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image vraisemblable et parfaite, flammam media ipsa tenebat ingentem, et summâ Danaos ex arce vocabat.—Le profond sommeil de Déiphobe est justifié, confectum curis..., et son repos forme un contraste frappant avec le réveil qui l'attend, dulcis et alta quies, placidæque... - L'enlèvement de ses armes n'est pas seulement un trait de la perfidie d'Hélène, mais un artifice du poëte pour ôter tout moyen de défense au guerrier qui se laisse saisir et mutiler. - Enfin Déiphobe n'insiste que sur la trahison de celle qu'il appelle son épouse, egregia conjux; et lorsque Ménélas et les Grecs se sont précipités dans son appartement, il ajoute seulement, comes additur unà hortator scelerum Æolides; le nom d'Ulysse suffit à l'imagination du Troyen. Ce nom et le mouvement suivant, Di talia Graiis instaurate..., dispensent le poëte de répéter les détails du premier tableau.

Si Hélène avait pris une part aussi active à la ruine de Troie, Énée aurait dû l'apprendre plus tôt, et ne pas l'oublier dans le second livre où l'importance de ce rôle exigerait des changements. Mais il est plus vraisemblable, et ce dernier récit achève de le prouver, que Virgile voulait supprimer le premier, qui, malgré ses beautés, présente le héros dans une situation peu favorable à son caractère (Voy. liv. II, p. 111).

L'expression des regrets, de la douleur et de l'amitié anime les diverses parties de la scène, et surtout les derniers détails. Pouvait-on exposer plus vivement la force du sentiment qui retient le

Pergama, et armatum peditem gravis attulit alvo.
Illa, chorum simulans, evantes orgia circùm
Ducebat Phrygias; flammam media ipsa tenebat
Ingentem, et summâ Danaos ex arce vocabat.
Tum me confectum curis somnoque gravatum
Infelix habuit thalamus, pressitque jacentem
Dulcis et alta quies placidæque simillima morti.
Egregia interea conjux arma omnia tectis
Amovet, et fidum capiti subduxerat ensem:
Intra tecta vocat Menelaum, et limina pandit :
Scilicet id magnum sperans fore munus amanti,
Et famam exstingui veterum sic posse malorum.
Quid moror? irrumpunt thalamo; comes additur unà
Hortator scelerum Æolides. Dì, talia Graiis
Instaurate, pio si pœnas ore reposco!

Sed te qui vivum casus, age, fare vicissim
Attulerint: pelagine venis erroribus actus,
An monitu Divûm? an quæ te fortuna fatigat,
Ut tristes sinè sole domos, loca turbida, adires? »
Hâc vice sermonum roseis Aurora quadrigis
Jam medium æthereo cursu trajecerat axem :

héros que par ce vers, et fors omne datum traherent per talia tempus, par ces paroles de la sévère prêtresse, nos flendo ducimus horas, et par l'espèce de violence nécessaire pour séparer Énée et Déiphobe, ne sævi, magna sacerdos?...

Dans le récit précédent, Énée n'avait pas arrêté sa marche comme le prouvent plusieurs expressions, conferre gradum (v.488), et ces paroles de Déiphobe, discedam..., reddarque tenebris, ainsi que son départ, vestigia torsit. Il est même arrivé aux limites de ces lieux, lorsque la sibylle lui montre d'un côté le chemin qui conduit à l'Élysée, et de l'autre le Tartare dont il aperçoit l'enceinte et la porte, respicit Æneas..., mœnia lata videt..., porta adversa...

Virgile décrit ce qui frappe d'abord les yeux d'Énée, l'enceinte et la porte du Tartare: 1o l'enceinte, son étendue, le triple mur dont elle est fermée, le fleuve qui l'environne, mænia lata, triplici circumdata muro, Tartareus Phlegethon: torrentibus, offrant à la fois l'idée du feu et d'un torrent, s'accorde avec flammis rapidus amnis; on sent d'ailleurs l'effet de la cadence; 2o la porte; sa force inexpugnable est l'idée dominante, solido adamante columnæ, vis ut nulla virûm, enfin, non ipsi exscindere ferro cœlicolæ valeant; au-dessus s'élève une tour, dont ferrea et stat ad auras peignent vivement la force et la hauteur; 3° près de cette porte, Tisiphone, veillant à sa garde, l'horrible Tisiphone, anime le tableau, pallâ succincta cruentâ vestibulum servat.

