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affectée de la même monstruosité, a lui-même donné un produit exempt de toute anomalie.

Ainsi les faits, il est vrai peu nombreux, que possède la science, s'accordent pleinement avec les données théoriques, pour m'autoriser à considérer la transmission héréditaire des monstruosités composées, comme une circonstance, sinon complétement impossible (1), au moins excessivement rare et tout exceptionnelle.

SV. Des circonstances de la mort chez les étres anomaux.

Les circonstances physiologiques de la mort sont trèsdifférentes, suivant qu'on les étudie chez les monstres viables, ou chez ceux auxquels les anomalies mêmes de leur organisation rendent la vie impossible.

Les circonstances principales et les causes de la mort, ne sont autres chez ceux-ci que chez un fœtus normal sorti très-prématurément du sein de sa mère. Enlevé tout à coup à la vie intra-utérine, seule compatible avec la délicatesse de ses organes inachevés; jeté dans le monde extérieur, et obligé désormais de se suffire à lui-même, un tel fœtus est voué à une mort prompte et nécessaire. Et cependant il n'est pas malade; mais l'harmonie, condition première de toute vie, n'existe pas entre l'état de ses viscères, de ses poumons, de sa peau, et la nature des agens physiques et chimiques avec lesquels ils sont en rapport. Il en est exactement de même des anencéphales, des acéphales, des rhinocéphales, des symèles et de tous ces êtres anomaux qui naissent sans vie, ou dont l'existence éphémère n'a pour ainsi

(1) Il est évident que l'un des individus composant un monstre double, pourrait donner naissance à un autre monstre double, comme le fait quelquefois un être normal: seulement ce serait, pour l'un comme pour l'autre, non la règle, mais l'exception.

dire que deux instans, celui de la naissance et celui de la mort. Arrêtés dans le cours de leur développement, encore embryons ou fœtus imparfaits dans le septième, le huitième, le neuvième mois même de la gestation, ils sont viables seulement pour la vie intra-utérine (1); et le jour où ils sont soumis à l'action pour eux inharmonique du monde extérieur, ces êtres, jusqu'alors robustes, et, comme l'atteste l'état d'embonpoint dans lequel ils naissent presque tous, jouissant jusqu'alors de la plénitude de la santé, commencent à souffrir, et bientôt s'éteignent.

Si au contraire un monstre est né viable, si son organisation, d'abord coordonnée avec les circonstances de la vie intra-utérine, peut encore s'harmoniser avec celles de la vie extérieure, il entre, mais non complétement, dans les conditions des êtres normaux. Sa mort sera l'effet des mêmes causes qui nous menacent tous; mais de ces causes modifiées dans leur action par l'anomalie dont l'influence pourra d'ailleurs n'être que très-faible et à peine appréciable, Il en sera ainsi surtout des ectroméliens, ceux de tous les monstres qui s'écartent le moins du type normal. Dans les parasitaires, si l'on excepte les monstres par inclusion, les causes pathologiques conserveront encore à peu près leur puissance et leur mode ordinaire d'action, en raison du peu d'influence du sujet accessoire sur le principal. Mais il en sera tout autrement des autositaires, de ceux surtout dont l'organisation est presque entièrement double ou au moins très-complexe; et ici l'influence de la conformation anomale de l'être sur ses lésions pathologiques, apparaîtra d'une manière très-manifeste.

(1) Cette remarque a déjà été faite par mon père. J'ai cité ailleurs (tome I, p. 118) un passage de ses ouvrages où il l'a présentéc avec beaucoup de précision.

Lorsque, chez un monstre double, un des sujets composans vient à être atteint d'une grave maladie, la santé de l'autre, comme je l'ai dit, est bientôt troublée aussi, mais d'une manière moins grave; en sorte qu'au bout de quelque temps, les deux jumeaux sont malades, l'un plus, l'autre moins. Mais là ne se borne pas l'influence qu'exercent l'une sur l'autre ces deux vies associées et pour ainsi dire solidaires. Le plus malade des deux sujets continue à agir sur l'autre; les liens vasculaires et nerveux qui les unissent ne permettent pas que l'un marche à la mort sans y traîner après lui son frère; et si le premier succombe, ou même dès le commencement de son agonie, le second, dont l'état n'avait encore présenté que des symptômes peu alarmans, parfois même sans aucune gravité, expire tout à coup, ou tombe dans une faiblesse que la mort termine bientôt.

