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de cas un accroissement notable de la partie affectée au point d'en doubler et d'en tripler le volume, et ayant pour résultat final, à la guérison, l'atrophie ou la destruction plus ou moins étendue de la partie affectée. Cet engorgement affecte quelquefois la forme de tubercules, mais le plus souvent ce n'est qu'un épaississement inflammatoire chronique de la peau avec ou sans ulcérations. En effet, le mot de tubercule fait naître la pensée du développement de petites tumeurs inflammatoires variables en volume, depuis un gros pois jusqu'à une noisette et plus. Or ce phénomène n'est bien appréciable que dans certains lupus du corps et des membres, car là où siége ordinairement le lupus, c'est-à-dire à la figure, l'état tuberculeux proprement dit est beaucoup moins commun. J'insiste sur cette circonstance, parce que le praticien serait souvent induit en erreur en fait de diagnostic, s'il attachait trop d'importance à cet état tuberculeux, qui est loin d'être constant.

Le mot lupus (loup) est une ancienne dénomination véritablement insignifiante, mais qu'il faut conserver pour l'usage. Quelle analogie y a-t-il en effet entre la figure d'une personne atteinte de lupus et celle d'un loup!

Nous adoptons d'ailleurs pour les variétés de cette maladie des divisions qui nous paraissent plus rationnelles que celles qui ont été préconisées jusqu'à ce jour. Nous nommons lupus tuberculeux, tout lupus avec induration rouge obscur du tissu de la peau, mais sans ulcération. Nous appelons, avec les auteurs qui nous ont précédé, lupus exedens (rongeant), tout, lupus avec engorgement, avec induration de la peau, qui offre elle-même une surface ulcérée. Puis prenant en considération la marche de la maladie dans ces deux espèces, marche d'ailleurs toujours uniforme, toujours la même, nous disons que l'une et l'autre détruisent les parties, soit en profondeur, soit en surface, car il ne faut pas perdre de vue que c'est là le but final du lupus, c'est son caractère essentiel. Quoique à son début il amène une hypertrophie, à sa fin, c'est-à-dire à sa guérison, il a produit, soit une destruction, soit une atrophie de la partie affectée. J'établis donc deux sous-divisions dans chaque espèce, que je distingue en lupus térébrant ou détruisant et atrophiant en profondeur, et en lupus serpigineux ou herpetiforme, c'est-à-dire

détruisant ou atrophiant en surface. Toutefois j'ai besoin de justifier cette expression herpetiforme. J'ai observé que lorsqu'un lupus gagnait en surface, c'était toujours au moyen de sa circonférence plus malade que son centre, et toujours aussi par un bourrelet plus ou moins marqué; de sorte qu'il n'est pas très commun de voir le centre de l'affection se cicatriser, lorsque la circonférence seule reste malade, ou de voir guérir la totalité, quand par des cautérisations opérées sur le bourrelet de la circonférence on modifie seulement la vitalité de tissu de ce bourrelet, par où se propage la maladie. Il y a donc analogie frappante entre le lupus et l'herpès sous ce rapport. Il est maintenant une forme de lupus très rare que nous avons dû cependant spécifier: c'est le lupus vorax, ainsi dénommé à cause de la rapidité avec laquelle il détruit les parties en profondeur.

Certaines considérations générales peuvent se rapporter à l'une et à l'autre affection, nous allons les faire connaître avant de décrire les espèces. Le lupus est une des scrofules de la peau. Il ne s'ensuit pas nécessairement qu'il doive toujours exister sur des sujets scrofuleux. A cet égard, on peut établir une distinction assez tranchée. Tous les lupus exedens affectent ordinairement des individus qui portent les attributs du tempérament lymphatique, et qui ont encore, ou qui ont eu des ganglions engorgés au cou, des sécrétions du cuir chevelu plus ou moins abondantes et de longue durée, ou des ophthalmies scrofuleuses. La peau est blanche, épaisse; les cheveux sont blonds; la physionomie est peu mobile; les allures générales dénotent de l'indolence et de l'apathie. Il n'en est pas de même du lupus dit tuberculeux. Il apparait sur des enfants qui ont les dehors d'une bonne et forte constitution; traits accentués, mais gros; cheveux et sourcils foncés; peau assez brune. Mais interrogez ces enfants, et ils vous diront qu'ils ont eu dans le très jeune âge quelques glandes au cou ou quelque sécrétion lymphatique.

