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correspond à la cloison du nez dans le premier cas, à l'une des narines dans le second. Cette variété constitue le bec-de-lièvre simple et médian, ou simple et latéral. Le premier s'observe rarement; Moscati est le seul qui cite un cas de bec-de-lièvre médian unique. Le second est le plus commun; tantôt il existe deux fentes correspondantes à chaque narine, et dans l'intervalle on observe un lobule charnu plus ou moins long, adhérent à la sous-cloison du nez: c'est le bec-de-lièvre latéral double, qui, comme l'a vu Lafaye, coïncide quelquefois avec un median unique. Dans quelques cas, ces deux fentes comprennent jusqu'aux parties osseuses; l'os incisif reste suspendu à l'extrémité antérieure du vomer, isolé complétement des deux os maxillaires supérieurs. D'autres fois cet os incisif n'est séparé que de l'un de ces os. Le bec-de-lièvre congénial, surtout le double, existe rarement seul; il s'y joint ordinairement quelque autre vice de conformation (cette coïncidence est étrangère aux becs-de-lièvre traumatique ou accidentel). Souvent les deux moitiés de la voûte palatine restent écartées soit dans toute l'étendue, soit à la partie antérieure seulement, ou encore à la partie postérieure. La cloison reste toujours fixée à l'un des maxillaires et au palatin correspondant. On cite l'observation d'un enfant affecté de bec-de-lièvre, et chez lequel n'existaient ni le lobe médian de la lèvre, ni l'os incisif, ni la cloison. Quelquefois la luette et le voile du palais sont aussi partagés en deux moitiés symétriques.

Le bec-de-lièvre congénial se complique encore quelquefois de la saillie que forme en avant l'os incisif et les dents qu'il supporte. Ces parties sont poussées dans ce sens par la pression que la langue exerce sur elles de dedans en dehors, pression qui n'est pas contre-balancée par la présence et la résistance de la lèvre.

Les fentes qui séparent la lèvre en plusieurs parties peuvent n'avoir que quelques lignes d'étendue ou s'élever jusqu'à la base du nez. Leurs bords sont arrondis; ils sont recouverts par une pellicule vermeille, semblable à celle qui revêt le bord libre des lèvres. L'intervalle qui les sépare a toujours une forme triangulaire, et leur écartement est d'autant plus grand que la division s'étend plus haut. Cet écartement ne suppose pas une perte de

substance; il est l'effet de l'action musculaire, ainsi que l'a démontré Louis, et comme l'avaient déjà entrevu Franco et A. Paré. I augmente pendant la contraction des muscles diducteurs, quand les malades rient ou poussent des cris,

Lorsque le bec-de-lièvre est latéral double, le lobule intermédiaire formé par un prolongement cutané et muqueux, et par les muscles naso-labiaux, est plus ou moins long; il est souvent sphéroïde, parce que les tissus, privés de soutien en bas, se sont relevés jusque sous le nez.

Les deux portions de la lèvre adhèrent souvent avec beaucoup de force à l'arcade alvéolaire. Le bec-de-lièvre congénial n'attaque jamais la lèvre inférieure; du moins les exemples cités dans les Ephémérides des curieux de la Nature, et par M. Nicati, ne sont pas assez authentiques pour constituer une exception.

Lorsque le bec-de-lièvre est simple, il constitue seulement une difformité; mais quand il se complique de la communication entre les cavités buccale et nasale, la succion devient très difficile, impossible même. Les enfants, ne pouvant prendre la nourriture nécessaire à leur accroissement, sont exposés à périr. Ces cas sont assez rares; mais les enfants affectés de bec-de-lièvre, même lorsqu'il est simple, n'apprennent à parler qu'avec beaucoup de peine; le timbre de leur voix est altéré; ils éprouvent de grandes difficultés dans l'articulation des sons. Ce vice de conformation ôte encore à ceux qui en sont affectés la faculté de siffler, de jouer des instruments à vent. Cet exposé succinct des effets du bec-du-lièvre congénial suffit pour établir la nécessité d'entreprendre sa guérison.

