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» Un jour, un jour viendra qu'en tous lieux triomphans, » A la superbe Argos, à la fière Mycènes,

» Le sang d'Assaracus imposera des chaînes ;

» Et les fils des vaincus, tout puissans à leur tour,
» Aux enfans des vainqueurs commanderont un jour.
» Ce héros qu'aux humains promet la destinée,
» Jules, prendra son nom du fils de votre Énée ;
» Il domptera la terre ; il s'ouvrira les cieux;

» Et vous-même, à la table où sont assis les dieux,
» Le recevrez vainqueur des peuples de l'aurore.

» Sous son astre brillant, quels beaux jours vont éclore ! » Du métal le plus pur ses jours seront filés.

» Je vois la foi, les mœurs, et les arts rappelés; >> De cent verroux d'airain les robustes barrières » Refermeront de Mars les portes meurtrières; » La Discorde au-dedans, fille affreuse d'enfer, » Hideuse, y rugira sous cent cables de fer, » Et, sur l'amas rouillé de lances inhumaines, >> De sa bouche sanglante en vain mordra ses chaines. » Ainsi dit Jupiter; mais il craint que Didon,

Ignorant les destins des enfans d'Ilion,

Ne leur ferme les murs de sa cité nouvelle :

Il lui députe alors son messager fidèle.

Le dieu, d'un vol léger, fend les vagues des airs,

Et bientôt de l'Afrique il atteint les déserts.
Un facile succès couronne son message:

Il parle, il adoucit la superbe Carthage,
De sa puissante reine apprivoise l'orgueil,
Et les Troyens déjà sont sûrs d'un doux accueil.
Cependant du héros, tandis que tout sommeille,

Mille soins inquiets ont prolongé la veille:
Le jour naissant à peine a blanchi les coteaux,

Il sort, va visiter ces rivages nouveaux.

Quærere constituit, sociisque exacta referre.

Classem in convexo nemorum, sub rupe cavatâ, Arboribus clausam circum atque horrentibus umbris, Occulit ipse uno graditur comitatus Achate,

:

Bina manu lato crispans hastilia ferro.

Cui mater mediâ sese tulit obvia silvâ,

Virginis os habitumque gerens, et virginis arma
Spartanæ; vel qualis equos Threïssa fatigat
Harpalyce, volucremque fugâ prævertitur Eurum.
Namque humeris de more habilem suspenderat arcum
Venatrix, dederatque comam diffundere ventis;
Nuda genu, nodoque sinus collecta fluentes.

Ac prior: Heus, inquit, juvenes, monstrate mearum
Vidistis si quam hîc errantem forte sororum,
Succinctam pharetrâ et maculosæ tegmine lyncis,
Aut spumantis apri cursum clamore prementem.
Sic Venus. Et Veneris contra sic filius orsus :
Nulla tuarum audita mihi neque visa sororum,
O, quam te memorem, virgo! namque haud tibi vultus
Mortalis, nec vox hominem sonat; o dea certe;
An Phœbi soror? An Nympharum sanguinis una ?
Sis felix, nostrumque leves, quæcumque, laborem;
Et quo sub cœlo tandem, quibus orbis in oris
Jactemur, doceas: ignari hominumque locorumque
Erramus, vento huc vastis et fluctibus acti.
Multa tibi ante aras nostrâ cadet hostia dextrâ,

Sont-ils peuplés d'humains, ou de monstres sauvages?
A l'abri des rochers, et sous de noirs ombrages,
Il laisse ses vaisseaux, et, deux traits à la main,
Suivi du seul Achate, il se fraie un chemin.
Voilà qu'au fond d'un bois se présente sa mère :
Son air, son vêtement, sa démarche légère,
D'une vierge de Sparte offrent tous les dehors;
Ou telle, aux pieds d'Hémus, l'Hèbre voit sur ses bords
L'Ainazone, animant les coursiers qu'elle dresse,
Voler, et de ses flots devancer la vitesse.
Pareil est son habit, pareil est son carquois;
Sa flèche semble attendre un habitant des bois;
Un souple brodequin compose sa chaussure;
Au-dessus du genou, les nœuds de sa ceinture
De ses légers habits serrent les plis mouvans,
Et ses cheveux épars flottent au gré des vents.
La première elle approche : « Une de mes compagnes,
» Leur dit-elle, avec moi parcourait ces campagnes;
» Je ne vois plus ses pas, je n'entends plus sa voix.
>> Sur une peau de lynx elle porte un carquois;
» Peut-être en ce moment, par sa vive poursuite,
» D'un sanglier fougueux elle presse la fuite.

