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Et jour et nuit pour Dieu pleine d'activité,
Consuma son repos, ses biens et sa santé,
A soulager les maux de tous les misérables (1).

"

a vécu dans une pratique con

(1) Magdeleine de Lamoignon,. tinuelle des vertus chrétiennes. Elle étoit douée sur-tout d'une grande douceur,... le roi lui avoit confié la distribution de ses aumônes,... elle appeloit ordinairement M. Despréaux son directeur; mais elle vouloit quelquefois le diriger à son tour. Ainsi elle ne trouvoit pas bon qu'il fit des satires, parcequ'elles blessent la charité. « Mais ne « me permettriez-vous pas, lui dit-il un jour, d'en faire contre le grand Turc, ce prince infidèle, l'ennemi de notre religion?— Contre « le grand Turc! reprit Mademoiselle de Lamoignon. Oh non, c'est « un souverain; et il ne faut jamais manquer de respect aux per« sonnes de ce rang. Mais contre le diable, répliqua M. Despréaux, « vous me le permettrez-bien?—Non, dit-elle encore après un mo«< ment de réflexion, il ne faut jamais dire du mal de personne. » (Brossette.)* Une autre réponse de mademoiselle de Lamoignon peint également son extrême bonté. On lui disoit que l'embonpoint du prédicateur Feuillet contrastoit avec la rigidité de sa doctrine. « Oh! répondit-elle, il commence à maigrir. » D'Alembert n'a pas voulu perdre l'observation faite contre le rigoureux casuiste: il l'attribue en conséquence à Despréaux [a]; mais on croit qu'elle appartient à la première présidente de Lamoignon.

Mademoiselle de Lamoignon, morte le 14 avril 1687, dans sa 78° année, fut inhumée aux Cordeliers dans la chapelle de sa famille. Despréaux lui rend hommage dans son poëme du Lutrin, chant VI, page 449, note c. Racine et lui composèrent son épitaphe; le premier nous l'apprend, dans une lettre du 4 août 1684, tome IV, page 65.

[a] Voyez le tome Ier, satire IX, page 254, note 2.

CHANSON

A boire, faite à Bâville, où etoit le père Bourdaloue [a].

Que Bâville me semble aimable,

Quand des magistrats le plus grand
Permet que Bacchus à sa table
Soit notre premier président!

Trois muses, en habits de ville,
Y président à ses côtés :
Et ses arrêts par Arbouville (1)
Sont à plein verre exécutés.

Si Bourdaloue un peu sévère
Nous dit: Craignez la volupté;
Escobar [b], lui dit-on, mon père,
Nous la permet pour la santé.

Contre ce docteur authentique,
Si du jeûne il prend l'intérêt :
Bacchus le déclare hérétique,
Et janséniste, qui pis est.

[a] Voyez sur cette chanson, composée en 1672, et que l'auteur inséra dans son édition de 1701, la lettre adressée le 15 juillet 1702 à Brossette, tome IV, page 440. Il seroit à désirer que l'on eût de semblables éclaircissements sur ses principaux ouvrages.

(1) Gentilhomme, parent de M. le premier président. (Despréaux, édition de 1701.)

[b] Voyez sur Escobar le tome IV, page 649, note b.

VERS

Pour mettre au-devant de la Macarise de l'abbé d'Aubignac [a], roman allégorique, où l'on expliquoit toute la morale des stoïciens [b].

Lâches partisans d'Épicure [c],

Qui brûlant [d] d'une flamme impure, Du Portique (1) fameux fuyez l'austérité, Souffrez qu'enfin la raison vous éclaire. Ce roman, plein de vérité.

Dans la vertu la plus sévère

Vous peut faire aujourd'hui trouver la volupté [e].

[a] François Hédelin, plus connu sous le nom d'Aubignac, qui étoit celui de l'abbaye dont il fut pourvu, naquit à Paris en 1604, et mourut à Nemours en 1676. Sa tragédie en prose de Zénobie n'eut aucun succès, et La Pratique du théâtre, le plus important de ses ouvrages, ne se lit guère aujourd'hui. Despréaux vante pourtant les connoissances de l'auteur en ce genre, dans la troisième de Réflexions critiques, tome III, page 171.

ses

[b] Dans l'édition de 1701, ces vers sont insérés avec le titre suivant: Vers pour mettre au-devant d'un roman allégorique, où l'on expliquoit toute la morale des stoïciens.

[c] Philosophe ne l'an 341 avant l'ère vulgaire. Ses principes sont d'autant plus dangereux, qu'on les saisit mal: il faisoit, il est vrai, consister le souverain bien dans la volupté; mais par la volupté il entendoit la sagesse.

