attaché à bien montrer pour quelles idées il avait vécu, et quelle harmonie parfaite avait régné entre ses actes privés et publics et les théories défendues dans ses livres. En tout temps on trouve Tocqueville fidèle au témoignage qu'il se rendait à lui-même lorsque, déclarant qu'il n'avait jamais été l'esclave d'un parti, il disait : « Je n'ai qu'une passion: c'est l'amour de la dignité humaine. >> En terminant, M. Delerot a rappelé les principes qui peuvent être considérés comme le testament légué par Tocqueville à nos générations contemporaines, principes qui se résument dans cette pensée, dont l'oubli ou le dédain nous serait si douloureusement fatal: « Un peuple sans moralité et sans religion ne sera jamais libre. » LA VISITE DU PRINTEMPS PAR M. Ed. COURTEVILLE, MEMBRE TITULAIRE A L. B. Je suis le frais Printemps, recevez ma visite. J'ai toujours à ma suite une attrayante escorte, Robustes sont mes fils et d'humeur différente : L'aîné, Mars, est bruyant, fantasque et querelleur; Avril est jovial, a la verve plaisante, Et Mai, leur jeune frère, est poète et rêveur. D'un beau vert céladon j'ai chargé ma palette; La séve, à mon appel, escalade les cimes Le bourgeon fait craquer sa robe trop étroite; Et les blancs nénuphars que la terre convoite Les grappes du lilas sur les hautes murailles Puis on voit les grands lis, à la taille élégante, Tout se meut, tout fermente et tout se régénère; Les nids, les nids féconds, espoir de ma saison, Cachent leur doux trésor de calme et de mystère Sous les rameaux touffus et sur le vert gazon. Qui donc voudra vanter les mines de Golconde, S'il a vu ma rosée et ses brillants fleurons ? Des perles? Je pourrais en consteller le monde ; Vos sultanes n'ont rien près de mes moucherons. Je ne suis pas méchant, mais je suis fantaisiste, Oh! que je suis heureux lorsque sous ma ramée J'entends les gros soupirs et les serments d'un jour! Quand du premier aveu la parole embaumée Fredonne ce vieil air qui s'appelle : l'amour ! Je répète aux échos : je suis la Poésie ; Des bruits d'ailes, des fleurs et des éclosions? Mais, tout finit, et moi, la saison sans pareille, Vous, mortels fortunés, qui vous voyez revivre UNE JOURNÉE DE LOUIS XIV PAR M. A. TAPHANEL, MEMBRE TITULAIRE MESDAMES, MESSIEURS, Il est de mode aujourd'hui, dans un certain monde, de parler légèrement et avec impertinence de Louis XIV, du Roi-Soleil, comme on affecte de l'appeler, de ce prince intelligent, qui n'avait pas lu Voltaire sans doute, mais avec qui Boileau pouvait discuter des goûts, avec qui le Parlement au besoin eût pu discuter des couleurs. Sa supériorité un peu hautaine lui a valu, par manière de représailles, les dédains du vulgaire et la haine des infiniments petits. Mais la France ne saurait perdre entièrement le souvenir de celui qui lui avait donné l'Alsace; et Versailles ne peut pas oublier son fondateur : ce serait faire acte de maladresse, plus encore que d'ingratitude. Lorsqu'on a de telles obligations à un homme (et je ne rappelle ici qu'une faible partie de ses services), il est au moins de bon goût de ne le point insulter, de ne pas dire, par exemple, comme Michelet, qu'il avait une tête de porc, ou, comme tel autre écrivain dont je tairai le nom, par égard pour son talent et pour l'emploi qu'il occupe: « C'était un pître couronné. » Cela dit, vous comprendrez, Messieurs, avec quel empressement j'ai obéi à notre honorable président, |