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teaubriand glorifiait le christianisme', il n'ignorait pas non plus les faiblesses de son immortelle histoire; mais ont-elles un seul instant fait hésiter sa plume?

Après avoir tracé avec probité le tableau des faits, en historien fidèle nous devons ajouter que toutes les sectes ont pris une égale part à ce grand mouvement intellectuel : dans son infinie sagesse, Dieu, le Seigneur des sciences, comme l'appelle l'Écriture, les épancha avec une égale abondance sur le front de chacun de ses enfants. Au Moyen âge, l'islamisme et la chrétienté s'enflamment du même zèle pour leur avancement; et après la grande réforme de Luther, elles furent toujours cultivées avec un égal éclat dans le camp de Genève et dans celui de Rome. Si la science catholique peut se glorifier de compter dans ses rangs les Copernic, les Galilée, les Buffon, les Vésale, les Tournefort, les Jussieu, les Laplace; c'est dans le sein de la religion réformée que nous voyons naître les Kepler, les Gesner, les Bernouilli, les Boerhaave, les Albinus, les Musschenbroek, les Harvey, les Newton, les Leibnitz, les Euler, les Linné, les Davy et les Cuvier!

1. CHATEAUBRIAND. Génie du christianisme.

2. Comp. CHATEAUBRIAND. Analyse raisonnée de l'histoire de France. Paris, 1832, t. III.

3. Rois, l. I.

CHAPITRE III.

ÉCOLE BYZANTINE.

Les troubles incessants qui bouleversèrent l'Europe au moment où l'empire romain disparaissait, engagèrent les savants à chercher un asile sur les rivages du Bosphore, où ils formèrent le noyau de l'école dont nous allons nous occuper. Mais là, ni eux ni leurs successeurs n'imprimèrent une marche rapide aux connaissances humaines; car, hors une seule science qui semble ressusciter dans les murs de Byzance, tout y est frappé de stérilité. Les traditions anciennes ont disparu; les Grecs nouveaux s'efforcent en vain de lutter contre la puissance énervante qui les domine et les paralyse, ils ne sont plus que les infimes héritiers d'un grand nom.

Cependant, si l'on en excepte son heure suprême, Constantinople eut moins à souffrir des efforts de la barbarie que l'Europe occidentale. Les trésors de la civilisation antique s'étaient conservés dans son sein, non pas dans toute leur intégrité, car sous les successeurs de Constantin les sciences et les lettres y avaient subi de siècle en siècle une manifeste décroissance, mais il lui en restait encore de nombreux et vivants vestiges; aussi, lorsque ses murs s'écroulèrent sous les efforts de Mahomet II, les savants grecs dans leur exil purent-ils emporter un grand

nombre de livres dont ils dotèrent les lieux qui leur donnèrent asile, en y répandant le goût des travaux littéraires et de la philosophie.

Un temps peu considérable s'était à peine écoulé depuis que les sciences exilées de l'Occident étaient venues chercher un refuge dans les murs de Byzance, que déjà elles s'y trouvaient persécutées. Théodose II, orthodoxe sévère, commença à les tourmenter en bannissant de l'empire la secte des chrétiens nestoriens, parmi laquelle se trouvaient un grand nombre de gens instruits. Ceux-ci, en s'exilant, allèrent répandre leurs lumières dans l'Orient.

Justinien, quelques années plus tard, leur porta un coup non moins terrible en fermant les écoles d'Athènes et d'Alexandrie, et en dispersant ainsi les derniers interprètes de la philosophie d'Aristote et de Platon les armes des barbares avaient été moins funestes à ces institutions que ne le furent les décrets d'un empereur chrétien1!

