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le matin en se réveillant, que le malade s'aperçoit d'abord qu'il a devant un œil une tache noire ou un voile grisâtre, qui marque les objets. Ces troubles visuels peuvent varier. Ainsi, le brouillard qui apparaît devant l'œil est quelquefois très-peu épais, tandis que, dans d'autres cas, la cécité est tellement accentuée, que le malade peut à peine distinguer l'ombre des objets, sur le côté

externe.

Comme le décollement est presque toujours partiel, il en résulte, naturellement, un obscurcissement partiel de la vue. Quelquefois, aussi, l'objet fixé n'est visible que par moitié, mais cette même moitié de la vision conservée, est loin d'avoir la netteté normale; on voit les objets danser, trembloter, les lettres paraissent brisées et courbées. Cela tient, évidemment, aux plis que forme la rétine décollée, et qui se prolongent jusqu'à la région de la macula.

J'ai vu des malades chez lesquels le décollement rétinien s'était traduit par une déformation tellement prononcée, que toutes les personnes leur semblaient bossues.

L'acuité visuelle, chez ces malades, est habituellement, fortement atteinte, les malades ne peuvent même pas lire les plus gros caractères. Quelques-uns, cependant, distinguent des caractères assez fins en s'approchant très-près du livre et en faisant un certain effort; mais ce sont là des exceptions.

Il est un fait constant, propre à tous les décollements rétiniens, c'est que la vision est beaucoup plus trouble le soir que le jour. Dans la journée, le malade peut quelquefois lire et se conduire; le soir, au contraire, et en général dans un endroit sombre, il est complétement aveugle. Cela s'observe surtout chez les personnes qui sont atteintes d'un décollement rétinien dans les deux yeux. Nous soignons actuellement un malade atteint d'héméralopie depuis plus de 15 ans, et nous ne trouvons pas chez lui la moindre trace de rétinite pigmentaire : le décollement rétinien binoculaire, dont il est atteint, en est évidemment la cause.

Ces malades accusent aussi un certain degré de dyschromatapsie et de vision colorée. Nous avons remarqué en effet, presque toujours, qu'ils ne distinguent point les couleurs en face, tandis qu'ils les voient quelquefois par le côté. Mais ce qui est plus caractéristique, c'est que la vision devient colorée, soit en

rouge, soit en violet ou en vert. Ainsi, dès le début de la maladie, la lumière d'une lampe leur paraît verte ou violette, et pendant un certain temps tout ce qu'ils voient de l'œil malade leur apparaît à travers une atmosphère de même nuance.

Les modifications qu'on observe dans le champ visuel sont presque toujours les mêmes, c'est-à-dire que la moitié externe et inférieure est conservée, tandis que celle d'en haut et celle du dedans sont abolies. Une ligne de démarcation oblique, bien tranchée, sépare les deux champs visuels, ce qui est un signe caractéristique de la maladie.

Si on ajoute à ces symptômes, des phénomènes lumineux, des photopsies, des cercles lumineux, des scotômes scintillants, on aura un tableau complet de la maladie.

A une certaine période de cette affection, des accidents nouveaux peuvent surgir; si, au début, la vision est abolie dans le champ visuel inférieur et non supérieur, comme cela a lieu généralement, il se produit alors, au bout de quelque temps, une modification assez sensible. Le liquide épanché se déplace par son propre poids de haut en bas, et la partie droite de la rétine se trouve de nouveau adossée contre la choroïde où elle reprend sa place normale ainsi que ses fonctions, tandis que le décollement se produit vers les parties déclives, à l'endroit où le liquide s'est accumulé.

Le décollement s'étend généralement jusqu'à l'ora serrata et le cercle ciliaire; le travail morbide qui se poursuit dans cette région est peut-être la cause que, dans un certain nombre de cas, le décollement est suivi de la formation de la cataracte molle et d'accidents inflammatoires du côté de l'iris.

Graefe avait remarqué avec raison, que lorsqu'on voit apparaître chez un sujet jeune une cataracte molle qui se développe rapidement, on doit toujours soupçonner un décollement et s'assurer à l'aide des phosphènes, si les fonctions de la rétine ne sont pas abolies dans le champ visuel externe. L'iritis plus ou moins intense suivie de la déformation de la pupille, est une des complications assez fréquentes d'un décollement de la rétine.

Anatomie pathologique et étiologie. Le décollement rétinien est une maladie propre aux yeux myopes, comme on peut s'en assurer par la statistique, qui nous dit que, sur 427 décollements,

GALEZOWSKI.

- Ophthalmoscopie.

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la myopie compte pour 419 cas. Examinons maintenant quelle peut être la cause prochaine de cette affection.

Pour se rendre bien compte du processus morbide, il faut repasser toutes les conditions pathogéniques dans lesquelles la maladie a lieu. Nous savons d'abord que le décollement se produit, d'habitude, dans la partie externe de la rétine, et cela tient évidemment à la distension que subit la choroïde spécialement dans cette région, ce qui, du reste, a déjà été démontré par Graefe. La distension des vaisseaux du cercle ciliaire est suivie de l'amincissement des parois de ces vaisseaux, de la diminution de leur contractilité, d'où les stases veineuses qui prédisposent à la transsudation séreuse. L'épanchement séreux est, en effet, la première condition du décollement, il survient brusquement, comme tous les épanchements observés dans les péricardites, les pleurésies, l'hydarthrose du genou, etc.

