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bles, et peuple de leurs ombres le terrain, les ruines ou les monuments, livrés à ma contemplation. Cette faculté d'évocation est d'autant plus lucide que la solitude est plus absolue. C'est pour cela que je ne redoute pas l'isolement, et que la promenade solitaire a pour moi un charme que bien des gens semblent n'avoir jamais compris.

A Rome, on ne peut faire un pas, sans rencontrer sur son chemin une foule de souvenirs : c'est comme un livre ouvert, dans lequel l'homme qui sait y lire exploite une mine féconde de plaisirs intellectuels. La mythologie, l'antiquité, la légende et le moyen-âge superposés, offrent à l'attention de celui qui fait promener son corps et son esprit une suite de tableaux sans cesse renouvelés. Mais pour offrir ces jouissances à son intelligence, il faut s'être préparé par l'étude au voyage de Rome, et ne pas partir avec l'intention d'y passer seulement une quinzaine de jours. L'archéologie romaine est fort difficile à élucider, et ce qui le prouve, c'est la dénomination fausse ou douteuse d'une partie de ses ruines. Les touristes, qui chargent leur mémoire de l'érudition des ciceroni, s'évitent, il est vrai, la peine des recherches; mais ils trébuchent à chaque pas dans des erreurs grossières.

Avant de commencer l'histoire de la défense de Rome, je vais décrire les murs, depuis la porte du Peuple jusqu'à la Salara; car ce fut de ce côté qu'eut lieu le principal effort du siége (1).

La porte du Peuple, appelée Flaminienne, jusqu'à la fin du XVe siècle, prit son nom actuel de l'église voisine Sainte-Marie-du-Peuple; - du temps de Bélisaire, elle était placée un peu plus haut, et, comme dit Procope, dans un lieu

(1) Ces études sur les murs de Rome ont été faites en 1850, et l'auteur ne pourrait affirmer que des changements n'aient pas modifié la disposition

des lieux.

péri dans les révolutions avec tous les autres ouvrages d'art dont cette ville a été le tombeau. Si les murailles du Campo Santo avaient été peintes à la cire comme l'ouvrage de Polignote, elles seraient encore aujourd'hui dans tout leur éclat.

Le Campo Santo, ainsi que le sanctuaire d'Assise, doit être regardé par les artistes érudits, comme renfermant les productions les plus utiles à l'art chrétien. Etudiés avec discernement par un artiste savant et sans système, les maitres de l'école primitive seront toujours pour lui de magnifiques modèles de haut style. Il trouvera dans leurs ouvrages, non seulement des expressions naïves et vraies, mais encore la noblesse et la grandeur unies à la simplicité.

HUMBOLDT A BERLIN

D'APRÈS DES RENSEIGNEMENTS PUISÉS DANS LA VIE DE HUMBOLDT

PAR BAYARD TAYLOR (EN ANGLAIS)

PAR

A. TUJA D'OLIVIER.

On a beaucoup écrit sur Humboldt depuis sa mort, et des savants dignes de lui succéder ont complété ses travaux scientifiques par de nouvelles découvertes. D'intrépides voyageurs, stimulés par l'exemple de leur illustre devancier, ont exploré les savanes de l'Amérique, d'autres ont visité, après lui, les steppes de la mer Caspienne, les déserts du centre de l'Asie, et les grandes chaines de montagnes de ce vaste continent. La nature a été étudiée sous toutes ses formes et l'homme, aux prises avec elle, tend chaque jour à lai dérober ses secrets les plus cachés.

Nous laisserons à de plus expérimentés la tâche difficile d'apprécier la part que le savant naturaliste a prise à cette grande œuvre, et nous nous bornerons à suivre Humboldt dans la vie privée.

Revenu dans sa patrie après de longs et périlleux voyages, il consacra les nombreuses années que le ciel lui accorda à

réunir, dans des ouvrages multipliés, ses observations sur les peuples, la formation de divers continents, leur faune et leur flore, qu'il considère, avec raison, comme une branche essentielle de la science géographique. Ces études auxquelles la vie d'un homme suffiraient à peine, Humboldt les a faites sans renoncer aux relations du monde. Le roi de Prusse dont il était le chambellan et le conseiller privé, avait fait de lui son hôte de tous les jours, et après avoir passé bien des heures à résoudre des problèmes ardus, le géologue, devenu homme de cour, allait s'entretenir avec Frédéric IV des grandes lois qui régissent le monde, et il trouvait encore le temps d'assister à des réunions savantes.

Ses connaissances universelles le firent rechercher de tout ce que l'Europe comptait d'hommes éminents. Humbold se prêta à toutes les exigences, à celles même de la curiosité, avec une complaisance qui n'eut de limites que ses forces.

Mais nous avons hâte de citer, avec M. Taylor, un trait de bienfaisance, qui fera juger de la bonté du cœur de cet homme, que l'on s'est plu à dénigrer.

Envoyé par son Souverain (1) en mission extraordinaire pour reconnaître le roi Louis-Philippe et le nouveau régime (le 7 septembre 1830), Humboldt rencontra à Paris, M. Agassiz, alors pauvre étudiant, aujourd'hui professeur distingué. « Je n'avais que vingt quatre ans, raconte le célèbre savant suisse, quand je me rendis à Paris avec des secours offerts par un ami ; j'étais sur le point d'abandonner mes études, faute de ressources pour les continuer, lorsque je rencontra le professeur Mitscherlich de passage à Paris; il me demanda. la cause de ma tristesse, je lui racontai que le dénuement dans lequel je me trouvais m'obligeait à partir. Le jour suivant, au moment où je déjeunais, un domestique de M. de Humboldt entre, me remet un papier et disparaît, (1) Le roi de Prusse.

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