Puissant Erôs, dieu du Désir, Ton haleine ébranle les mondes, Du sein des caresses fécondes. O fleur suprême de la chair, C'est par toi que l'âme ravie Pour prendre un corps quitte l'éther. Et c'est aussi par ta puissance Que les esprits inférieurs Montent vers les mondes meilleurs De délivrance en délivrance. Pourquoi donc sur ta lèvre en feu La terre en est tout arrosée, L'Amour travaille pour la Mort. Et jamais sous les cieux moroses GANYMEDE Comme le bel enfant marchait nu, rose et leste Fond jusqu'à ses yeux bleus, qui se mouillent de pleurs. Cher jeune homme, dit-il, tes chairs éblouissantes Ne crains pas, doux ami, l'orage de mes ailes Au séjour lumineux des formes idéales L'ÉGLISE Me voilà dans l'église. Elle est énorme et sombre, O ténèbres! ô nuit de pourpre! ô nef immense! Une rumeur : des pleurs, des sanglots et des râles S'élèvent lentement et formidablement... Voici des hurlements horribles, par rafales... Puis, la clameur s'éteint, longuement, sourdement... Je frissonne!... On dirait que quelque chose bouge Sur les sombres piliers et reluit en passant. Y mettrai-je la main? Horreur! ma main est rouge! Elle est toute mouillée! Elle est pleine de sang! L'église est toute en viande et saigne à larges gouttes. Le sang filtre partout, il coule en longs ruisseaux, Vivant, rouge et fumant, du haut des rouges voûtes, Le long des lourds piliers et des sombres vitraux. L'église rouge, on l'a construite en chair humaine. |