Traitement. L'indication curative est évidente et simple: c'est la réunion. On l'obtient en avivant les bords de la division, transformant chacun d'eux en une surface saignante, les mettant et les tenant dans un contact exact et suffisamment prolongé pour leur mutuelle adhésion. Il faut préalablement écarter et faire cesser les complications qui pourraient gêner le travail de la réunion. Mais doit-on entreprendre la guérison du bec-delièvre aussitôt après la naissance, ou faut-il attendre un àge plus avancé? C'est d'abord cette question que nous devons examiner. Sharp, Roonhuysen, Bush, Ledran, Muys, B. Bell et beaucoup d'autres praticiens ont répondu affirmativement; ils pré

tendent que la structure éminemment vasculaire des lèvres est une condition très favorable à une prompte réunion. Bush a développé cet argument avec beaucoup de détails; Sabatier y insiste également. Mais la grande vascularité des lèvres chez l'enfant nouveau-né serait peut-être une contre-indication; elle favorise, en effet, ces hémorrhagies si insidieuses par la partie postérieure de la plaie, hémorrhagies dont le produit s'écoule inaperçu et est porté dans les voies digestives par un mouvement de succion qui l'entretient. J.-L. Petit, Louis et Bichat ont sigalé des cas où cet accident a été suivi de la mort; on l'a observé il y a quelques années dans l'un des hôpitaux de Paris. Les enfants qui viennent de naître n'ont pas encore acquis, dit-on, l'habitude des mouvements de succion; ils ne sont pas susceptibles d'éprouver une foule d'impressions qui les provoquent à rire ou à pleurer; ils sont presque toujours endormis, et l'on peut encore seconder cette tendance au sommeil par l'administration d'un léger narcotique (Bush), ou en la contrariant quelque temps avant l'opération (Roonhuysen).

Ces arguments n'ont pas tous une égale valeur: aussi presque tous les chirurgiens de nos jours, à l'exemple de Garengeot et de Dionis, professent qu'on ne doit opérer le bec-de-lièvre que quand les enfants ont atteint l'âge de trois ou quatre ans, quand ils sont assez raisonnables pour désirer leur guérison, et pour sentir que leurs cris l'empêcheraient. A cet âge, les enfants peuvent avaler des liquides sans aucun mouvement des lèvres; le tissu de ces organes est encore assez extensible, et il a plus de solidité; il peut supporter plus facilement et plus longtemps la présence des aiguilles sans se déchirer; ce qui compense, et audelà, le retard qu'offre le travail adhésif. A cet âge aussi on est moins exposé à provoquer, par une opération toujours douloureuse et par la gêne qui la suit, des accidents nerveux, des convulsions. La cicatrice n'est pas plus visible que quand on a opéré dans l'âge le plus tendre. Il est pourtant des cas où l'on doit, comme l'a fait Bush sans nécessité, opérer quatre jours ou huit jours après la naissance: c'est quand l'écartement des bords de la division rend la succion absolument impossible, quand la communication entre la bouche et les cavités nasales est tellement large, que presque tout le lait revient par le nez. Si l'on

différait l'opération, la vie du petit malade serait compromise; mais ce danger seul peut engager à pratiquer l'opération peu de jours après la naissance.

Il ne faut cependant pas attendre plus de trois ou quatre ans ; à cette époque, dès que la continuité de la lèvre est rétablie, les deux moitiés de la voûte du palais se rapprochent, elles ne tardent guère à se toucher; mais ensuite plus on temporise, plus la jonction se fait attendre. Avec le temps d'ailleurs, les bords de la division s'écartent davantage, il devient plus difficile de les mettre et de les tenir en contact. Le développement de la lèvre, quand elle est restée longtemps divisée en plusieurs parties, n'est point en proportion avec l'accroissement de la lèvre inférieure et celui du contour des mâchoires: ce fait bien constant ajoute aux difficultés de l'opération quand on la pratique dans un àge trop avancé. Lorsque l'ossification n'est pas encore complète, on peut aisément refouler en arrière l'os incisif et les dents incisives, et rendre à l'arcade alvéolaire sa régularité; on ne le pourrait que difficilement plus tard.