Mais le symptôme qui précède l'épanchement, c'est le ramollissement du corps vitré. Cette altération se produit lentement dans les yeux myopes, à cause, sans doute, de la dénutrition. Donc, le corps vitré se liquéfie, devient aqueux, l'iris devient tremblottant, la densité du globe diminue, et il suffit alors qu'un épanchement séreux ait lieu, pour que la rétine se détache de la choroïde et devienne flottante.

Ce mécanisme ne nous paraît point douteux, et tout semble le confirmer. Nous avons vu quelques cas de décollement fort rares, il est vrai, et plus rares encore dans les yeux myopes que dans les yeux hypermétropes, où le corps vitré avait conservé toute sa densité. Il se produit, dans ce cas, une infiltration sousrétinienne avec tous les signes fonctionnels propres au décollement, mais la rétine reste alors pendant longtemps soulevée et non décollée. Nous avons vu cet état se prolonger un mois ou six semaines, pour être suivi du décollement. La figure 2 de la planche XVI représente ce cas au début de la maladie, au moment où il n'y a eu que de l'infiltration sous-rétinienne; le décollement a eu lieu plus tard dans toute l'etendue de l'exsudation séreuse.

Selon Cuignet (1), le décollement spontané de la rétine doit

(1) Cuignet, Recueil d'ophthalmologie, 1874, p. 326.

être souvent rattaché à une rétinite idiopathique, dont le décollement est le troisième degré.

Le décollement rétinien peut se produire dans des conditions tout à fait exceptionnelles, par exemple, lorsqu'il existe une tumeur intra-oculaire qui se complique de décollement. Wecker croit que le mécanisme de cette dernière affection est tout différent des autres, et que c'est par attraction que la rétine se trouve décollée. Nous ne partageons pas cette manière de voir et nous pensons, que dans ce cas comme dans les autres, le mécanisme est le même distension des vaisseaux choroïdiens, liquéfaction du corps vitré et épanchement séreux sous-rétinien. Il en est de même des décollements traumatiques et de ceux qui suivent un prolapsus du corps vitré, car, selon nous, le décollement ne peut se produire ni par attraction, ni par soulèvement ou distension. Malgré l'opinion de quelques auteurs, le liquide qui est accumulé au-devant de la hyaloïde, n'est pas de la même nature que celui qui se trouve épanché derrière la rétine; ce n'est pas ce dernier non plus qui produit le décollement, mais bien un liquide nouveau qui est suinté au moment même de l'accident.

En dehors de la myopie, il est encore d'autres causes qui produisent le décollement rétinien. Certains accidents tels que les coups, les blessures, peuvent faire naître cette affection aussi bien dans les yeux myopes que dans des yeux hypermétropes ou emmétropes.

Quelques affections constitutionnelles prédisposent aussi à cette maladie. Ce sont, notamment, l'albuminurie spontanée ou gravidaire. Dans la syphilis, nous ne l'avons vue se produire que deux fois.

Les recherches histologiques de Schweigger, de Pagenstecher et de Poncet, démontrent, que les parties décollées de la rétine subissent une altération plus ou moins marquée, selon que la maladie est ancienne ou récente.

Ainsi, on voit le plus souvent que la couche des bâtonnets et des cônes est désorganisée, et que de nombreux bâtonnets se trouvent détachés de la rétine et flottent dans le liquide épanché. Ce dernier est ordinairement jaunâtre, et contient, en outre, une grande quantité de cristaux de cholestérine Ces cristaux se ren

contrent aussi dans la rétine elle-même ainsi que Pagenstecher et Genth le démontrent dans leur magnifique Atlas.

D'après les belles recherches de Poncet (1), l'histoire de l'évolution du décollement doit être divisée en quatre degrés, selon l'étendue des désordres rétiniens et la rétraction fibreuse du corps vitré. Dès le début il se produit une sécrétion d'un liquide séro-albumineux entre la choroïde et la rétine; il en résulte une macération du pigment épithélial et une dégénérescence colloïde des éléments nerveux. L'épithélium pigmentaire détaché, altéré, perd son pigment, filtre, ainsi que le liquide sécrété, à travers la rétine, et pénètre dans le corps vitré où il produit le ramollis sement et l'inflammation de cette humeur, puis sa rétraction. Selon cet auteur il ne se produit jamais, malgré la plus grande épaisseur du liquide, de rupture rétinienne vers les attaches ciliaires. Pour notre compte, nous en avons vu cinq cas, dans lesquels la rétine était déchirée largement près de ses attaches ciliaires.

La rétine décollée se trouve plissée, ædématiée, et la circulation vasculaire devient gênée. On comprend que ces altérations amènent à la longue la rétractibilité de la membrane nerveuse avec désorganisation de ces éléments, ce qui, nécessairement, empêche la guérison. En effet, les cas de guérison sont trèsrares, et ils ne sont possibles qu'au début de la maladie, comme cela avait eu lieu dans l'observation. Pl. XIX, fig. 4 et 5.

Pour notre part, nous avons été assez heureux pour obtenir la guérison presque complète dans quatre cas : une fois dans un décollement traumatique; une autre fois après les couches, et dans deux autres cas, chez des jeunes gens myopes, pour lesquels un traitement antiphlogistique très-énergique avait été mis en usage.

§ 10. Rétinite pigmentaire.

La rétinite pigmentaire, ou plutôt la rétino-choroïdite pigmentaire est une inflammation particulière de deux membranes, qui se traduit par une sorte de dégénérescence atrophique et progressive de la rétine, avec infiltration du pigment le long

(1) Poncet, Mémoires de la société de Biologie, t. V de la 5a série, 1874, p. 199.

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