» Si le hasard l'a fait apparaître à vos yeux,
» O jeunes voyageurs! Dites-moi dans quels lieux
» Je puis la retrouver. « Énée, à la déesse,

Répond en peu

de mots : « La jeune chasseresse

» Que vous nous dépeignez, nous n'avons, dans ces bois, » Ni rencontré ses pas, ni reconnu sa voix.

» O vous! Mais de quel nom faut-il qu'on vous appelle ?

» Cet air ni cette voix ne sont d'une mortelle :

» Oui, cet accent céleste, et cette majesté, > Tout annonce dans vous une divinité,

» Une nymphe des bois, ou Diane elle-même, > Une sœur de Diane. O déité suprême!

Tum Venus: Haud equidem tali me dignor honore : Virginibus Tyriis mos est gestare pharetram, Purpureoque alte suras vincire cothurno. Punica regna vides, Tyrios, et Agenoris urbem; Sed fines Libyci, genus intractabile bello. Imperium Dido Tyriâ regit urbe profecta, Germanum fugiens : longa est injuria, longæ Ambages; sed summa sequar fastigia rerum.

Huic conjux Sychæus erat, ditissimus agri
Phoenicum, et magno miseræ dilectus amore :
Cui pater intactam dederat primisque jugârat
Ominibus. Sed regna Tyri germanus habebat
Pygmalion, scelere ante alios immanior omnes.
Quos inter medius venit furor: ille Sychæum
Impius ante aras, atque auri cæcus amore,
Clam ferro incautum superat, securus amorum
Germanæ; factumque diu celavit; et ægram,
Multa malus simulans, vanâ spe lusit amantem.
Ipsa sed in somnis inhumati venit imago
Conjugis, ora modis attollens pallida miris :
Crudeles aras trajectaque pectora ferro

Nudavit, cæcumque domûs scelus omne retexit.

› De deux infortunés daignez plaindre le sort!
» Un orage cruel nous jeta sur ce bord;

» Ici nous ignorons dans quel climat nous sommes;
>> Ici nous ignorons et les lieux et les hommes:
> Des honneurs solennels vous paîront vos bienfaits >>

« Ces honneurs, dit Vénus, pour moi ne sont pas faits. » Cet habit, ce carquois, cet arc, cette chaussure, » Sont des filles de Tyr l'ordinaire parure.

» De la vaste cité qui frappe vos regards,
» Les enfans d'Agénor ont bâti les remparts;
» Ces champs sont la Libye; une race guerrière
>> Contre ses ennemis en défend la frontière.
» La reine de ces lieux est la belle Didon;
» Elle reçut le jour dans la riche Sidon;
» Mais, d'un frère cruel fuyant la barbarie,

» Son courage en ces lieux s'est fait une patrie.
» L'histoire de ses maux voudrait un long discours;
» Je vais, en peu de mots, vous en tracer le cours.
« Par les nœuds de l'hymen, à l'opulent Sichée,
>> Plus encor par l'amour, Didon fut attachée.
» L'hymen l'unit à lui dès ses plus jeunes ans ;

» Mais son barbare frère, exemple des tyrans,

» Pygmalion, obtint la grandeur souveraine.

» Bientôt s'allume entr'eux le flambeau de la haine.

> Insatiable d'or, ce monstre furieux,

» Sans égard pour sa sœur, sans respect pour les dieux,

» Dans le temple en secret immole la victime;

>> Et toutefois long-temps il sut cacher son crime,
» Et, d'une sœur crédule amusant la douleur,

» Long-temps d'un faux espoir il entretint son cœur.
» Mais bientôt, d'un époux privé de sépulture,
» Le spectre s'élevant du sein de l'ombre obscure,
» Triste, pâle et sanglant, apparut à ses yeux,

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