[d] Dans les éditions avouées par l'auteur, on lit brûlants; nous avons fait observer plusieurs fois qu'il mettoit presque toujours le participe actif au pluriel, même lorsque la grammaire prescrivoit le contraire. Quand il composa cette petite pièce, la règle étoit à peine établie.

(1) L'école de Zenon. ( Despréaux, édition de 1713.)

[e] Macarise ou la reine des îles fortunées, parut en 1664, 2 vol. in-8°.

ÉPIGRAMME.

A messieurs Pradon et Bonnecorse, qui firent en même temps paroître contre moi chacun un volume d'injures.

Venez, Pradon [a] et Bonnecorse [b],

Grands écrivains de même force,

« C'est, dit la Biographie universelle, sur cet ouvrage que Richelet,

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qui l'avoit d'abord loué, et qui ensuite se brouilla avec d'Aubi

gnac, fit ces quatre vers qu'il lui envoya :

Hédelin, c'est à tort que tu te plains de moi;

N'ai-je pas loué ton ouvrage ?

Pouvois-je faire plus pour toi

Que de rendre un faux témoignage?»

Despréaux, dans sa lettre du 9 avril 1702 à Brossette, tome IV, p. 430, se félicite de ce que ses vers ne furent pas compris parmi beaucoup d'autres, que l'abbé d'Aubignac avoit, suivant l'ancien usage, exigés de ses amis pour faire valoir son roman. Le poëte les inséra dans l'édition de ses œuvres de 1701.

[a] En 1685, Pradon publia les Nouvelles Remarques sur tous les ouvrages du sieur D***. Nous avons fait connoître plusieurs passages de cette critique, qui forme un volume de 115 pages. Nous avons également cité plusieurs vers d'une épître qui la termine, que l'auteur suppose lui avoir été adressée. En voici le début :

Ami de la justice et de la vérité,

Alcandre, dont l'esprit est rempli de clarté,
Admiré des savants, critique des critiques,
Qui puises ton discours des salines attiques,
Il est temps de montrer d'un rimeur insolent
Le mérite imposteur et le petit talent.
Ce chantre sans vigueur, sans art et sans génie,
Qui des accords qu'il note ignore l'harmonie,
N'est qu'un mélancolique, un farouche hibou,
Qui, pour voir la lumière, osa quitter son trou;
Qui, faux imitateur d'Horace et de Lucile,

et

De vos vers recevoir le prix;

Venez prendre dans mes écrits

La place que vos noms demandent;
Linière [c] et Perrin [d] vous attendent (1).

Infecta le public des vapeurs de sa bile,
Et qu'on ne voit paré que de vols déguisés,
De morceaux recousus et d'ornements usés.
Qu'il est divertissant dans sa noble préface,
Où, pour justifier ses airs et son audace,

D'un remords scélérat empruntant tous les traits,
Par crainte il fait semblant d'abjurer ses forfaits!

Ces derniers vers attaquent la préface de l'édition de 1683, où Despréaux avoue que les auteurs qu'il a critiqués ne sont pas sans mérite, tome Io1, page 12. Voyez sur Pradon la page 45 du même volume, note b.

[b] En 1686, Bonnecorse fit imprimer à Marseille Lutrigot, poëme héroï-comique, en cinq chants, dans lequel il parodie les vers de Despréaux. C'est ainsi que le parodiste commence:

Je chante Lutrigot, ce héros du Parnasse
Dont la France indignée a condamné l'audace,
Qui, trop long-temps armé de ses traits imposteurs,
A déclaré la guerre aux plus fameux auteurs:
Lui qui, dans un poëme et sans art et sans forme,
A fait paroitre au jour une machine énorme ;
Et qui croit, par l'effet d'une ample vision,
Avoir fait d'un pupitre un second Ilion.

L'époque de la publication de ce poëme annonce que Brossette
commet une méprise, lorsqu'il dit que l'épigramme de Despréaux
fut faite en 1685; elle fut insérée dans l'édition de 1694. Bonnecorse
ajouta cinq autres chants à son poëme. Voyez sur cet auteur la sa-
tire VII, tome I, p. 172, note 2, et dans ce volume-ci l'épitre IX,
page 113, note d, ainsi que le Lutrin, chant V, page 425, note 1.
[c] Voir sur Linière le tome I, satire IX, page 253, note 1.
[d] Voir sur Perrin la satire VII, page 172, note 2.

(1) C'est riposter bien foiblement à deux volumes d'injures. (Le

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