Il y a plus, il existe sous ce rapport une nuance entre le lupus tuberculeux térébrant et le lupus tuberculeux herpétiforme ou attaquant en surface Le lupus térébrant peut siéger sur des sujets qui ont tous les attributs de la force, de la vigueur et de la santé; tandis que le lupus tuberculeux en surface se relie toujours aux

attributs d'une constitution plus ou moins molle, plus ou moins lymphatique.

Pris en général, le lupus est une maladie de l'adolescence, affectant à peu près également les deux sexes, mais étant un peu plus commune chez la femme que chez l'homme. Sur 47 lupus, on en compte 25 chez la femme et 22 chez l'homme. C'est de quinze à trente-cinq ans qu'il est le plus fréquent; 36 cas sur 44 sont dans cette catégorie. Mais c'est surtout de quinze à vingt-cinq ans qu'il se développe, puisque dans cette période de la vie il y en a 24 cas sur 44. Chose remarquable, le lupus est peut-être plus commun à la campagne qu'à la ville, et cette observation a été très judicieusement faite par M. Rayer. D'après notre statistique, les enfants qui travaillent les tissus en général, filatures, tissage, etc., y seraient plus disposés que d'autres. 28 fois sur 45 on le voit lié au tempérament lymphatique; 12 fois au tempérament lymphatique sanguin; 4 fois au tempérament sanguin, et 1 fois au tempérament sanguin nerveux. Cet ordre de chiffres mérite de fixer toute l'attention du praticien sous un double rapport. D'abord il vient nettement à l'appui de nos idées sur la liaison de certaines formes morbides cutanées avec tel ou tel tempérament; ensuite il doit faire comprendre au praticien que c'est là une maladie générale de l'économie, qu'il ne suffit pas de traiter extérieurement, et qui exige au contraire une médication générale soutenue et prolongée. Sur 27 cas, la constitution est notée 21 fois comme étant excellente. En fait de maladies antérieures, elles n'ont été désignées que pour 11 cas, et dans ces 11 exemples les gourmes, ophthalmies ou glandes, figurent pour le chiffre 9. La statistique donne une preuve de la lenteur de la marche de cette affection sur 42 lupus on en trouve 7 ayant un an de date; 28 plus d'un an, et 7 plus de dix ans. Il paraît naître plus fréquemment en hiver que dans toute autre saison. Enfin, par rapport aux parties affectées, il est curieux de connaître des chiffres exacts. Face, 41 fois sur 44; nez seul, 16 fois; nez et autres parties de la figure, 26 fois; lèvres, 4 fois; bras, mains et jambes, 3 fois; cou, avant-bras et pied, 2 fois; poitrine, dos et cuisses, 1 fois. C'est donc là essentiellement une maladie de la figure: 41 fois sur 44 celle-ci est atteinte; ce qui n'exclut pas la possibilité de siége sur

d'autres parties, car le lupus est assez fréquemment multiple: on peut trouver deux, trois, cinq plaques de lupus sur le même individu, ce qui donne la clef des chiffres que nous indiquons en détail par rapport au chiffre d'ensemble. Enfin faisons remarquer que 26 fois sur 44 le nez est atteint, ce qui explique pourquoi toutes les planches de maladies de la peau représentent le lupus comme siégeant plus particulièrement sur cette partie. Ces préliminaires nous permettent d'entrer maintenant dans l'histoire de chaque espèce.

