Imagens das páginas
PDF
ePub

formais ordonner, je fuis prête à vous fuivre : alors elle lui présenta la main avec le fourire de l'Amour.

Verdoyant la conduifit dans fon char, & les Dauphins qui femblent charmés d'enlever une fi belle Princeffe, caracolent fur les eaux, fe plongent en précipitant leur courfe, & arrivent en peu d'heures dans la Ville capitale des Ondins, où le Roi faifoit fon féjour ordinaire. Pour entrer dans le Palais, ils traverferent plufieurs grandes cours dont les pavés font d'émeraudes, & entrerent fous une arcade foutenue par vingt-quatre colonnes de glaces. Là, étoient rangés plufieurs Officiers de la

Couronne, qui haranguerent la Princeffe au nom de tout l'Etat. Il n'y eut point à fon entrée d'artillerie; les Ondins quoiqu'ils la connoiffent parfaitement, n'en font aucun ufage.

On conduifit d'abord Tramarine, avec un très-nombreux cortège, dans une grande galerie ornée de tableaux en camaïeux, des plus beaux verres qu'il foit poffible d'unir enfemble; les bordures en étoient de diamans de différentes couleurs, dont l'affortiment formoit un coup d'œil admirable. Au bout de cette galerie, étoit un Trône formé d'un feul diamant, qu'on au roit pû prendre pour le char

du Soleil lorfqu'il paroît dans tout fon éclat : il eft certain que fi Tramarine n'eût

pas dé ja participé à la divinité de fon époux, elle n'eût jamais pû en foutenir l'éclat.

Sur ce Trône étoit affis le Roi des Ondins, qui tenoit dans fa main un trident, feul ornement de fa grandeur. A droite, étoient les premiers Officiers de la Couronne; & à gauche, les belles Ondines qui faifoient l'ornement de cette Cour. Le Génie Verdoyant s'étant approché du Trône avec la Princeffe Tramarine, la préfenta à fa Majefté Ondine, en la fuppliant de lui accorder toutes les faveurs qu'elle s'étoit acquifes

par fes vertus, fon mérite & Les fouffrances.

Cette jeune Princeffe, élevée dans la Mythologie des Payens, ne connoiffoit point d'autre Religion, ni d'autres principes que ceux qu'elle avoit reçus. Perfuadée qu'elle étoit en présence de Neptune, elle lui adreffa ce difcours : Grand Dieu ! Souverain des Ondes, dont l'empire commande à tout l'Univers... Arrêtez, Princeffe, dit le Roi en l'interrompant au milieu de fa période, je ne fuis point un Dieu; il eft vrai que je jouis de l'immortalité, mais je tiens toute ma puiffance d'une feule Divinité que nous adorons tous, & qui eft celle qui a for

"

mé tout ce qui eft dans l'Univers; c'est par fa toute-puiffance que nous régnons fur lesOndes. Puis s'adreffant à fon fils, d'une voix qui fit trembler les voûtes de fon Palais, & qui, en gonflant tout l'Océan, annonça une furieufe tempête: Comment, Prince,. avez-vous ofé me furprendre, en faisant choix d'une Payenne pour la faire participer à l'immortalité par une union qui ne fe peut plus rompre ?

Le Prince Verdoyant qui s'apperçut que Tramarine étoit interdite & tremblante, n'ofant plus lever les yeux, dit au Roi des Ondins pour appaifer fa colere Seigneur, vous n'ignorez pas que l'Amour eft.

« AnteriorContinuar »