulement marquer sa leçon à l'empreinte de sa méthode, il devra en suivre l'application et les effets jusqu'au bout. Par conséquent, nécessité absolue de vérifier souvent les cahiers.

(1) On recommande généralement à l'élève-maître de se borner à relire ses notes, en les rectifiant et en les complétant. Et, de fait, il n'a guère le temps de faire plus; mais, si le temps ne manquait pas, ce serait un excellent exercice que de mettre rapidement des notes au net.

Je me suis laissé aller à exposer les règles générales d'une leçon de géographie. Après cette digression, revenons à notre sujet spécial, faire une leçon sur le bassin de la Seine.

-

1° Montrer ce bassin sur une carte générale; remarquer qu'il est presque entièrement compris entre le 48° et le 50° degré de latitude nord; qu'il aboutit à la Manche, à l'Océan; que sa direction générale est au nord-ouest; qu'il est entouré de faibles hauteurs, puisque la partie la plus élevée de sa ceinture, les monts du Morvan, dépasse à peine 900 mètres. De là, remarques générales sur le climat. Le 50° degré, qui touche aux sources de l'Oise, est voisin, en Asie, de l'embouchure du fleuve Amour, en Amérique, du Labrador, c'est-à-dire de la région des grandes glaces. Donc, douceur relative du climat séquanien.

2o Remarquer que c'est le plus petit des quatre grands bassins français (78,000 kilomètres carrés; la Garonne, 82,000; le Rhône, 98,000; la Loire, 116,000), mais le plus important; d'abord, parce qu'il est voisin des deux plus actives régions industrielles de l'Europe, la Belgique et l'Angleterre; ensuite par la disposition convergente de ses affluents autour d'un grand centre, où s'est élevé Paris.

3o Ceinture du bassin; nomenclature rapide, la baguette sur la carte entre les sources de l'Oise et de l'Aisne, les derniers rebords du plateau des Ardennes; entre l'Aisne et la Meuse, les collines de l'Argonne; entre la Marne et la Meuse, les hauteurs du Bassigny, prolongement du plateau de Langres; - du côté de la Saône, le plateau de Langres et les plateaux de la Côte-d'Or, brusquement inclinés sur la Saône, s'allongeant en pente douce au nord-ouest, seuil important, par où passent les grandes communications de la Manche et de la Méditerranée; puis, le massif du Morvan, le seul groupe vraiment montagneux de la région, se prolongeant au nord-ouest par les collines du Nivernais, auxquels succèdent, des sources du Loing aux sources du Loir, les plaines de la Beauce; là, pas de relief sensible entre la Seine et la Loire; large porte ouverte de Paris à Orléans, des plaines du nord-est à la plaine du centre; - puis les faibles collines du Perche, seul relief appréciable au nord-ouest du bassin.

Au nord, entre la Seine et les bassins de l'Escaut et de la Somme, rien, rien; de là, la multiplicité des canaux de commu

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