Et fors omne datum traherent per talia tempus;
Sed comes admonuit, breviterque affata Sibylla est :
«Nox ruit, Ænea; nos flendo ducimus horas.
Hic locus est partes ubi se via findit in ambas :
Dextera, quæ Ditis magni sub monia tendit,
Hàc iter Elysium nobis; at læva malorum
Exercet pœnas, et ad impia Tartara mittit. »
Deiphobus contrà: «Ne sævi, magna sacerdos ;
Discedam, explebo numerum, reddarque tenebris.
I, decus, i, nostrum; melioribus utere fatis. >>
Tantùm effatus, et in verbo vestigia torsit.
Respicit Æneas subitò, et sub rupe sinistra
Moenia lata videt, triplici circumdata muro,
Quæ rapidus flammis ambit torrentibus amnis
Tartareas Phlegethon, torquetque sonantia saxa.
Porta adversa ingens, solidoque adamante columnæ,
Vis ut nulla virûm, non ipsi exscindere ferro
Coelicolæ valeant; stat ferrea turris ad auras :
Tisiphoneque sedens, pallà succincta cruentâ,
Vestibulum exsomnis servat noctesque diesque.
Hinc exaudiri gemitus et sæva sonare
Verhera; tum stridor ferri, tractæque catenæ,

catence.

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L'impatiente sibylle ne doit pas d'elle-même arrêter la marche vers l'Élysée. Pour amener la description du Tartare, Virgile suppose qu'elle répond aux questions pressantes du héros épouvanté, quæ scelerum facies? 6 virgo, effare, quibus pænis...? quis tantus plangor...? Et cet effroi si fortement exprimé, constitit, strepitum exterritus hausit, n'étonne pas, après ces deux vers, dont l'harmonie s'accorde si bien avec chaque genre de bruit ou de supplice, hinc exaudiri..., sæva sonare verbera, tùm stridor ferri tractaque Les premières paroles de la sibylle nous apprennent comment elle peut faire la description de ces lieux impénétrables aux mortels, me..., Hecate...,ipsa..., per omnia duxit.—La joie du crime caché sur la terre, apud Superos furto lætatus inani, fait ressortir la justice des châtiments qui l'attendent dans les enfers, distulit in seram... mortem. Lorsque, après le jugement, Tisiphone s'empare du méchant, quel mouvement, quel feu dans ce tableau, continuò, accincta, flagello quatit, insultans, sinistra intentans, torvos angues! Elle appelle ses sœurs, vocat agmina sæva sororum, et vous entendez alors s'ouvrir, avec un bruit épouvantable, les portes du Tartare, où le coupable est enfin précipité, tum demum, horrisono, stridentes, cardine sacræ...

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L'image de Tisiphone, remise sous nos yeux, cernis custodia qualis vestibulo sedeat..., aide à concevoir le monstre plus horrible encore, qui veille à la garde de l'intérieur, et qu'Énée ne peut voir, quinquaginta atris immanis hiatibus Hydra sævior: à compter de ce vers, dont chaque mot et l'harmonie épouvantent, nous ne voyons plus qu'une suite d'idées ou d'images aussi effroyables que gigantesques. La profondeur du Tartare est admirablement

Constitit Æneas, strepitumque exterritus hausit.
Quæ scelerum facies? o virgo, effare; quibusve
Urgentur pœnis? quis tantus plangor ad auras ? »
Tum vates sic orsa loqui: «Dux inclyte Teucrûm,
Nulli fas casto sceleratum insistere limen;
Sed me, quum lucis Hecate præfecit Avernis,
Ipsa Deûm pœnas docuit, perque omnia duxit.
Gnosius hæc Rhadamanthus habet durissima regna;
Castigatque auditque dolos, subigitque fateri
Quæ quis apud Superos, furto lætatus inani,
Distulit in seram commissa piacula mortem.
Continuò sontes ultrix accincta flagello
Tisiphone quatit insultans, torvosque sinistrâ
Intentans angues, vocat agmina sæva sororum.
Tum demum horrisono stridentes cardine sacræ

Panduntur porte. Cernis custodia qualis
Vestibulo sedeat? facies quæ limina servet?
Quinquaginta atris immanis hiatibus Hydr

figurée par l'opposition de ces deux vers, dont le premier semble nous faire descendre jusqu'au fond de ses abîmes, bis patet in præceps tantùm, tenditque sub umbras, et le second nous faire remonter jusqu'aux limites des régions supérieures, quantus ad æthereum cœli suspectus Olympum. - A chaque tableau qu'Énée ne voit pas, la sibylle a soin de répéter, hic et Aloidas vidi..., vidi et Salmonea..., nec non et Tityon cernere erat. Et qu'a-t-elle vu dans le Tartare? Ce sont les Titans, genus antiquum terræ.......; ce sont les fils d'Alous, dont la taille, la force et l'entreprise étonnent l'imagination, immania corpora, manibus magnum rescindere cælum..., Jovemque... Les tableaux suivants demandent toute notre attention.

