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Pline dit la même chose. Columelle donne aussi cette recette: il prétend que les cheveux de femme, étant brûlés, produisent le même effet.

Voici l'explication des mots qui composent cette recette contre les maladies des troupeaux. Amurca est la lie de l'huile. Les anciens en faisaient un grand usage en médecine. On peut lire dans Dioscoride l'énumération de toutes les vertus qu'on lui attribuait. Spumas argenti n'est point le vif-argent, comme quelques traducteurs l'ont prétendu ; c'est l'écume de l'argent qu'on épure. Scilla, ou l'oignon de mer, est une plante bulbeuse, qui ressemble à un oignon, mais qui est beaucoup plus grosse. L'ellébore est blanc ou noir: on se sert de l'ellébore blanc pour les maladies de la peau. Le bitume est une substance grasse, sulfureuse, tenace et inflammable, qui sort de la terre ou qui flotte sur l'eau.

58 Art connu, dans le nord, de ces peuples guerriers Qui rougissent leur lait du sang de leurs coursiers.

Ces peuples étaient les Bisaltes, nation de Macédoine; les Gètes, qui habitaient près du Danube; les Gélons, que les uns ont placés dans la Thrace, d'autres dans la Scythie. La Motraye, dans ses Voyages, nous apprend que les peuples qui habitent maintenant ce qu'on appelait les déserts des Gètes, et plusieurs autres hordes tartares, vivent encore de la même manière; qu'un de ses guides, après avoir long-temps erré dans ces déserts, saigna son cheval et but son sang. 59 Timave, Noricie, ô lieux jadis si beaux!...

La Noricie est une partie de la Bavière; l'Iapidie est le Frioul ou la Carniole. Le Timave est un petit fleuve du Frioul, qui va se jeter dans la mer Adriatique. Virgile, dans cette description d'une peste, avait sûrement en vue celle qui ravagea l'Attique, et dont on trouve la description dans Thucydide et dans Lucrèce. Plusieurs de ses observations, et même de ses expressions, sont empruntées de ces auteurs; mais il ne faut pas en conclure que cette peste soit la même que celle qu'ils ont décrite. 1o Virgile la place dans un pays différent; 2o la peste de l'Attique attaqua à la fois les hommes et les animaux, tandis que, dans Virgile, les hommes sont préservés de ce fléau.

60 Et d'une horrible toux les accès violens

Étouffent l'animal qui s'engraisse de glands.

Les cochons sont sujets à l'esquinancie; ce qui augmente la vérité

TAYLOR

de l'expression angit, car cette maladie se nomme en latin angina.

61 Mais, ses forces bientôt se changeant en fureur,

O ciel! loin des Romains ces transports pleins d'horreur!

L'animal frénétique, à son heure dernière,

Tournait contre lui-même une dent meurtrière.

Pour bien comprendre le second de ces quatre vers, il faut se rappeler que Virgile écrivait après les guerres civiles,

Où Rome de ses mains déchirait ses entrailles.

62 Voyez-vous le taureau, fumant sous l'aiguillon...

Virgile a bien senti qu'il ne suffisait pas de décrire avec énergie, comme l'a fait Lucrèce, les symptômes de la peste : il a su intéresser pour les animaux qui en sont les victimes; et c'est en quoi il est infiniment supérieur à Lucrèce.

63 Hélas! que leur servit de sillonner nos plaines?...

Cet endroit plaisait tellement à Scaliger, qu'il aurait mieux aimé, disait-il, en être l'auteur, que d'être le favori du plus grand roi de l'univers. On reconnaît là son enthousiasme pour Virgile, qu'il mettait fort au-dessus d'Homère.

64 L'art vaincu cède au mal...

Il y a dans le texte, Philly rides Chiron, Amythaoniusque Melampus. Chiron, précepteur d'Achille, était fils de Phillyre; Mélampus était fils d'Amythaon: ils représentent ici tous les médecins en général. Sacer ignis, c'est le nom de la maladie contagieuse dont il s'agit: nous l'appelons vulgairement le feu Saint-Antoine. On peut comparer cette peste avec celle que décrit Lucrèce, dont M. de La Grange nous a donné une excellente traduction en prose *.

* Et tout récemment M. de Pongerville, en vers.

NOTES

DU LIVRE IV.

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Progné, sanglante encor du meurtre de son fils.

L'hirondelle porte des marques rouges sur la poitrine; c'est ce qui a fait imaginer la fable de Progné.

2 Ainsi, lorsqu'au printemps, développant ses ailes,
Le nouveau roi conduit ses peuplades nouvelles...

On sait actuellement que c'est une reine et non pas un roi. Swammerdam a disséqué des mères abeilles dans le temps de leur ponte, et leur a trouvé l'ovaire rempli d'une quantité prodigieuse de petits œufs, dont plusieurs pouvaient se distinguer à la simple vue, sans le secours de la loupe. M. Maraldi les a observées dans le temps même de leur ponte, et M. de Réaumur les a surprises dans des momens plus décisifs encore.