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Léon l'Isaurien, au vin siècle, porta aux sciences une tout aussi désastreuse atteinte. Non content d'anéantir les images et les statues des temples chrétiens, il étend ses vengeances jusque sur les savants et les livres les mêmes bûchers dévorent à la fois les bibliothèques et les hommes de lettres. Sur son ordre exécrable, les moines préposés à la conservation

1. GIBBON. Histoire de la décadence et de la chute de l'empire romain. Paris, 1839, t. II, p. 59.- - SPRENGEL. Histoire de la médecine. Paris, 1815, t. II, p. 192.

2. WALCH. Histoire des hérésies, des schismes, etc. Leips., 1785. THEOPHANES. Chronographia, an x de Léon l'Isaurien. Histoire du moyen âge. Paris, 1843, t. I, p. 277.

GAILLARDIN.

des livres de Sainte-Sophie périssent dans les flammes avec leur trésor composé de trente-trois mille volumes. Les iconoclastes continuèrent longtemps leur œuvre de destruction, et vers la fin du siècle où celle-ci s'était manifestée pour la première fois, elle éprouva même une sorte de recrudescence. A la voix de Constantin Copronyme, des églises et des abbayes célèbres deviennent des casernes de soldats : les unes s'écroulent, d'autres s'encombrent de fumier! Les moines ont le triste privilége d'une persécution encore plus raffinée que précédemment on les noie, on leur crève les yeux, on les déchire à coups de fouet'. Alors l'empire d'Orient, ce fragment dégénéré du trône des Césars, est sous le joug du despotisme asiatique et de la licence la plus effrénée. On néglige les travaux intellectuels, et les disputes religieuses deviennent pour les habitants de Byzance les affaires dominantes de l'époque 3.

Cependant, après quelques années de persécution et de torpeur, le génie des lettres se réveilla dans les murs de Byzance, riche encore des débris de la science antique. Aux persécutions de Léon l'Isaurien succédèrent les encouragements d'un prince éclairé, Constantin Porphyrogénète, qui se plut à entourer son trône d'hommes instruits et à reconstituer les

1. Constantini Manassis compendium chronicon.

2. GAILLARDIN. Histoire du moyen âge. Paris, 1843, t. I, p. 333.-MAINBOURG. Histoire des iconoclastes. SPANHEIM. Historia imaginum re

stituta.

3. GIBBON. Histoire de la décadence et de la chute de l'empire romain. Paris, 1839, t. II, chap. XLIX. PHILARÈTE CHASLES. Études sur le moyen age. Paris, 1847.

bibliothèques anéanties par le fanatisme des iconoclastes. Cet empereur, né dans la pourpre et dont le surnom tient à cette circonstance rare alors, doit même avoir son rang parmi les hommes illustres de son temps. Doué d'un profond savoir, ce prince malheureux semble particulièrement s'être appliqué aux connaissances qui peuvent avoir une certaine utilité pour l'homme. Les sciences trouvent ellesmêmes quelque chose à glaner dans une de ses productions on y rencontre plusieurs renseignements intéressants sur les provinces placées sous sa domi

nation 1.

Malgré sa faiblesse et ses désastres, les lettres et les sciences ne périrent pas tout à fait autour du trône vacillant de l'empire d'Orient, et, jusqu'au XVe siècle, Byzance continue d'être un foyer d'où se propagent de temps à autre quelques connaissances utiles. Cependant on reconnaît que l'esprit romain s'était évidemment énervé sur les rivages du Bosphore; aussi les savants byzantins se transformentils en simples compilateurs : n'ajoutant presque rien aux connaissances que l'antiquité leur a transmises, ils se contentent souvent de résumer les écrits de leurs prédécesseurs en ne les enrichissant nullement de leur propre fonds 2.

Cependant deux médecins célèbres, Alexandre de Tralles et Paul d'Égine, sont venus ajouter un cer

1. CONSTANTIN PORPHYROGÉNÈTE. De administratione imperii. Lugd. Bat., 1717.

2. CUVIER. Histoire des sciences naturelles. Paris, 1841, t. I, p. 369. HOEFER. Histoire de la chimie, t. I, p. 293.

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