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d'égard à son rang ni à sa naisfance.

La Chanceliere jugeant, par les regrets de la Reine, qu'elle étoit en danger de perdre fa faveur, voulut faire un dernier effort pour conferver au moins fa place: c'est pourquoi elle S répondit que pour peu que fa Majefté defirât de revoir la Princeffe, il feroit très-facile de la faire revenir à la Cour ; que la Fée Bonine qui l'avoit prife fous la protection, se feroit un plaifir de la ramener; & que l'Arrêt que fa Majesté

avoit rendu ferviroit de même à maintenir fes peuples dans leur devoir, & que c'étoit le feul but que fon Confeil s'étoit propofé dans la condamnation

qu'on avoit été forcé de pro noncer, afin d'affujettir fes Su jets à l'obfervation des Loix que fa Majefté avoit elle-même établies. Il falloit un exemple frappant, ajouta la Chanceliere, & qui pût les intimider; mais votre Majesté est toujours maîtreffe d'accorder desgraces aux perfonnes qu'elle juge qui en font dignes. J'oferai feulement faire observer à votre Majefté, qu'en rappellant la Princeffe dans votre Cour, après l'Arrêt fatal qu'il a été néceffaire de prononcer contre elle, il eft à craindre qu'elle n'en conferve un fouvenir amer, & que lorsqu'elle aura l'autorité en main, elle ne vienne à changer toute la fo

en

me du Gouvernement donnant entrée dans le Royaume à de nouveaux ufages.

Ce difcours adroit n'empêcha pas la difgrace de la Chanceliere. Ses ennemies, jaloufes du pouvoir qu'elle avoit ufurpé, ne manquerent pas de pro fiter de ces circonstances pour achever de la noircir dans l'efprit de leur Souveraine. Plufieurs Mémoires lui furent préfentés, où il étoit prouvé que la Chanceliere n'avoit animé les Magiciennes contre la Princeffe, que dans la vûe de s'emparer de toute l'autorité ; les brigues qu'elle fomentoit depuis long-tems dans les Troupes, ne tendoient qu'à fe faire donner l'administration du I, Part.

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Royaume. Toutes ces accufations furent prouvées, & l'on fit encore remarquer que les principales Charges de l'Etat n'étoient plus occupées que par fes créatures.

La Reine, furprise de fe voir ainfi trompée par une femme dans laquelle elle avoit mis toute fa confiance, & qu'elle avoit tout lieu de croire lui être attachée par toutes les faveurs dont elle n'avoit jamais ceffé de la combler, délivra fur le champ un un ordre pour qu'elle fût conduite dans l'ifle de l'Ennui, la trouvant trop coupable pour la priver de la vie. Cet ordre fut exécuté dans l'inftant, & tous les tréfors qu'elle avoit amaffés fu

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rent confifqués au profit des Troupes.

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Tramarine fut curieufe d'apprendre la fituation de l'ifle de I'Ennui dont elle n'avoit jamais entendu parler : les glaces lui repréfenterent auffi tôt un endroit marécageux, toujours rempli d'un brouillard épais, où jamais le Soleil ne fait fentir fes rayons; une terre aride & couverte de Monftres affreux qui, par leur venin répandent un air peftiféré : il ne croît dans cette ifle que des plantes venimeufes. Ce fut dans cet horrible endroit où Tramarine vit arriver fon ennemie mais ce qu'elle ne put voir fans frémir d'horreur, ce furent ces Monstres qui, fe

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