Jamais tu n'entreras dans les villes célèbres Tout ruisselant d'amour, de grâce et de beauté, Versant sur les pécheurs, de tes beaux grands yeux calmes, Jamais les affligés, les filles orphelines, Et jamais dans ton ciel d'yeux et d'ailes de flammes O millions de lys et de roses! les âmes Dont ta bouche en baisers aurait changé les pleurs!... Oui, pleure, dieu tombé! Ta vie est révolue. Pleure le paradis fermé, dont tu fus l'hôte. Vois! ta chute a brisé ton divin diadème! Courbant ma tête, hélas! désespérée et vieille, Du fond de la vallée adorable et vermeille J'entends venir à moi, comme un grand vent qui gronde, Les râles, les sanglots, les blasphèmes d'horreur Et les longs cris de mort du misérable monde A qui j'avais rêvé de donner un Sauveur ! REQUIESCAT Interroge les sphinx, va combattre les guivres N'entends-tu pas le choc des glaives et les cuivres Sonnant la charge aux cœurs par la gloire attendus? Que de cerveaux fêlés et de crânes fendus! Je n'ai rien de commun avec ces brutes ivres. Mes yeux se sont brûlés à fixer le soleil. Des corbeaux furieux viennent, dans mon sommeil, Plonger leur bec goulu dans mon vieux corps sans âme. Mais rien ne me torture autant que les efforts 474281 LA PENSÉE L'ange noir m'a tendu la coupe d'onyx noir Pensée, acre poison, rongeur des énergies, Quelle odeur de cadavre en cet horrible vin! J'ai vu. J'ai lu. J'ai su. Je sais que tout est vain. Tous les plaisirs pour moi meurent avant de naître. Qu'importent les printemps à mon âme d'hiver DIALOGUE L'être d'ironie et de haine Qui pour cible a choisi mon cœur, « Cet enfant tout en fleur d'enfance, Divin de joie et de santé, Qui t'adore sans méfiance, -A son abandon simple et tendre, Que répondent tes lèvres lasses, Veuves de tant de baisers morts, Et qui bleuissent de leurs glaces Les lèvres fraîches que tu mords? |