Les deux premiers vers présentent le supplice de Salmonée, crudelés dantem pœnas, et son crime dont la sibylle indignée fait aussitôt le récit. Les éclairs et le tonnerre qu'il prétendait imiter, flammas Jovis, sonitus Olympi, se retracent d'abord aux yeux dans ces trois vers, quattuor hic invectus equis.., où lampada quassans devient l'image principale; ensuite à l'oreille, dans ceux-ci, demens, qui... ære... Admirez le tableau de la marche triomphale, et ce délire de l'impudence d'un mortel, Divúmque sibi poscebat honorem, si bien caractérisé par ce mouvement, demens..., et par le contraste du véritable tonnerre, nimbos et non imitabile fulmen, avec ce tonnerre de Salmonée, que le sens et le rapprochement des mots, are, cornipedum, pulsu, equorum, exprime et rabaisse, autant que l'harmonie du vers en fait sentir le vain bruit. Mais lorsque Jupiter paraît, voyez sa toutepuissance, at pater omnipotens, la place du vrai dieu foudroyant, densa inter nubila, et après telum contorsit, le sourire de l'indi

Sævior intus habet sedem. Tum Tartarus ipse
Bis patet in præceps tantùm, tenditque sub umbras,
Quantus ad æthereum cœli suspectus Olympum.
Hic genus antiquum Terræ, Titania pubes,
Fulmine dejecti, fundo volvuntur in imo.
Hic et Aloidas geminos, immania vidi
Corpora, qui manibus magnum rescindere cœlum
Aggressi, superisque Jovem detrudere regnis.
Vidi et crudeles dantem Salmonea pœnas,
Dum flammas Jovis et sonitus imitatur Olympi :
Quattuor hic invectus equis et lampada quassans,
Per Graiûm populos mediæque per Elidis urbem
Ibat ovans, Divûmque sibi poscebat honorem,
Demens! qui nimbos et non imitabile fulmen
Ære et cornipedum pulsu simulârat equornm,
At pater omnipotens densa inter nubila telum

gnation dans chacun de ces mots, non ille, faces, nec fumea, tædis; enfin la satisfaction complète de la vengeance, præcipitemque immani turbine adegit. Dans les mouvements, dans ce ton d'emphase et d'ironie, dans chaque détail, ne sentons-nous pas l'indignation qui transporte la sibylle, au souvenir de tant d'audace? Tota joint à novem jugera, et le rejet de porrigitur peignent la grandeur de Titye et le terrain qu'il couvre de son corps immense. Suivez les détails de la description: d'abord le bourreau et l'instrument du supplice, vultur immanis, rostro obunco; ensuite le supplice même : tundens exprime les coups de bec; rimatur epulis, le travail du vautour cherchant sa nourriture dans le foie et les entrailles; habitat sub alto pectore, l'espace creusé et la demeure qu'il s'est faite en rongeant : chaque détail fait frémir; mais ce qui achève l'expression du tableau, c'est l'idée jointe aux traits principaux, que ce supplice ne finira jamais, immortale jecur, fecundaque pœnis viscera, idée sur laquelle en terminant l'esprit s'arrête, nec fibris requies datur ulla, renatis.

Afin de ne pas multiplier ses tableaux, Virgile réunit en un seul quelques supplices fameux des enfers, au risque de ne pas s'accorder entièrement avec les traditions de la fable sur Ixion et Pirithous. Chaque mot de la seconde partie, lucent genialibus toris, aurea fulcra, regifico luxu..., offrent d'abord l'éclat et la magnificence d'un festin somptueux; ces détails irritent la faim; et aussitôt paraît l'effroyable furie, furiarum maxima...; remarquez le mouvement et les images du dernier vers, exsurgitque, facem attollens, atque intonat ore.

Jusqu'ici nous ne voyons dans le Tartare que des ennemis des Dieux mêmes. Les crimes et les châtiments ordinaires des autres mortels vont compléter le récit. Comme, après les tableaux

Contorsit, non ille faces, nec fumea tædis
Lumina, præcipitemque immani turbine adegit.
Nec non et Tityon, Terræ omniparentis alumnum,
Cernere erat; per tota novem cui jugera corpus
Porrigitur; rostroque immanis vultur obunco
Immortale jecur tundens, fecundaque pœnis
Viscera, rimaturque epulis, habitatque sub alto
Pectore; nec fibris requies datur ulla renatis.
Quid memorem Lapithas, Ixiona, Pirithoumque,
Quos super atra silex jamjam lapsura cadentique
Imminet assimilis! Lucent genialibus altis
Aurea fulcra toris, epulæque ante ora paratæ
Regifico luxu: Furiarum maxima juxtà

Accubat, et manibus prohibet contingere mensas,
Exsurgitque facem attollens, atque intonat ore,

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