Cette influence funeste de l'un des sujets composans sur l'autre, facilement explicable par le mélange de leurs sangs et par les communications nerveuses qui existent entre tous deux, n'est attestée que d'une manière trop positive par l'observation (1), et il serait superflu d'insister sur elle pour la démontrer. Mais ces relations physiologiques sontelles les seules à signaler? Le moins malade des deux frères n'agit-il pas sur le plus malade, en même temps que celui-ci sur lui-même, mais en sens inverse? En apportant continuellement dans les organes communs, en versant dans le torrent de deux circulations qui communiquent entre elles, des matériaux élaborés par des organes sains ou légèrement affectés, quand ceux de son frère sont déjà gravement altérés; en préparant même, dans quelques cas, dans son

(1) Consultez l'histoire spéciale des divers monstres doubles, morts dans l'enfance ou même dans l'âge adulte, et notamment de ceux qui sont devenus si célèbres sous les noms d'Hélène-Judith et de RitaCristina. Voyez plus haut haut, p. 50 et p. 166.

estomac et dans son duodénum propres, un chyle qui parvient ensuite dans une cavité commune, n'exerce-t-il pas sur son frère une influence favorable, et ne tend-il pas à entraver, à diminuer au moins la puissance des causes pathologiques qui agissent sur celui-ci ? Les observations que possède la science, sont jusqu'à présent en trop petit nombre et trop peu précises, pour que leur comparaison puisse démontrer directement ces phénomènes, par leur nature même, si obscurs et si difficilement appréciables; mais les seules données de la théorie suffisent pour en rendre l'existence presque incontestable. Comment, en effet, l'échange de matériaux que font entre eux les deux individus composans, en devenant funeste à celui qui reçoit dans ses organes sains des élémens viciés ou imparfaitement élaborés, pourrait-il n'être pas profitable à celui qui reçoit des matériaux sains et bien préparés dans ses organesin apables de les élaborer par eux-mêmes?

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DES CONDITIONs sexuelles, et des CIRCONSTANCES PRINCIPALES DE L'ORGANISATION CHEZ LES ÊTRES ANOMAux.

Après avoir considéré dans le chapitre précédent les êtres anomaux et principalement les monstres dans les circonstances de leur naissance, de leur vie, de leur reproduction et de leur mort, je dois, dans celui-ci, pénétrant pour ainsi dire dans le cœur de mon sujet, les étudier en euxmêmes et relativement aux conditions générales de leur organisation. Ces mêmes cas différentiels dont j'ai dévoilé la longue série dans les deux parties précédentes, mais en ne les considérant encore que sous un point de vue spécial ou

tout au plus incomplétement général; ces cas dont le nombre et la variété sont immenses et peuvent sembler infinis, je dois maintenant les rapprocher, les comparer dans leur ensemble, afin d'arriver, s'il se peut, à la détermination des limites entre lesquelles se renferment les anomalies; à la connaissance de leurs règles et de leurs lois; à des notions précises sur leur nature; enfin à l'appréciation des rapports et des différences qui existent entre les modifications anomales des espèces zoologiques, les altérations morbides et vraiment pathologiques, et les déviations tératologiques si souvent confondues avec celles-ci. Toutes ces questions, sujets de ce chapitre et des deux suivans, offrent en elles-mêmes de graves difficultés : heureusement la solution de la plupart d'entre elles se trouve préparée et presque donnée implicitement dans les deux parties précédentes; et quelquefois il me suffira, pour arriver à des vérités d'un ordre très-général, de réunir et de combiner plusieurs généralités d'un ordre secondaire dont la démonstration a été donnée à l'avance.

SI. Du sexe des êtres anomaux et principalement des

monstres.

L'auteur d'un système singulier, mais devenu célèbre, sur la procréation des sexes à volonté, Millot, a remarqué le premier (1) que les sujets composant un monstre double,

(1) Voyez son Art de procréer les sexes à volonté, 4me édition, p. 273. - Il n'est pas hors de propos de remarquer que des idées plus ou moins analogues à celles que Millot a soutenues, avaient été émises long-temps avant lui par divers auteurs. Voyez, par exemple, CARDAN, De subtilitate, liv. 12, et LEGENDRE, Traité de l'opinion, 3me édit., t. VI, p. 414, d'après plusieurs anteurs anciens. Cette remarque est sans 25

III.

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