SCENES ET TABLEAUX. POÉSIES TRADUITES DE L'ALLEMAND. I. LA FILLE DE L'HOTESSE. Trois sveltes jeunes gens, ayant passé le Rhin, « Dame hôtesse, avez-vous de bon vin qui pétille « A ma bière, à mon vin, chacun fait bon accueil.... Ma pauvre fille est là, couchée en son cercueil! » Pénétrant, à ces mots, jusqu'au fond de l'auberge, Le premier souleva le voile, et tristement Se prit à contempler ce corps jeune et charmant : « Si tu n'avais quitté notre sombre demeure, Je t'aimerais, bel ange, à compter de cette heure! »> Le second recouvrit le corps, se retira, « O toi que j'appelais ma douce fiancée! Le troisième écarta le drap, quand vint son tour, « Je t'ai toujours aimée, en ce moment je t'aime, Et dans l'éternité je t'aimerai de même! » UHLAND. Tout était clos, et la tristesse Un sphinx gardait cette retraite : Quelle femme!... Un désir farouche Séduit par cette étrange image, Car le marbre se mit à vivre, Il buvait toute mon haleine! Cher tourment! aimable martyre! Le rossignol chantait : « Cruelle! Femme et monstre! amour! ah! pourquoi Mêles-tu la douleur mortelle A tes ravissements, dis-moi? « Beau sphinx, de cette énigme sombre Dis-moi le mot, car je suis las, Car depuis des siècles sans nombre Je cherche et je ne trouve pas! »> HEINE. IV. LE BAISER. « Chère, n'aurai-je pas, après ce long voyage, Un myrte fleurissait à côté du prie-Dieu; Elle en cueillit un brin, et m'en faisant hommage : Que cette fleur d'amour vous soit, dit-elle, un gage De mon amour pour vous, en tout temps, en tout lieu! >> Ces beaux jours ne sont plus, la branche est desséchée, Et bien souvent je vais, la nuit, verser des larmes HEINE. V. LE COEUR ET L'ÉCORCE. (Tablettes d'un voyageur.) Un pauvre cabaret : pour enseigne une branche; Un vilain pot de grès au bord de la fenêtre, Un antre menaçant, hérissé de fougères, D'où s'échappe un ruisseau, pleurs charmants du granit. Un piéton basané que le cavalier raille (Moi-même), tout poudreux, couchant sur les chemins, Mais dont le cœur contient les fleurs de la jeunesse, |