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cations qui s'étoient faites à Hyeres. Il nous reste à examiner les progrès de cette culture au-dehors de l'Europe.

ARTICLE VIII.

Le Citrus exotique en Amérique. Naturalisé, après la découverte, par les Européens.-Preuves de ce fait.

Nulle plante, peut-être, ne s'est jamais répandue avec autant de rapidité et de succès que les orangers. Après s'être propagés en peu de temps dans les pays tempérés de l'Europe, ils sont passés dans toutes les contrées où les Européens ont porté leur commerce et leurs conquêtes.

Les Portugais les avoient naturalisés à Madere, aux Canaries, et dans toutes leurs colonies, le long de la mer Atlantique; les Espagnols les porterent bientôt en Amérique, où en peu de temps on vit ces pays nouveaux, qui ne connoissoient aucun des arbres de l'ancien continent, présenter de tous côtés des forêts d'orangers.

Il est surprenant que ce vaste hémisphere, qui réunit dans son étendue presque toutes les latitudes du globe, n'ait pas reçu de la nature un arbre aussi analogue à son sol, et qui a trouvé

dans son climat chaud et humide autant de dispositions à la riche végétation dont il est doué.

Si les relations originales des premiers Espagnols qui ont découvert ces régions, et le témoignage des historiens contemporains, ne nous eussent assuré que c'est de l'Europe que l'Amérique a reçu ces beaux arbres, on les y croiroit certainement indigenes. Mais ce fait, rapporté d'une manière très positive par tous les historiens contemporains, est encore appuyé de tant de données, que l'on ne peut le révoquer en doute sans renoncer aux principes de la juste critique.

On n'a qu'à parcourir les relations des premiers conquérants et des historiens espagnols, elles ne parlent jamais des orangers, quoiqu'elles donnent souvent des descriptions très brillantes des jardins délicieux du Mexique, et principalement de ceux de Montezuma. Le même silence, par rapport à cet arbre, se remarque dans les relations du Pérou, du Brésil, et des autres pays méridionaux de l'Amérique.

Maintenant, à la vérité, l'oranger y est tellement naturalisé, que l'on en voit de tous côtés des forêts; mais ces forêts ne se trouvent que dans les lieux voisins des habitations, et ces arbres n'annoncent pas la haute antiquité qui caractérise ceux du Nouveau-Monde : ils sont en général d'une médiocre grosseur, quoique leur végétation y soit

assez vigoureuse pour étouffer les anciens végétaux qui se perdent par-tout où prennent les orangers.

Cette seule observation a convaincu un voyageur éclairé que l'oranger n'existe au Paraguai et dans la Plata que depuis la découverte qu'on en a faite (1).

Mais il n'est pas nécessaire de recourir à des conjectures, lorsqu'on peut s'appuyer d'autorités irrécusables. Je ne citerai que l'Histoire naturelle des Indes d'Acosta, auteur contemporain des premières conquêtes des Européens, l'Histoire du Pérou par Garcilasso de la Vega, et l'Histoire naturelle du Brésil par Pison, dont l'autorité est du plus grand poids. Voici comment s'exprime le premier: « Parmi les arbres que les Européens ont << apportés en Amérique, il n'y en a pas qui y aient pris aussi rapidement que les orangers, les li« moniers, les citroniers, et autres arbres de ce <«< genre. Il y a maintenant, dans certains pays, « des bois d'orangers. Surpris de ce fait, j'ai de<< mandé aux habitants d'une isle qui est-ce qui <<< avoit rempli les champs d'une si grande quan«< tité de ces arbres : ils me répondirent que cela << étoit dû au hasard, puisque les fruits tombés des

«

(1) Voy. le Voyage dans l'Amérique méridionale, par D. Félix Azara, tom. 1, p. 106.

<< premiers arbres qu'on y avoit plantés, avoient « donné naissance à une infinité d'autres arbres; << que c'étoit ainsi, et par le moyen des pluies qui << avoient transporté par-tout les fruits et les se<< mences, que s'étoient formés les bois touffus «< que l'on voit maintenant : cette réponse me pa<< rut très satisfaisante. On dit que cet arbre est «< celui qui a le plus prospéré dans l'Inde, où on « ne trouve pas de pays sans orangers, parceque «< cette terre est chaude et humide, ce qu'exige « la végétation de cet arbre. On n'en voit pas dans «<< les pays de montagnes, mais on y en porte des << pays plats et de la côte. Je n'ai goûté nulle part << une conserve d'oranges aussi délicieuse, que celle que l'on fait dans les isles. » (1).

Pison s'exprime de la même maniere en parlant du Brésil : « Je ne parlerai pas, dit-il, de tous «< ces végétaux dont on ne connoît pas encore les << vertus médicales, ou qui, transportés d'ailleurs «< dans ce pays, ont été assez décrits avant moi << par d'autres auteurs; tels sont, le citronier, le << limonier, l'oranger, le grenadier, le blé de Tur« quie, etc. » (2)

(1) Histoire naturelle et morale des Indes, écrite par le révérend P. Joseph d'Acosta, liv. 4, chap. 31.

(2) Missis... omnibus illis, quorum vel usus medicus adhuc latet, vel quæ huc aliunde illata et ab aliis satis superque ante

Garcilasso de la Vega en dit autant relativement au Pérou et au Chili; et cet écrivain, qui descendoit des Incas, et qui étoit né au Pérou peu après l'invasion des Espagnols, devoit connoître l'état de ce pays avant la conquête. Voici ses paroles :

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« Avant que les Espagnols conquissent le Pérou, « il est certain qu'on n'y voyoit, ni figues, ni gre<< nades, ni oranges, ni citrons aigres ou doux, ni poires, ni pommes, ni coins, ni pêches, ni alberges, ni abricots, ni aucune sorte de prunes de celles qui croissent en Espagne.... Mais on «< peut dire sans mentir que tous ces fruits, et plusieurs autres dont je ne me souviens pas, y « viennent aujourd'hui en si grande abondance, qu'on ne s'en soucie presque point, non plus << que des autres choses d'Espagne qui multiplient beaucoup plus dans ces contrées des Indes que « dans ce royaume. » (1)

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Des témoignages aussi positifs ne laissent plus aucun doute sur l'origine des orangers d'Amérique. Ce vaste hémisphere, dont le sol est si fertile, et où l'on trouve maintenant presque tous

me exposita, ut malus medica, citrus, punica, milium turcietc. GUILIELMI PISONIS Hist. nat. et medica (Brasilia), lib. 4, p. 107.

сит,

(1) Histoire des Incas, rois du Pérou, par l'Inca Garcilasso de la Vega, liv. 9, chap. 28.

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