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mon pere a exigé qu'on vous fît paffer par les épreuves les plus humiliantes; il eft fatisfait de la fermeté

que vous avez montrée dans les différentes occafions que la jaloufie des Amazones leur a fait exercer fur vous. Me pardonnez vous, mon adorable Princeffe, les maux que mon amour vous a fait fouffrir; mais vous baiffez les yeux & ne répondez rien: eft-ce à la crainte ou à l'amour que vous donnez ce foupir? Sériez-vous fâchée de vous unir à un Génie? Peut-être, ajouta le Prince Verdoyant, que le féjour de mon Empire vous effraye; il eft vrai que jufqu'à préfent aucun Mortel n'y eft defcendu fans y perdre la vie : mais, Prin

ceffe, raflurez-vous, je viens d'obtenir du Roi mon pere, de qui le pouvoir s'étend fur tous les Ondins, qu'en faveur d'une paffion que je n'ai pu vaincre, vous foyez admife à l'immortalité, & reçue dans fon Empire en qualité de Princeffe des Ondins.

Tramarine étoit encore toute émue de la derniere aventure qui venoit de lui arriver; la joie, la crainte & la honte, ces divers mouvemens, agi toient tour-à-tour fon ame, & lui ôterent la force de rés pondre au Prince, qui continua ainfi cependant, belle Tramarine, quoique tout foit prêt pour vous recevoir, & que je fais sûr des fentimens favo

rables

que vous m'avez confervés, du moins jusqu'au moment que vous en fites la confidence à Céliane, ne rougiffez point, ma Princeffe, d'avoir fait l'aveu d'un feu légitime; j'étois préfent à vos yeux dans cet inftant, & du fond de ce ruiffeau, formé exprès pour vous renouveller le fouvenir des nœuds que l'amour devoit ferrer, j'y admirois votre candeur, la piété de vos fentimens, & je fus prêt vingt fois de me montrer mais outre que la présence de Céliane y mettoit obstacle, c'est que je n'avois point encore obtenu de mon pere la place que je me propofe de vous faire occuper; cependant je ne puis abfolument

Jolument être heureux fi vous montrez toujours de la répugnance à vous unir pour jamais à mon fort.

Tramarine furprise & flattée en même tems du difcours du Génie, mais ne pouvant fe perfuader qu'elle pût vivre au fond des eaux, répondit enfin au Prince en le regardant d'un air qui exprimoit en même tems fon amour & fa crainte. Pardonnez, Seigneur, fi j'ai peine à vous croire ; je ne doute point de l'étendue de votre pouvoir, & c'est ce qui me fait douter qu'un auffi grand Prince veuille bien s'abaiffer jufqu'à s'unir à une foible Mortelle, & qu'il la préfére aux belles Ondines dont fon F.

1. Part.

Empire eft rempli. Je n'ignore pas les Loix des Génies; je Içais que lorfqu'ils fe font choifi une compagne, il ne leur eft plus permis d'en changer, à moins que cette Loi n'ait une exception pour les femmcs de mon espèce; ce qui me rendroit la plus malheureuse de toutes les créatures, puifque j'aurois perdu par l'immortalité la feule reffource à laquelle les malheureux ont recours dans l'excès de leurs maux, & je me verrois obligée de traîner une vie qui me deviendroit infupportable fi vous ccffiez de m'aimer, ne pouvant plus mourir de la douleur d'avoir perdu le cœur d'un Prince qui feul peut m'attacher à la

vic.

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