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AUTRE

Sur la première représentation de l'Agésilas de M. de Corneille, que j'avois vue (1666.)

J'ai vu l'Agésilas.

Hélas [a]!

AUTRE

Sur la première représentation de l'Attila ( 1667.).

Après l'Agésilas,

Hélas!

Mais après l'Attila,
Holà [b].

[a] « Agésilas, dit Voltaire, n'est guère connu dans le monde que « par le mot de Despréaux. Il eut tort sans doute de faire imprimer <«< ce mot, qui n'en valait pas la peine; mais il n'eut pas tort de le « dire. » ( Préface d'Agésilas.) Le satirique a sans doute reconnu ce tort: cette épigramme et la suivante sont insérées dans l'édition de 1701, mais elles ne se trouvent pas dans celle de 1713.

[b] Le sel de cette épigramme ne répare point le malheur de l'avoir faite. (Le Brun.) * Voyez, dans le tome I, satire IX, page 246, les notes a et b. « Le P. Tournemine, dans une lettre imprimée", dit « Louis Racine, avance qu'il ( Despréaux ) ne décria l'Agésilas et l'Attila que pour immoler les dernières pièces de Corneille à Racine son « idole. Ce n'étoit pas certainement lui immoler de grandes victimes; « et Boileau ne pensa jamais à élever son idole, pour répéter le « terme du P. Tournemine, au-dessus de Corneille. Il savoit rendre « justice à l'un et à l'autre ; ils les admiroit tous deux, sans décider « sur la préférence [a]. »

[a] OEuvres de Louis Racine, 1808, tome V, page 62, Mémoires sur la vie de Jean Racine.

SONNET

Sur une de mes parentes, qui mourut toute jeune entre les mains d'un charlatan [a].

Parmi les doux transports d'une amitié fidéle,
Je voyois près d'Iris couler mes heureux jours;
Iris que j'aime encore, et que j'aimai toujours,
Brûloit des mêmes feux dont je brûlois pour elle;

Quand, par l'ordre du ciel, une fièvre cruelle
M'enleva cet objet de mes tendres amours;
Et, de tous mes plaisirs interrompant le cours,
Me laissa de regrets une suite éternelle.

Ah! qu'un si rude coup étonna mes esprits!
Que je versai de pleurs! que je poussai de cris!
De combien de douleurs ma douleur fut suivie!

Iris, tu fus alors moins à plaindre que moi;
Et, bien qu'un triste sort t'ait fait perdre la vie,
Hélas! en te perdant j'ai perdu plus que toi.

[a] Ce sonnet, qui ne se trouve pas dans les éditions de 1701 et de 1713, fut composé sur la mort de mademoiselle Dongois, niece de l'auteur. Celui-ci ne paroît point l'avoir oublié, comme le dit Brossette. La lettre du 24 novembre 1707, que ce dernier produit dans son commentaire, annonce plutôt et le regret du poëte en apprenant que sa pièce est connue, et ses motifs pour ne l'avoir pas publiée, quoique les vers en soient bien tournés. Voyez le tome IV, Page 608.

AUTRE SONNET

Sur le même sujet [a].

Nourri dès le berceau près de la jeune Orante,
Et non moins par le cœur que par le sang lié,
A ses jeux innocents enfant associé,

Je goûtois les douceurs d'une amitié charmante ;

Quand un faux Esculape, à cervelle ignorante,
A la fin d'un long mal vainement pallié,
Rompant de ses beaux jours le fil trop délié,
Pour jamais me ravit mon aimable parente.

Oh! qu'un si rude coup me fit verser de pleurs!
Bientôt, la plume en main signalant mes douleurs,
Je demandai raison d'un acte si perfide.

Oui, j'en fis dès quinze ans [b] ma plainte à l'univers;

[a] Le titre que nous donnons au précédent sonnet est celui que Despréaux avoit donné au sonnet ci-dessus, qu'il composa de 1690 à 1692, et qu'il inséra dans l'édition de 1701. Dans sa lettre du 15 juillet 1702, tome IV, page 441, il regarde ce dernier sonnet comme une des choses dont il s'applaudit le plus ; il met les 3me, 4me et 14me vers au nombre des plus gracieux qu'il ait faits. Dans sa lettre du 24 novembre 1707, il explique à Brossette pour quelle raison il a refait sa première pièce de la seconde manière. Voyez le tome IV, p. 609. En parlant de cette seconde manière, «dont l'auteur étoit si content, » d'Alembert ajoute: « Nous croyons qu'il sera seul de son avis. » ( Dix-huitième note sur l'éloge de Despréaux.) Le second sonnet offre des vers faits avec art; mais il a moins d'intérêt que le premier, qui fut composé dans la douleur.

