Imagens das páginas
PDF
ePub

tiplie les découvertes (1). En toute espèce de science, quiconque a des succès dans les recherches qu'il entreprend, et l'obtient par un travail uniforme et régulier, prouve clairement par-là même qu'il dirige ces recherches par des règles générales, et que c'est à ces règles qu'il doit en partie l'avantage qu'il a d'y réussir. Il est vrai que souvent l'inventeur n'a point énoncé disertement quelques-unes des règles qu'il suit; il peut même arriver qu'il ne s'aperçoive pas du parti qu'il en tire; mais elles lui sont incontestablement d'un grand secours; et cela résulte de la marche uniforme à laquelle il assujettit son génie. A mesure que ces règles lui se ront révélées à lui-même par ses propres mé

(1) On peut conclure de plusieurs passages de Newton qu'il avoit beaucoup réfléchi sur la méthode; en particulier que les ouvrages de Bacon lui étoient bien connus, et que quelques-unes de ses expressions lui étoient devenues familières. Par exemple, dans un mémoire inséré dans les Transact. philos., il dit à propos de la vérification de son opinion sur la diverse réfrangibilité des rayons décomposés par le prisme, qu'il en est venu à une expérience décisive; et il se sert en cette occasion d'un mot emprunté de Bacon: me tandem adduxit ad experimentum crucis. Voy. Is. Newtoni Opuscul. T. II. p. 283. P. P. p.

ditations, ou que d'autres observateurs, sous le nom de logiciens, les auront déduites d'un examen attentif de ses découvertes; les facultés inventives, qui sembloient propres à un seul homme, pourront être mises à la portée de tous, et ceux qui se livreront aux mêmes recherches pourront y avoir le

même succès.

Les remarques suivantes, qu'un artiste philosophe a faites à l'occasion de la peinture, peuvent être étendues, avec de légères modifications, à tous les emplois de l'intelligence.

« Ce que nous appelons génie, ne com»mence pas au point où finissent les règles, » envisagées d'une manière abstraite; mais » où les règles connues, vulgaires, rebat»tues ne sont plus applicables. Il faut bien, » de toute nécessité, que les ouvrages de » génie, comme tout autre effet, aient une >> cause et soient assujettis à des règles. Ce »> ne peut être par hasard, que sont pro» duites, avec constance et certitude, des » choses excellentes; car la constance et la >> certitude sont étrangères au hasard. Mais >> les règles qui président au travail des >> hommes d'un talent extraordinaire, qu'on

>> a coutume d'appeler génie, sont telles, que >> ces hommes les découvrent seuls, à l'aide » de leur observation personnelle; ou bien >> elles sont d'une texture si délicate, qu'il » n'est pas aisé de les manier et de les ex>> primer par des mots.

» Quelle que soit la délicatesse de ces >> règles, quelque difficulté que l'on éprouve » à les coucher par écrit, elles n'en sont >> pas moins aperçues et senties par le génie >> de l'artiste et il travaille d'après ces » règles, avec autant de sûreté, que si elles >> avoient été revêtues d'un corps et fixées » sur le papier. Il est bien vrai, que ces >> principes fins et délicats ne peuvent pas >>'être rendus palpables, comme les règles >> les plus grossières de l'art: mais il ne s'en>> suit pas que l'esprit ne puisse se monter » de manière à apercevoir, comme par un >tact scientifique, des convenances, que >> les mots ne peuvent qu'imparfaitement >> indiquer (1). »

(1) Discours de Sir Jos. REYNOLDS.

SECTION V.

Application des principes précédens aux phénomènes des songes.

Les phénomènes des songes donnent lieu

Es

à trois questions différentes. Premièrement : quel est l'état de l'ame dans le sommeil? ou en d'autres termes, quelles sont les facultés qui alors continuent d'être en activité; et quelles sont celles qui sont suspendues ? Secondement jusqu'à quel point nos songes paroissent-ils être soumis à l'influence des sensations qui affectent notre corps; et comment varient-ils en conséquence de l'état de sante ou de maladie où le corps se trouve ? Troisièmement : quel est le changement produit par le sommeil dans les parties du corps avec lesquelles les opérations de l'ame sont le plus immédiatement liées ; et comment ce changement agit-il, pour établir une différence si remarquable, entre les phénomènes que présente alors notre esprit, et les phénomènes que nous savons avoir lieu pendant la veille? De ces trois questions la première appartient à l'histoire de l'es

[ocr errors]

prit humain ; et c'est à l'éclaircir que se borne presque exclusivement la recherche que nous allons entreprendre. La seconde question intéresse plus particulièrement le médecin, et n'est pas proprement de notre ressort. La troisième me semble liée à un sujet, placé au-delà des bornes de nos facultés.

Si en étudiant l'état de l'ame pendant le sommeil, nous pouvions parvenir à réduire tous les phénomènes des songes à un petit nombre de principes, même à un seul; nous aurions fait faire un pas à la science.de l'esprit humain et cette généralisation seroit utile, lors même que nous ne pourrions pas aller au-delà; lors même qu'il nous seroit impossible de dire comment le sommeil agit, ou comment les changemens qu'il opère dans le corps sont liés à ceux qui affectent en même tems notre esprit. Un tel pas satisferoit, au moins jusqu'à un certain point, ce penchant qui nous porte à remonter des faits de détails aux lois générales, penchant qui est le principe et le fondement de toutes les recherches philosophiques. Et dans ce cas particulier, je suis porté à croire que cette espèce de travail est la seule qui puisse

« AnteriorContinuar »