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relatives; c'est pourquoi elles demandent du génie. Devant Dieu qui, selon Platon, géométrise éternellement, tout est absolu. Pour nous, une science n'a point à rougir d'être sujette à la conjecture et à l'erreur. S'il fallait juger des sciences par leur positif, le boulanger serait bien au dessus de l'homme d'état ; ce qui est absurde. On trouvera cent anatomistes pour un médecin, cent maçons pour un architecte, cent hommes qui connaîtront parfaitement le positif de l'alphabet pour un qui concevra la philosophie de l'humanité, ou qui fera sortir de son sein des torrens de poésie. Mais, je vais trop loin. J'ai voulu seulement aujourd'hui vous montrer que le choléra n'a point vaincu la médecine; et que le mépris qu'on voudrait verser sur cette science, parce que Dieu a voulu nous envoyer une épreuve, devrait être renvoyé à quelques railleurs ignorans. Si mon but était de vous faire sentir tout ce qu'est et tout ce que peut cet art sublime, ma lettre deviendrait un volume.

HENRI GOURaud.

Rapport sur les cholériques admis à l'hôpital des Enfans, pendant le mois d'avril, adressé au conseil d'administration des hôpitaux;

Par MM. JADELOT, GUERSENT, BOUNEAU, BAUDELOCQUE, médecins, et BAFFOs, chirurgien de l'établissement.

L'apparition du choléra – morbus épidémique à l'hôpital des Enfans cut lieu quelques jours plus tard que dans les autres hôpitaux. Déjà la maladie sévissait avec fureur, déjà elle avait fait un grand nombre de victimes parmi les adultes, que les enfans n'en avaient pas encore été atteints.

Le premier exemple que nous observâmes se présenta chez une fille âgée de cinq ans, qui fut admise à l'hôpital le 31 mars vers trois heures après midi. Elle avait été prise subitement, à

quatre heures du matin, de vomissemens et de déjections alvines très-abondantes, qui persistèrent durant trois heures. L'aspect de la face et surtout l'état des yeux, la couleur violacée des membres et leur refroidissement, le retour des vomissemens chaque fois que l'on donnait à boire, firent bien naître l'idée de la nature du mal; mais comme l'en fant était sujette à des gastroentérites qui survenaient à l'occasion de circonstances, très-légères, on conserva du doute que la couleur, la consistance de la matière rendue par les vomissemens et par les selles, que la marche des accidens, ne tardèrent pas à dissiper. Cette malade succomba le 3 avril à midi.

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Il existait alors à l'hôpital d'autres cholériques. Le 2 avril, un garçon âgé de dix ans, entré à quatre heures un quart soir, avait cessé de vivre à onze heures. Le 3, un autre gar

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çon âgé de quinze ans, affecté du choléra à un haut degré d'intensité, fut admis à sept heures du matin; le 6, il était en pleine convalescence. Le 4 avril, le nombre des cholériques augmenta beaucoup. Jusqu'au 15 il s'en présenta chaque jour huit à dix ou onze. A partir de cette époque, on n'en reçut plus que trois ou quatre par jour. Le 25 avril, 95 cholériques avaient été traités dans l'hôpital, savoir : 50 garçons et 45 filles. A ce nombre il faut ajouter six filles tombées malades dans la maison, ce qu élève le chiffre des cholériques à 101, 50 garçons et 51 filles.

Le 4 avril, les médecins et le chirurgien de l'hôpital se réunirent pour désigner les salles où les malades seraient placés, et assurer l'exécution de différentes mesures relatives, au service médical ordonnées par l'administration.

La disposition des localités permit d'isoler les garçons. L'isolement fut moins complet pour les filles. L'inutilité de cette mesure ne tarda pas à être reconnue, et nous n'eûmes à apporter que peu de changemens au service ordinaire de la maison.

Il fut arrêté que les garçons seraient confiés aux soins de MM. Jadelot et Baudelocque; que les filles seraient visitées par MM. Guersent et Bouneau ; que de deux heures en deux heures, de nous se rendrait à l'hôpital pour examiner les malades

un

Mai 1851. Tome II.

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qui seraient entrés et leur prescrire les premiers secours. Nous acceptâmes avec empressement l'offre que nous fit M. Baffos de joindre ses soins aux nôtres. Plusieurs lits furent mis à sa dispo sition. Le nombre peu considérable d'enfans cholériques ne permit pas d'utiliser le zèle et les lumières de M. Baffos.

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Conformément aux désirs de l'administration, les médecins et le chirurgien de l'hôpital se réunirent trois fois par semaine pour conférer sur la maladie régnante.

Avant de rendre compte des moyens qu'ils ont mis en usage, des résultats qu'ils ont obtenus, ils croient devoir présenter quelques considérations sur plusieurs points de l'histoire de la maladie, et sur les principes qui ont dirigé leur conduite dans le traitement des malades.