3 Un suc plus onctueux que la gomme des bois.

C'est la propolis, nom qui lui a été donné par les anciens, et que les modernes lui ont conservé. Cette matière est différente de la cire et du miel; c'est une résine extrêmement visqueuse, d'un brun rougeâtre, qui répand communément une odeur agréable lorsqu'elle est échauffée, et qui se dissout facilement dans l'esprit de vin et l'huile de térébenthine; elle varie pour la consistance et pour la couleur, qui est plus ou moins foncée, et pour l'odeur, qui est plus ou moins aromatique. Les anciens, à qui ces différences n'avaient point échappé, reconnaissaient trois sortes de propolis, auxquelles ils avaient même donné des noms. La première, qui était noirâtre et la plus amère au goût, ils la nommaient comosis; la seconde sorte, qui avait beaucoup moins de consistance, ils l'avaient appelée pissoceros ; et ils avaient réservé le nom de propolis pour la troisième espèce, qui était moins visqueuse que les deux autres, et se rapprochait davantage de la nature de la cire. On ignore encore quels sont les plantes et les arbres qui fournis

sent cette matière aux abeilles, et jamais on n'a pu les trouver occupées à cette récolte; il paraît cependant que cette découverte ne serait point difficile à faire.

C'est à boucher les crevasses de leur habitation que les abeilles emploient communément la propolis; cependant, dans les occasions particulières, elles savent en faire un usage qui prouve l'étendue de leurs vues et les ressources de leur esprit. M. Maraldi vit un jour un gros limaçon qui eut l'imprudence d'entrer dans une ruche; aussitôt l'imbécile animal fut expédié par les mouches. Mais ce n'était point là le plus difficile: il s'agissait de transporter au dehors le cadavre, dont l'odeur aurait pu les infecter par la suite. C'était une masse énorme; toutes les forces de nos petites abeilles réunies ne pouvaient la soulever : le cas était embarrassant. Dans une circonstance aussi critique, elles eurent recours à leur propolis, dont elles masquèrent le corps de leur ennemi mort, et l'embaumèrent comme une momie.

Dans l'histoire des animaux, les faits généraux qui appartiennent à l'espèce entière, qui sont copiés fidèlement par toutes les générations qui se succèdent et qui se renouvellent perpétuellement avec une régularité invariable, ne sont pas ceux qui prouveraient le plus en faveur de leur intelligence. La régularité même de ces actions devient suspecte: on croit y entrevoir une sorte de nécessité, de mécanisme aveugle; et notre raison, qui est si changeante, si capricieuse et si déréglée, nous ne sommes point portés à la reconnaître dans des mouvemens aussi constans et dans des opérations aussi uniformes. Ce qui fait le plus d'honneur à l'industrie des animaux, ce sont, pour ainsi dire, leurs anecdotes secrètes, les faits particuliers, les évènemens rares et imprévus, qui supposent une réflexion subite, une détermination prompte; et si l'on avait un certain nombre de faits pareils, recueillis avec soin, et vérifiés avec scrupule, la fameuse question du machinisme des bêtes ne tarderait pas à être décidée.

4 Loin de là sur le feu fais rougir l'écrevisse.

Il ne faut pas faire grande attention aux conseils que Virgile donne ici. Il est à croire que le vif attachement qu'ont inspiré les abeilles a pu mettre quelquefois de l'excès et de la timidité dans les précautions que l'on a prises pour les conserver. Il est prouvé maintenant que les vapeurs du limon, toutes les odeurs fortes, celle

du fumier, de l'urine même, leur conviennent. Vraisemblablement celle des écrevisses brûlées ne leur serait pas plus funeste; cependant je n'en ai point de certitude; et il est fort étonnant qu'aucun de ceux qui ont écrit l'histoire des abeilles n'ait pris la peine de faire cette épreuve.

5 Défends à l'if impur d'ombrager leur maison.

C'est ce qu'on observe encore en Languedoc, où l'on éloigne des ruches, non seulement l'if, mais le tithymale, la jusquiame, la ciguë, et en général toutes les plantes amères et vénéneuses, dont le suc donnerait au miel une mauvaise qualité. On peut se rappeler que, dans la fameuse retraite des dix mille, les soldats grecs, ayant mangé auprès de Trébisonde une quantité de miel considérable, éprouvèrent pendant plusieurs jours les crises les plus violentes, qui les mirent aux dernières extrémités. M. de Tournefort, qui s'est transporté sur les lieux, dans ses voyages du Levant, croit avoir reconnu la plante dont les abeilles avaient tiré un miel aussi funeste. Elle est de l'espèce de celles que les botanistes appellent d'un nom bien barbare, chamarhododendron.

6 Bientôt abandonnant les ruches maternelles...

C'est un grand évènement que la sortie d'un essaim, et pour les propriétaires des mouches, dont les essaims sont le principal produit, et pour les abeilles, qui abandonnent leur patrie, leurs foyers, une ville toute bâtie, pour aller former un établissement tout nouveau dans une demeure totalement inconnue. Cet évènement s'an

nonce par plusieurs signes extraordinaires : un bourdonnement plus fort et plus continu dans l'intérieur de la ruche; l'interruption de presque tous les travaux pendant un jour ou deux qui précèdent l'émigration; et l'agitation tumultueuse des mouches qui se rassemblent en foule à la porte, s'y entassent les unes sur les autres, forment une grosse masse de groupes très épais, et semblent préluder, par tous ces mouvemens fréquens, au mouvement général qui doit ébranler une partie de la nation. Les essaims prennent l'essor en différens temps de l'année, suivant que les chaleurs sont plus ou moins fortes, le temps plus ou moins serein, les fleurs du canton plus ou moins précoces; et à différentes heures du jour, suivant que la ruche est plus ou moins exposée au midi ou au nord, au levant ou au couchant. Cependant, dans ce climat, il est rare qu'ils se dé

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