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CHAPITRE XVI.

Danger des excursions champêtres. Maladies.

que

Il n'est pas facile, le moins du monde, de jouir des beautés de l'Amérique de l'ouest lorsl'on se trouve dans le voisinage de quelques curiosités naturelles, sans hasarder grandement sa santé. Rien n'est regardé comme plus dangereux que de s'exposer à la chaleur du milieu du jour, si ce n'est de respirer l'humidité du soir, et le crépuscule est si court, que si vous

partez pour une expédition lorsque la chaleur existe encore, vous pouvez à peine faire un demimille avant que le soleil ne se couche, et il faut rentrer aussi vite que possible de crainte d'attraper un rhume.

Nous bravâmes ces dangers beaucoup plus, je crois, qu'aucun habitant du pays, sans quoi nous aurions quitté Cincinnati sans connaître ses environs. Nous gardâmes religieusement le serment que nous avions fait de ne plus entreprendre de promenades romantiques dans les forêts de l'Ohio, mais nous passâmes souvent des journées entières dans le Kentucky, suivant les contours d'une crique, ou grimpant sur les collines les plus élevées, dans l'espérance d'apercevoir quelque objet nouveau. Une belle vue de l'Ohio ou de sombres détours du joli Licking étaient toujours les traits les plus remarquables du paysage.

Il y avait un lieu si beau que nous lui rendîmes visite plus d'une fois; il n'était cependant pas à l'abri des moustiques, et il se trouvait sur le bord d'un torrent entouré d'arbres énormes; c'était un de ces lieux dont on nous avait parlé

plusieurs fois, comme étant un des plus dangereux du pays. Néanmoins nous bravions tout pour avoir le plaisir de dîner près de notre magnifique torrent, et de voir les brillans rayons du soleil danser sur son verdoyant rivage, sans pouvoir nous incommoder de leur chaleur. Un peu plus bas, le bassin qui rafraîchissait notre vin formait une cascade d'une dimension suffisante pour donner à nos oreilles l'harmonie d'une chute d'eau, et procurer à nos yeux la vue des mille diamans que produit une eau limpide, lorsqu'elle est brisée contre des rochers.

Nous asseoir près de cette cascade en miniature, y lire ou y rêver pendant un jour, était un de nos plus grands plaisirs. Mais toutes les fois que nous trouvions un réduit pittoresque, où à la vue du gazon, de la mousse, d'un ombrage touffu, d'une eau limpide et des arbres tombés, majestueux encore dans leurs ruines, nous étions tentés de nous asseoir et de jouir de la fraîcheur, il arrivait toujours, à notre mortel chagrin, que ce lieu était accusé de malaria.

Une course en bateau sur l'Ohio était un autre de nos amusemens favoris. Il paraît que ces

promenades semblaient fort originales dans le pays, car souvent nous excitions les cris des jeunes garçons du rivage comme si nous avions été des monstres marins.

Le seul amusement champêtre que nous voyions partagé par les habitans était de manger des fraises et de la crème dans un joli jardin, à environ trois mille de la ville. Nous y vîmes une fois trois ou quatre voitures, ce qui annonçait un degré de dissipation dont nous n'avions jamais été témoins auparavant. Les fraises étaient assez bonnes, mais la crème avait une couleur bleu-ciel qui ne témoignait pas en sa faveur. On demandait un demi-dollar à chaque personne, c'était la valeur d'environ la moitié d'un mouton gras, et assez considérablement cher, s'il m'est permis de faire usage d'une des phrases expressives du pays,

Nous avions souvent entendu répéter par ceux qui connaissaient la contrée que le second été était la plus grande épreuve des Européens établis en Amérique, mais nous avions atteint le milieu de notre second mois d'août, et, à l'exception de la fièvre qu'un de mes fils avait éprouvée,

pendant l'été qui suivit notre arrivée, nous avions toujours joui d'une santé parfaite. Mais je fus bientôt forcée de reconnaître la vérité de la triste prédiction, et, avant la fin du mois d'août, je fus vaincue par le monstre qui erre à travers ce sol de lacs et de rivières, et porte partout avec lui la fièvre et la mort. Je passai neuf semaines dans ma chambre, et lorsque je me levai, j'avais plutôt l'air de me rendre vers le champ du potier (c'est ainsi qu'on appelle les cimetières anglais en Amérique), qu'en aucun autre lieu.

Long-temps après que je fus rétablie, les effets de ma fièvre se répandirent dans mes membres, et je restai couchée dans mon lit, occupée à lire, plusieurs semaines après que j'eusse été déclarée convalescente. On m'apporta divers ouvrages américains. Le roman de M. Flint intitulé : Francis. Berrian, est excellent, un peu trop romantique peut-être, mais il contient des scènes intéressantes et d'autres du plus grand pathétique. Espérance Leslie et Redwood, par miss Sedgewick, une dame américaine, ont tous les deux un grand mérite; je lus ensuite tous les romans de M. Cooper. Lorsque ces études américaines

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