Dissipe la tempête et les noirs aquilons; Les coursiers frémissoient sous la main des Tritons. Son meil sombre, et son front ridé par les soucis, De leurs naseaux au loin lançant des flots amers, Deux poëtes Français nous offrent encore des imitations de Virgile et d'Homère. Voici d'abord celle de Sarrasin, dans une de ses églogues : Ici les corps trompeurs des baleines pesantes On a retenu les vers suivans du poëme inédit de M. Le Brun, intitulé les Veillées du Parnasse: Vénus, au bord des mers qui furent son berceau,' Zéphir voltige autour de sa conque azurée; (Note de l'Éditeur.) (31) M. de Fénélon nous offre, au neuviême livre du Télémaque, une imitation bien marquée de ce morceau de Virgile, lorsqu'il nous représente Vénus et Neptune employant de concert une divinité trompeuse pour surprendre le pilote Athamas, qui, croyant arriver en Ithaque, entre à pleines voiles dans le port des Salentins. Voici comment M. Delille a rendu les vers sur la mort de Pelinure : La nuit avoit rempli la moitié de son cours, Il cherche Palinure au milieu de la troupe, Non, non; je connois trop les flots capricieux, Du ciel le plus serein, de la mer la plus belle, Je ne me livre point à ces garans trompeurs. » De la poupe en éclats, d'une main, sans pitié, Cette fiction de la chûte de Palinure, trompé par le Sommeil, paroît imitée du troisième livre de l'Odyssée, où Nestor raconte à Télémaque comment Ménélas perdit, par la supercherie d'Apollon, Frontès, le pilote le plus habile qui fût jamais. (Note de l'Éditeur.) LIVRE SIXIÈME. AVERTISSEMENT. Il s'agit dans ce livre de la descente d'Énée aux enfers. C'est un des plus beaux de l'Énéïde; mais c'est aussi le plus difficile de tous à entendre. Il s'y trouve même des morceaux dont on n'a jamais bien saisi le véritable sens. Les interprètes et les commentateurs n'ont rien omis pour le rendre encore plus inintelligible à force d'explications forcées et de conjectures la plupart sans vraisemblance. M. Warburton, Anglais, a proposé les siennes, qui paroissent lever d'une manière très-satisfaisante les plus grandes difficultés de ce livre admirable. Il est entré dans des discussions qui lui font autant d'honneur qu'elles jettent de lumière sur cette partie de l'Énéïde. Nous sommes persuadés que le public nous saura gré de les insérer ici telles qu'on les trouve dans le Virgile de M. l'abbé Desfontaines. C'est un hommage que nous rendons au savant M. Warburton, et un ornement que nous empruntons pour notre ouvrage. J'entreprends, dit cet habile critique, de faire voir que Virgile, dans le sixième livre de son Énéïde, n'a eu d'autre dessein que de donner une description de l'initiation de son héros dans les mystères, et de mettre devant les yeux de ses lecteurs au moins une partie du spectacle Eleusinien, où tout se faisoit par le moyen de décorations et de machines, et où la représentation de l'histoire de Cérès donnoit occasion de faire paroître sur le théâtre les Cieux, les Enfers, les champs Élysées, le Purgatoire, et tout ce qui a du rapport à l'état futur des hommes. L'ignorance du véritable but de l'Énéïde a fait tomber les critiques dans des erreurs, non seulement touchant le plan et la conduite de ce poëme, mais encore par rapport au caractère de ses personnages. La piété d'Énée a tellement choqué un célèbre écrivain Français, qu'il a dit que ce héros étoit plus propre à fonder une religion qu'une monarchie. Mais il n'a pas su que le dessein de Virgile a été de présenter un législateur parfait dans le caractère d'Énée. Or l'office d'un législateur est d'établir une religion, aussi bien que de fonder un état; et c'est sous cette double idée que Virgile représente Énée : Dum conderet urbem, Inferretque deos Latio. « Ce critique n'est pas moins blessé de l'humanité d'Énée que de sa piété : si on l'en croit, elle ne consiste que dans une grande facilité à pleurer; mais il n'a pas saisi la beauté de cette partie de son caractère. Pour donner l'idée d'un législateur parfait, il falloit le représenter pénétré des sentimens d'humanité. Il étoit d'autant plus nécessaire de donner un pareil exemple, qu'on voit, par expérience, que les politiques du commun ne sont que trop dénués de ces sentimens. Ce point de vue sous lequel nous représentons ici l'Énéïde, n'est pas moins propre à justifier les autres caractères que le poëte met sur la scène. Le savant auteur des Recherches sur la Vie et les Écrits d'Homère, me permettra bien de n'être pas de son sentiment par rapport à l'uniformité de caractères qui règne dans l'Enéïde je pense que c'est l'effet d'un dessein prémédité, et non de la cou : |