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nitivement abouti à un morcellement déplorable. Les travailleurs, s'enfermant dans leurs cadres particuliers, s'y livrent à des minuties sans fin ; et, ne tardant pas à se persuader, chacun en particulier, que le point qu'ils étudient doit absorber tous les autres, finissent par se priver des éclaircissements réciproques qui doivent résulter d'une préparation systématique. On étudie à part autant d'anatomies qu'il y a d'applications distinctes de celte partie de la biologie; on en fait autant pour la physiologie, et le domaine est ainsi dépecé en stériles fragments. Si la systématisation de l'art médical est aujourd'hui chose impossible, il ne saurait en être de même de la biologie théorique. Il faut qu'on se décide à n'apprendre qu'une anatomie, qu'une physiologie, embrassant toutes les fractions encore isolées, de telle sorte que la science puisse enfin accomplir son rôle philosophique, et présenter une large base d'application.

D'après une conception philosophique de M. de Blainville (1), tout être vivant peut être étudié dans tous ses phénomènes sous deux rapports fondamentaux: sous le rapport statique, et sous le rap

(1) Principes généraux d'anatomie comparée (voy. l'introduction). Paris 1822, in-8°.

port dynamique, c'est-à-dire comme apte à agir et comine agissant effectivement. D'après ce principe, applicable à l'étude de tout être actif, la biologie se divise nettement en biologie statique et biologie dynamique. Mais l'être vivant ne saurait être entièrement conçu si on ne l'envisage pas dans ses rapports avec le monde extérieur. L'importance de ce dernier point de vue, si bien sentie par M. de Blainville, mais seulement envisagée, par cet éminent biologiste, relativement à la physiologie, doit donner lieu à une rectification essentielle. Il est tout d'abord évident que l'étude des milieux dans lesquels vivent les êtres organisés doit précéder celle de ces êtres eux-mêmes, c'està-dire qu'il faut procéder de l'extérieur à l'être vivant. Mais, pour arriver à l'appréciation des rapports, il faut préalablement avoir examiné les deux termes, l'être vivant et le modificateur. Je pense donc que l'étude des influences réciproques doit arriver après l'étude complète de l'homme, et non entre l'anatomie et la physiologie, comme dans l'ouvrage de M. de Blainville. Je dois, en outre, remarquer que cette étude des influences réciproques comprend également la considération du double point de vue statique et dyna

mique. Cette nouvelle manière de coordonner la science me paraît la plus propre à embrasser l'ensemble des phénomènes, et la seule capable de préparer l'esprit à l'étude des phénomènes sociologiques, terme des études sur la vie. Il y a donc deux manières d'étudier les êtres vivants: ou bien on les envisage isolément tout en subordonnant cette étude à la notion des lois générales, ou bien ils sont étudiés dans leur rapport avec le monde extérieur. Du premier point de vue doit résulter la notion d'organisme et de vie; du second on doit, par la relation des deux termes, arriver à la détermination d'un rapport.

L'ordre à suivre dans chaque section de la biologie devant être assujetti aux principes de la loi de classement, on doit tout d'abord concevoir la subordination de l'animalité à la végétalité; et, en anatomie comme en physiologie, il faudra reconnaître la stricte obligation de commencer, pour les animaux, par les organes de la vie végétative, principe qui n'est bien senti aujourd'hui que par quelques physiologistes, tandis que dans tous nos ouvrages d'anatomie c'est encore par l'examen des organes les plus spéciaux qu'on introduit les jeunes intelligences dans la biologie.

Cette déplorable aberration de méthode, entretenue depuis longtemps par les classificateurs et les chirurgiens, s'opposerait de plus en plus à la vraie conception de l'organisme, si on n'y portait un prompt remède. Les zootomistes devraient au moins se laisser influencer par les bonnes inspirations des praticiens médicaux, qui depuis longtemps ont reconnu la subordination générale de l'organisme aux divers états pathologiques de l'intestin. Qu'ils reconnaissent donc, comme les physiologistes, comme les médecins, la plus grande généralité des organes de la vie végétative, et la nécessité de commencer l'anatomie par l'étude de ces organes. On ne cesse de répéter, à propos de l'anatomie de l'homme, que le squelette est la charpente du corps humain, et que, par conséquent, c'est par le squelette qu'il faut commencer pour comprendre l'ensemble de l'édifice. A coup sûr, jamais comparaison n'a été plus irrationnelle. La charpente d'un navire nous donne une très-bonne idée de sa structure, de même que la charpente d'une voûte nous fait comprendre cette voûte ellemême; mais dire que le squelette du corps humain fait concevoir l'anatomie de l'homme, c'est accréditer une très-fâcheuse erreur. Certes, si la

notion d'organisme et de vie était aujourd'hui pleinement établie, il serait indifférent de conclure à un organisme par l'une quelconque de ses par'ties, et encore dans l'enseignement y aurait-il toujours lieu à procéder d'une manière philosophique; mais il s'agit précisément aujourd'hui de faire comprendre l'organisme à ceux qui semblent le plus l'étudier, il serait donc absurde de repousser indéfiniment la seule chance de constituer solidement la statique des êtres vivants. Ce vice de méthode frappe davantage dans les traités d'anatomie comparée, etfil y est plus inexcusable; car le tableau général des êtres vivants, mieux que l'étude spéciale d'une espèce, était de nature à démontrer rigoureusement cette subordination. Il est vrai de dire qu'un grand nombre de travaux d'anatomie comparée n'ont été exécutés que pour satisfaire simplement à de puériles exigences de classifications, et que souvent le point de vue comparatif y était extrêmement restreint. Je montrerai plus nettement, à propos de l'histoire de ce procédé, la singulière situation actuelle de cette partie de la biologie.

Quelque rigueur qu'on mette dans l'application de la loi de classement à la coordination générale

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