Le lupus tuberculeux térébrant a son siége le plus commun au sommet et sur les ailes du nez, mais plutôt au sommet, ce qui n'exclut pas qu'il puisse se montrer aussi sur d'autres points de la figure ou de la surface du corps. Il apparaît au sommet du nez par un épaississement un peu diffus de la peau avec légère induration du tissu cellulaire sous-cutané et rougeur sombre. La partie malade est quelquefois lisse, uniforme, luisante; dans quelques cas il se forme une petite croûte de très peu d'étendue, assez épaisse, grisàtre, sèche, adhérente, et qui ne fera que très peu de progrès ultérieurement. Dans d'autres circonstances cet engorgement est surmonté à sa surface de petites saillies dépassant son niveau et qui constituent des tubercules; d'ailleurs aucune sensation douloureuse. La maladie persiste dans le point où elle s'est montrée avec accroissement du volume de cette partie, et dans quelques cas rares avec une certaine atrophie ou perte de substance, pour ainsi dire, quoiqu'il n'y ait pas d'ulcération. L'hypertrophie est beaucoup plus commune que l'atrophie; aussi voit-on souvent le lupus tuberculeux doubler et tripler le volume du nez ou de la partie affectée.

Une fois développé sur un point, le lupus tuberculeux térébrant fait des progrès excessivement lents et tels, que quelquefois les malades ne réclament les soins du médecin qu'après un ou deux ans de son point de départ; mais il gagne toujours en profondeur, envahissant peu à peu les parties plus profondes, jusqu'à atteindre pour le nez, par exemple, les ailes et la cloison du nez. Quelquefois l'affection, quoique partie de l'extrémité du nez, ne gagne que le côté gauche ou le côté droit; enfin elle s'arrête ordinairement à la jonction des ailes du nez et des joues, ou un peu au delà, en enva

hissant sur ces parties, mais alors elle a tout attaqué. Ce n'est pas la peau seulement qui a été affectée, c'est aussi le tissu cellulaire souscutané, les cartilages, la membrane muqueuse, qui participent de la tuberculisation ou de l'engorgement.

Ce qu'il faut bien dire, c'est que cette inflammation lente qu'on appelle lupus, que l'on désigne par une tuberculisation, ce qui n'est réellement qu'une fiction de forme, est une maladie qui, sans ulcérer, sans faire sécréter, dans cette espèce au moins, change entièrement la nature des tissus qu'elle affecte, modifie leur organisation, et les transforme en une matière plus ou moins homogène qui n'est pas celle de l'inflammation ordinaire, et qui n'est pas non plus la matière tuberculeuse proprement dite. C'est donc un mode inflammatoire chronique tout spécial.

C'est cette espèce de lupus qui se rencontre sur des sujets d'une excellente constitution en apparence et qui n'ont pas pour la plupart les attributs du tempérament lymphatique. La maladie dure ainsi des années, sept, dix, douze, quinze ans. Née de quinze à vingt-cinq ans, liée quelquefois au tempérament lymphatique, elle reçoit, dans certains cas, de l'influence de l'àge, chose remarquable, une modification importante, et en vertu de laquelle elle se guérit quelquefois spontanément, ou au moins s'arrête pour ne plus faire de progrès, ce qui dépend, suivant nous, de ce que l'âge et les habitudes de la vie modifient singulièrement le tempérament et la constitution, et qu'il agit à l'instar des médications que nous employons dans ce but. Elle ne porte d'ailleurs aucune atteinte à la santé générale.

Le lupus tuberculeux térébrant est assez rare ailleurs qu'au nez et au voisinage des yeux et de la bouche. Lorsque cette forme morbide a son siége sur le corps, elle y fait aussi des progrès très lents; elle y occupe peu d'étendue, et toute sa surface y reste malade uniformément. L'état tuberculeux y est mieux dessiné.

Lupus tuberculeux serpigineux. Cette forme est beaucoup plus commune. Contrairement à l'espèce précédente, elle affecte au moins aussi souvent les membres et le corps que la figure. Elle a un cachet tout particulier, en ce sens d'abord que la forme tuberculeuse est beaucoup mieux prononcée; que lorsqu'elle a atteint

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