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SUR

LA LIBERTÉ DE LA PRESSE*.

C'EST au moment où le Roi invite tous les François à l'éclairer sur la manière la plus juste et la plus sage de convoquer la Nation: c'est au moment où il augmente son Conseil de cent quarante-trois Notables appellés de toutes les Classes, de toutes les Parties du Royaume, pour mieux connoître le

* Mirabeau published in 1789, the Théorie de la Royauté, d'après la Doctrine de MILTON, to which he prefixed an Essay on him and his works; aud he concludes by a just reprehension of Voltaire, for his peremptory and perfunctory decision against MILTON as a Writer of Prose; "Maintenant on peut 'apprécier, à leur juste valeur, les assertions que Voltaire s'est "permis sur le compte de MILTON. S'il faut l'en croire, "MILTON, que les Anglois regardent aujourd'hui comme un poëtë "divin étoit un très-mauvais écrivain en prose. Il resta pauvre et sans gloiré.

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"Un poëte, bel esprit et gentilhomme de la chambre, devoit "être peu propre sans doute à juger par lui-même les écrits "politiques du républicain-Mais comment ce prodigieux. "Voltaire toujours prêt à expédier un brevet d'immortalité au " premier avorton du Parnasse qui lui adressoit quelques rimes "adulatrices, a-t-il été si souverainement injuste envers la plû"part des grands hommes, dont il devoit si bien connoître le secret et défendre l'héritage?"

vœu et l'opinion publique: c'est au moment où la nécessité des affaires, la méfiance de tous les Corps, de tous les Ordres, de toutes les Provinces; la diversité des principes, des avis, des prétentions, provoque impérieusement le concours des lumières et le contrôle universel; c'est dans ce moment que, par la plus scandaleuse des inconséquences, on poursuit, au nom du Monarque, la liberté de la Presse, plus sévérement, avec une inquisition plus active, plus cauteleuse, que ne l'a jamais osé le despotisme Ministériel le plus effréné.

Le Roi demande des recherches et des éclaircissemens sur la constitution des Etats-Généraux, et sur le mode de leur convocation, aux Assemblées Provinciales, aux Villes, aux Communautés, aux Corps, aux Savans, aux Gens de Lettres: et ses Ministres arrêtent l'ouvrage posthume d'un des Publicistes les plus reputés de la Nation! Et soudain la Police, convaincue de sa propre impuissance pour empêcher la circulation d'un Livre, effrayée des réclamations qu'un coup d'autorité si extravagant peut exciter; la Police, qui n'influe jamais que par l'action et la réaction de la corruption, paie les exemplaires saisis, vend le droit de contrefaire, de publier ce qu'elle vient de proscrire, et ne voit dans ce honteux trafic de tyrannie et de tolérance, que le lucre du privilége exclusif d'un jour!

Le Roi a donné des Assemblées à la plupart de ses Provinces, et le précis des procès-verbaux de

ces Assemblées, ouvrage indispensable, pour en saisir l'ensemble, et pour en mettre les résultats à la portée de tous les Citoyens, ce prècis, d'abord permis, puis suspendu, puis arrêté, ne peut franchir les barrieres dont la Police, à l'envi de la Fiscalité, hérisse chaque Province du Royaume, où l'on semble vouloir mettre en quarantaine tous les Livres pour les purifier de la vérité.

Le Roi, par cela même qu'il a consulté tout le monde, a implicitement accordé la liberté de la Presse et l'on redouble toutes les gênes de la Presse!

Le Roi veut connoître le vœu de son Peuple: et l'on étouffe, avec la plus âpre vigilance, les Ecrits qui peuvent le manifester !

Le Roi veut réunir les esprits et les cœurs: et la plus odieuse des tyrannies, celle qui prétend asservir la pensée, aigrit tous les esprits, indigne tous les

cœurs !

Le Roi veut appeller les François à élire librement des Réprésentans, pour connoître avec lui

* C'est M. Levraut, Imprimeur de Strasbourg, qui éprouve en ce moment cette iniquité. Cet Artiste, recommandable par ses talens, et surtout par sa probité délicate, a, indépendamment de ses principes, trop à perdre pour rien hasarder dans son état. Il n'a donc imprimé ce très-innocent Recueil, qu'après avoir rempli toutes les formalités qui lui sont prescrites; et il n'en souffre pas moins une prohibition absolue, et une perte considérable.

l'état de la Nation, et statuer les remèdes qu'il nécessite et ses Ministres font tout ce qui est en eux pour que les François ne s'entendent pas, pour que les mille divisions dont la nation inconstituée est viciée depuis plusieurs siécles, viennent se heurter sans point de ralliement, sans moyen d'union et de concours; pour qu'en un mot l'Assemblée Nationale soit une malhenreuse aggréga tion de parties ennemies, dont les opérations incohérentes, fausses et desastreuses, nous rejettent, par la haine de l'anarchie, sous la verge du despotisme; et non un Corps de freres, dirigés par un intérêt commun, animés de principes semblables, pénétrés du même vou, qui fasse naître un esprit public, fondé sur l'amour et le respect des Loix !

Certes, ils commettent un grand attentat, ceux qui, dans la situation où la France se trouve plongée, arrêtent l'expension des lumieres. Ils éloignent, ils reculent, ils font avorter autant qu'il est en eux le bien public, l'esprit public, la concorde publique. Ils n'essaient d'aveugler que parce qu'ils ne peuvent convaincre; ils ne s'humanisent à séduire que parce qu'ils ne peuvent pas corrompre; ils ils ne songent à corrompre que parce qu'ils ne sauroient plus intimider: ils voudroient paralyser, mettre aux fers, égorger tout ce qu'ils ne pouroient intimider, corrompre ni séduire : ils craignent l'oeil du Peu

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