[b] D'après une telle indication, le sonnet précédent doit avoir été composé vers l'an 1652, et non en 1654, comme l'avancent plusieurs éditeurs.

Et l'ardeur de venger ce barbare homicide

Fut le premier démon qui m'inspira des vers.

ÉPIGRAMME

Sur ce qu'on avoit lu à l'académie des vers contre Homère et
contre Virgile [a].

Clio vint, l'autre jour, se plaindre au dieu des vers
Qu'en certain lieu de l'univers

On traitoit d'auteurs froids, de poëtes stériles,
Les Homères et les Virgiles.

Cela ne sauroit être, on s'est moqué de vous,
Reprit Apollon en courroux:

Où peut-on avoir dit une telle infamie?
Est-ce chez les Hurons, chez les Topinamboux [b]?
C'est à Paris. C'est donc dans l'hôpital des fous?

Non, c'est au Louvre, en pleine académie [c]!

[a] Il s'agit du poëme intitulé: Le siècle de Louis-le-Grand, lu par Charles Perrault à l'académie françoise le 27 janvier 1687. Voyez à ce sujet le tome III, page 155, note a.

[b] Peuples sauvages de l'Amérique.

[c] « J'ai supprimé cette épigramme, écrit Despréaux à Maucroix, <«<et ne l'ai point mise dans mes ouvrages, parcequ'au bout du compte je suis de l'académie, et qu'il n'est pas honnête de diffamer un corps dont on est. » (Tome IV, lettre du 29 avril 1695, page 279.) Elle ne se trouve pas en effet dans l'édition de 1694; mais le satirique n'eut pas, en donnant l'édition de 1701, la force de persister dans ses bonnes intentions, quoiqu'il se fût réconcilié avec Perrault. C'étoit un léger sacrifice à faire à ce dernier. C'est néanmoins à cette épigramme que le prince de Conti, si connu par son goût, donnoit la préférence, suivant ce que dit Brossette.

AUTRE

Sur le même sujet [a].

J'ai traité de Topinamboux

Tous ces beaux censeurs, je l'avoue, Qui, de l'antiquité si follement jaloux,

Aiment tout ce qu'on hait, blâment tout ce qu'on loue(1); Et l'académie, entre nous,

Souffrant chez soi[b] de si grands fous,

Me semble un peu Topinamboue (2).

[a] A la suite de l'épigramme précédente, Brossette place celle-ci, qui n'est insérée dans aucune des éditions avouées par l'auteur. Ce dernier l'envoie en confidence à Maucroix, dans sa lettre du 25 avril 1695, tome IV, page 180. « Ces épigrammes, dit Le Brun, « n'étoient pas assez bonnes pour indisposer l'académie ; on en a fait depuis de meilleures contre elle, sans qu'elle changeât rien à son

"

« allure. >>

(1) Ce vers est furieusement hyperbolique. MM. Perrault n'étoient pas dans ce cas-là. (Saint-Marc.) * Ce commentateur, qui d'ailleurs applaudit à l'épigramme, pouvoit-il ignorer que dans une pareille guerre on dépasse le but, afin d'être plus saillant?

[b] Nous avons eu occasion de remarquer plusieurs fois que les poëtes emploient presque toujours le pronom soi, même dans les propositions qui présentent un sens déterminé.

(2) Ce dernier mot a été fait par notre poëte; et la singularité du mot fait une partie du sel de cette épigramme. Long-temps, avant qu'elle eût été composée, M. Chapelle, ami de M. Despréaux, avoit trouvé un vieux almanach, à la fin duquel il y avoit une méchante pièce en vers burlesques, sur le mariage de Lustucru, laquelle finissoit ainsi :

Et le pauvre Lustucru

Trouve enfin sa Lustucrue.

Cette folie est l'original de Topinamboue. ( Brossette. )

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