Il n'est généralement pas nécessaire de soumettre les enfants à un traitement préparatoire; il suffit qu'ils jouissent actuellement d'une bonne santé, qu'ils ne soient affectés ni de coryza, ni d'angine, ni de coqueluche. La toux, l'éternument, nuiraient beaucoup au travail de la cicatrisation.

Quand il existe beaucoup d'écartement entre les bords de la division, on peut quelques jours avant l'opération appliquer un bandage unissant, afin d'habituer les parties à l'état de gêne qu'elles devront éprouver pendant le travail de la réunion. Lorsque les os incisifs et les dents qu'ils supportent font une saillie en avant, il faut avant d'opérer faire disparaître cette complication. On a conseillé l'extraction des dents déplacées et l'ablation des portions osseuses à l'aide de tenailles tranchantes. L'arrachement des dents est presque sans conséquence avant l'époque de la deuxième dentition; il vaut cependant mieux chercher à rétablir leur niveau, en employant des fils de soie ou de métal qu'on attache sur les dents voisines. L'extraction des os incisifs a des inconvénients bien plus graves à sa suite; le bord alvéolaire se rétrécit, les dents des deux mâchoires cessent de se correspondre, et la mastication s'en trouve gênée. Or, comme ces os, presque

tout-à-fait isolés en bas, faiblement attachés en haut, cèdent facilement à la compression qui les repousse en arrière, il vaut mieux d'abord employer ce moyen, ainsi que l'a souvent fait Desault avec succès, parce qu'en cas de non-réussite, il est toujours temps ensuite de procéder à d'autres opérations. Celles-ci consistent ou bien à fracturer le pédicule des deux os incisifs au niveau de leur articulation avec l'extrémité du vomer, et à les replacer entre les os maxillaires sur un plan parallèle à celui de l'arcade dentaire, ainsi que M. Gensoul de Lyon l'a fait avec succès; ou mieux encore à exciser, comme le recommande M. Blandin (1), en arrière et au-dessus des os incisifs, un morceau triangulaire de la cloison des fosses nasales, morceau dont la base serait tournée en bas, et dont le sommet dirigé en haut irait à peu près jusqu'au dos du nez. Cette excision doit, suivant l'âge des opérés, être pratiquée avec de forts ciseaux ou avec des pinces incisives; quand elle est faite, elle permet de refouler en arrière la saillie formée par les os incisifs, et de placer leur bord antérieur au niveau du reste de l'arcade dentaire, où on les fixe à l'aide d'un fil qui prend son point d'appui sur les dents voisines. Enfin, dans un cas où la saillie formée par le tubercule osseux médian était peu considérable, Dupuytren se borna à en réséquer tout ce qui dépassait en avant l'arcade dentaire, et réunit les deux côtés de la lèvre par-dessus.

Ce n'est que quand on a calmé l'irritation que provoquent ces diverses opérations préalables qu'on peut songer à aviver les bords de la division.

On a dès longtemps renoncé à l'usage du cautère actuel ou des caustiques liquides pour remplir cette indication. Thévenin touchait la surface arrondie des bords de la division avec un pinceau trempé dans du beurre d'antimoine. Il attendait, pour réunir, la chute des escarres et le développement des bourgeons charnus. Fabrice d'Aquapendente coupait les parties avec un couteau de bois dur trempé dans l'eau régale; d'autres se servaient d'un couteau rougi au feu; d'autres enfin couvraient les parties à affronter avec une substance vésicante. Ce dernier moyen a l'inconvénient de laisser aux surfaces leur forme arrondie, ce qui empêche leur union régulière; il partage avec les autres celui (1) Dictionnaire de méd. et de chirurg. pratiques, t. IV, p. 44.

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