L'âge des enfans cholériques admis à l'hôpital varie depuis onze mois jusqu'à seize ans. Trente-deux malades n'avaient pas atteint leur cinquième année; trente-sept étaient âgés de cinq à 'dix ans ; l'âge de vingt-huit autres s'étendait de dix à seize ans. Un fait remarquable, c'est que le nombre des garçons âgés d'un à cinq ans est preque double de celui des filles (21 garçons, it filles). L'inverse a lieu pour la période de cinq à dix ans : il s'est présenté 12 garçons seulement et 25 filles. Une différence beaucoup moins grande s'observe pour l'âge de dix à seize ans. Le nombre des garçons l'emporte seulement de quatre sur celui des filles. Dans les remarques relatives à l'âge des malades, nous ne ́tenons compte que des enfans qui ont été admis dans les salles de l'hôpital. Si nous voulions y joindre ceux qui se sont présentés à la consultation et que les parens ont désiré soigner chez eux, nous verrions que le choléra peut se développer à une époque beaucoup rapprochée de la naissance. On nous a apporté des enfans évidemment cholériques âgés seulement de deux mois, de cinq mois, de neuf mois. A cette influence de l'âge et du sexe sur l'apparition du choléra, nous ajouterons plus loin celle des mêmes circonstances sur sa terminaison.

Chez beaucoup d'enfans, l'invasion de la maladie a été pré"cédée de troubles, de dérangemens dans les digestions et spécia

lement de diarrhée. Ce n'est qu'après plusieurs heures et quel→ quefois plusieurs jours de l'existence de la diarrhée, que des ac cidens graves se sont manifestés. Cela a été à peu près constant chez les très-jeunes enfans pendant tout le cours de l'épidémie, et chez tous vers la fin. Il en est plusieurs qui, dans la première quinzaine, ont été pris instantanément du choléra au milieu d'une belle santé et pendant le sommeil.

Le cholera-morbus a fréquemment débuté par des vomissemens abondans et des déjections alvines copieuses. La matière des vomissemens a présenté souvent l'apparence d'une eau légè➡ rement trouble au milieu de laquelle nageaient des petits flocons blanchâtres; quelquefois elle n'était autre que le liquide ingéré dans lequel on apercevait aussi de petits corps blancs ; d'autres fois nous l'avons trouvé colorée en jaune ou en vert par la bile. La matière des déjections alvines avait une apparence plus constante : c'était, comme chez les adultes, une espèce de purée, de crême de riz, d'un blanc grisâtre. Quelquefois cependant elle ressemblait à la sérosité troublé ou bien elle avait une teinte verdâtre. Plusieurs enfans ont rendu par la bouche ou par l'anus des vers lombries morts. Il est arrivé souvent les vomissemens que et la diarrhée, après avoir été três-fréquens au début de la maladie, se sont éloignés pour ne réparaître qu'à de longs intervalles et même ne plus revenir. Lorsque ces phénomènes ont persisté jusqu'à la mort, très-rarement ils ont amené la perte d'une quantité de matière suffisante pour épuiser promptement les forces. Rärement, sous le rapport de cet épuisement des forces, ont-ils nécessité l'emploi de médications particulières. Nous n'avons observé chez aucun enfant ces flux prodigieux si fréquens chez les adultes, et durant lesquels il survient un anéantissement rapide. Il ne nous a point paru que l'on pût tirer des indications certaines pour le pronostic du changement de couleur ou de consistance des matières rendues.

Le refroidissement du corps a souvent été porté très-loin; il s'accompagnait de la couleur violacée, de la faiblesse et même de la cessation des battemens du pouls. Il importe de faire connaître que nous n'avons considéré comme véritablement atteints du

choléra épidémique, que les enfans qui nous ont présenté ce phénomène.

Le refroidissement était surtout frappant à la langue et à la surface interne des lèvres. Nous avons toujours observé que ces parties étaient les dernières à se réchauffer; on les trouvait encore froides, lorsque déjà la peau avait repris de la chaleur, lorsque les battemens du pouls avaient reparu ou étaient devenus beaucoup plus forts. Le refroidissement de la langue et des lèvres, précède-t-il celui des membres et de la face? c'est ce dont il nous a été impossible de nous assurer.

On a regardé comme appartenant exclusivement au choléra cet état si remarquable de la langue et des lèvres. L'un de nous possède deux faits qui tendent à prouver qu'une pareille opinion est trop exclusive, à moins d'admettre cependant que, dès le mois de janvier, l'influence épidémique qui a donné lieu au choléra existait à Paris. Dans le courant de ce mois, et à peu de jours d'intervalle, M. Baudelocque a observé et fait remarquer aux élèves le froid de la langue, des gencives et de la surface interne des lèvres chez deux enfans affectés de variole confluente avec pneumonie double. La peau n'était froide nulle part. Les enfans répondaient bien aux questions qu'on leur adressait. Ils sont morts cinq à six heures après la visite, sans présenter ni vomissemens ni diarrhée. Chez ces deux enfans, l'air expiré était froid: il l'est également chez les cholériques; il cesse de l'être avant que la langue et les lèvres aient repris leur température ordinaire.

Au milieu du froid le plus vif, les enfans, au lieu d'être engourdis, avaient une grande agitation : ils se plaignaient de ressentir une vive chaleur; ils étaient tourmentés par une soif que rien ne pouvait étancher; ils désiraient avidement des boissons froides, A une autre période de la maladie, lorsque la peau n'épas encore refroidie, ou avait été réchauffée, nous avons vu des enfans se plaindre d'éprouver du froid, surtout des frissons dans le dos.

tait

L'état de la circulation artérielle a présenté quelques particu

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