Imagens das páginas
PDF
ePub

même avancer que la belladone, les champignons vénéneux et la petite ciguë (athusa cynapium) sont les trois végétaux qui, en général, causent le plus d'empoisonnements en Europe : le premier comme fruit, le second comme aliment, et le troisième comme condiment.

Les propriétés toxiques de la belladone sont dues à un principe découvert par Brandes, et connu depuis sous le nom d'atropine, qui s'y trouve mêlé à un excès d'acide malique. De toutes les parties de la belladone, la racine est celle qui en contient le plus, puis les tiges et les feuilles ou les parties vertes, et enfin les fruits. La racine est donc la partie la plus active de la plante, et on verra plus loin que l'expérience thérapeutique paraît confirmer la vérité de cette proposition. Mais venons aux effets toxiques de la belladone, que nous ne pouvons mieux faire connaître qu'en présentant un exposé abrégé des empoisonnements qu'elle a déterminés.

Il est certain qu'un homme peut manger quelques baies de belladone sans danger.

M. Gigault, médecin à Pont-Croix (Finistère), écrivait, en 1828, à l'Académie de médecine, que, dans le

dans le pays qu'il habite, les paysans mangent souvent des baies de belladone, qu'ils appellent guignes de cótes; souvent il a vu des accidents d'empoisonnement, mais jamais ils n'ont été suivis de la mort. Voici cependant des faits

qui paraissent déposer contre cette innocuité des guignes de côtes prises à petites doses.

On lit dans Valmont de Bomare ce qui suit : « De deux jeunes gens qui, dans le jardin des plantes de Leyde, mangèrent deux ou trois de ces baies, l'un mourut le lendemain, et l'autre fut très-mal. On est d'abord attaqué d'un délire court; on fait des éclats de rire et différentes gesticulations même audacieuses, ensuite on tombe dans une véritable folie; après cela dans une stupidité semblable à celle d'une personne ivre furieuse et qui ne dort pas; enfin l'on meurt. On trouve dans le Recueil périodique de médecine, août 1739, une observation remarquable au sujet de deux jeunes filles qui furent frappées de manie et des symptômes précédents, pour avoir mangé deux à trois baies de morelle furieuse (belladone), et qu'un médecin guérit par l'usage de l'émétique en lavage ». (Dict. d'hist. nat., art. Belle-Dame, belladona ou solanum lethale seu maniacum.)

Vanswiéten rapporte aussi que quatre baies de belladone ont suffi pour causer la mort.

Boulduc rapporte que quelques enfants de Grandvaux, village à quelques lieues de Paris, entrèrent dans un jardin inculte et y mangèrent du fruit de solanum belladona ou de melanocerasum. Peu de temps après, ils eurent une fièvre violente, avec des convulsions et des battements

de cœur terribles; ils perdirent la connaissance des personnes et tombèrent dans une aliénation d'esprit. Un petit garçon de quatre ans mourut le lendemain ». (Histoire de l'Académie royale des sciences, 1703.)

En 1773, quatorze enfants de la Pitié s'empoisonnèrent au jardin des plantes de Paris en mangeant des baies de belladone. (Bulliard. Plantes vénéneuses.)

Murray parle aussi de quatre enfants empoisonnés par ces mêmes fruits. Ils furent pris d'un délire gai, de mouvements convulsifs et de vomissements. L'un d'eux eut un délire furieux avec grincements de dents. La fureur persista même après les vomissements.

Pinel rapporte l'empoisonnement de quelques enfants qui avaient mangé des baies de belladone dans la cour de la Salpêtrière. Ces petits malades étaient pris d'un délire gai, riaient, dansaient, folâtraient et faisaient divers mouvements des bras et des mains, comme pour imiter l'action de filer.

On connaît assez l'histoire de ces paysans qui mangèrent des baies de belladone en allant à l'église, et furent pris, au milieu du service divin, d'accès de gaieté les plus extravagants, se livrant à des gesticulations et à des contorsions bizarres et ridicules et à de grands éclats de rire.

M. Sarlandière rapporte l'observation d'un

tailleur qui fut, pendant vingt-quatre heures, dans un état de somnambulisme précédé d'une raideur tétanique. Cet homme fut insensible à tous les objets extérieurs et uniquement occupé à faire tous les gestes de son état de tailleur, comme s'il eût travaillé réellement; plus tard, il eut des hallucinations, parlant comme s'il eût suivi une conversation avec un interlocuteur.

Gmelin cite le fait d'un berger qui mourut dans le coma, douze heures après avoir mangé des baies de belladone.

Deux jeunes enfants, dont l'obervation a été rapportée par A. Smith, s'étant empoisonnés avec des baies de belladone, présentèrent une voix croupale.

Deux autres enfants, observés par Koestler, outre le délire ordinaire et propre à la belladone, offrirent une voix frêle et enrouée, avec aversion pour tout liquide.

Gaultier de Claubry a eu l'occasion d'observer en grand les symptômes de l'empoisonnement par les baies de belladone. Cent cinquante soldats, campés dans le bois de Pirna, près de Dresde, se jetèrent, pour étancher leur soif, sur des baies de belladone, et ne tardèrent pas à en éprouver tous les effets toxiques. Ceux qui n'en avaient mangé qu'une petite quantité avaient un délire gai, jovial; ils riaient, folâtraient, dansaient; ils avaient des hallucinations, cher

chaient à saisir sur les habits de leurs camarades des objets fantastiques, ou qui, bien entendu, n'y existaient pas. Les pupilles étaient dilatées, la vision était troublée, confuse, et les yeux hébétés ou hagards. Ceux qui en avaient mangé davantage pouvaient à peine se tenir debout; les bras et les doigts étaient agités de mouvements continuels; ils avaient des envies de vomir, des faiblesses continuelles; la langue, la bouche et le palais étaient desséchés, l'articulation des sons était confuse, quelquefois même il y avait aphonie complète; quelques-uns couraient dans les bois, agités d'un délire furieux, se jetaient dans les feux des bivouacs et se frappaient contre les arbres; leurs étaient rouges yeux et les pupilles excessivement dilatées. Enfin ceux de ces malheureux qui avaient mangé des fruits de belladone en grande quantité, furent trouvés morts au pied même des buissons qui les portaient. (Journal général de médecine, t. XLVIII.)

Un vieillard de soixante-douze ans, ayant trouvé une saveur agréable au fruit d'un pied de belladone qu'il venait de rencontrer dans un bois, eut la malheureuse idée d'en mêler une certaine quantité à la petite provision de mûres destinée à son repas. Il n'eut pas le temps d'achever ce dernier repas: foudroyé, en quelque sorte, il tomba pour ne plus se relever.

Munniks parle d'un enfant qui avait des mou

« AnteriorContinuar »