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à la fortune et au rang dans la société, on peut conclure que les causes morales sont plus nombreuses chez les riches, puisque la première colonne comprend six cents aliénées pauvres, et la seconde trois cent trente-sept. Les causes physiques agissent plus fréquemment sur les femmes que sur les hommes, on se persuadera sans peine qu'il doive en être ainsi si on se rappelle les nombreux accidens auxquels les femmes sont assujéties lors de la menstruation, de la grossesse, de l'allaitement : ces causes ont une influence très grande sur les personnes des classes inférieures. Le genre de folie qu'elles produisent est ordinairement la démence.

De même qu'il existe certaines constitutions atmosphériques qui rendent les maladies épidémiques ou contagieuses plus ou moins fréquentes, de même il existe dans les esprits certaines dispositions générales, qui font que l'aliénation mentale s'étend, se propage, se communique sur un grand nombre d'individus par une sorte de contagion morale. C'est ce que l'on a observé dans tous les temps, dans tous les pays: l'exemple des filles de Prœtus fut contagieux; les femmes de Lyon tombaient dans la lypémanie suicide, à l'imitation les unes des autres; les diverses possessions du démon, qui ont affligé diverses contrées de l'Europe, jusques au commencement du dernier siècle, prouvent suffisamment cette influence, qui, au reste, se lie à tous les phénomènes de la sensibilité. Les exemples se multiplieront, lorsque je parlerai de la monomanic et du suicide.

Les causes dont nous avons parlé jusqu'ici, et qu'on pourrait appeler générales, different des suivantes, en

ce que celles-ci sont plus individuelles; elles agissent plus immédiatement sur l'organisme; leur action est plus facilement appréciable, et peut être prévenue jusqu'à un certain point; les moyens propres à en combattre les résultats doivent être empruntés à la pharmacie. Ce sont les causes qu'on a appelées plus particulièrement causes physiques, tandis que les précédentes sont hygiéniques, intellectuelles ou morales.

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L'hérédité est la cause prédisposante de la folie la plus ordinaire, surtout chez les riches, elle est d'un sixième chez les pauvres. Je crois néanmoins cette pro. portion plus forte même chez ces derniers. Si, d'après mes relevés de la Salpêtrière, cette cause paraît faible, c'est qu'il n'est pas aisé de recueillir des renseignemens exacts sur des femmes qui souvent ignorent jusqu'au nom

de leurs parens. Masson Cox accorde une grande influence à cette prédisposition. Elle est comptée pour peu, en Pensylvanie, par Rush. Elle est remarquable en Angleterre, surtout parmi les catholiques qui s'allient toujours entre eux. On en peut dire autant des grands seigneurs en France, qui sont presque tous parens. Quelle leçon pour les pères qui, dans le mariage de leurs enfans, consultent plutôt leur ambition que la santé de leurs descendans! La folie est plus souvent transmissible par les mères que par les pères.1

Les enfans qui naissent avant que leurs parens aient été fous, sont moins sujets à l'aliénation mentale que ceux qui sont nés après. Il en est de même de ceux qui naissent de parens qui ne sont aliénés que du côté du père ou de la mère, comparativement à ceux qui naissent de père et de mère aliénés, ou ayant des parcus des deux lignes dans le même état. Burton assure que les individus engendrés par des parens âgés, sont prédisposés à la mélancolie.

Cette funeste transmission se peint sur la physionomie, sur les formes extérieures, dans les idées, les passions, les habitudes, les penchans des personnes qui doivent en être les victimes; averti par quelques-uns de ces signes, il m'est quelquefois arrivé d'annoncer un accès de folie, plusieurs années avant qu'il éclatât. La manie héréditaire se manifeste chez les pères et les enfans, souvent aux mêmes époques de la vie; elle est provoquée par les mêmes causes; elle affecte le même carac

1 Je soigne aujourd'hui plusieurs des enfans dont j'ai soigué les parens dans les premières années de ma pratique médicale.

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tère. Un négociant suisse a vu ses deux fils mourir aliénés à l'âge de dix-neuf ans. Une dame est aliénée à vingt-cinq ans, après une couche; sa fille devient folle à vingt-cinq ans, et à la suite de couches. Dans une famille, le père, le fils et le petit-fils se sont suicidés, vers la cinquantièmeannée de leur vie. Nous avons eu, à la Salpêtrière, une fille publique qui s'est jetée trois fois dans la rivière, après des orgies; sa sœur s'est noyée étant prise de vin. Il existe aux environs de Nantes, une famille dont sept frères et sœurs sout en démence. Un monsieur, frappé des premiers événemens de la révolution, reste pendant dix ans renfermé dans son appartement; madame sa fille, vers le même âge, tombe dans le même état, et refuse de quitter son appartement. Cette prédisposition, qui se manifeste par des traits extérieurs, par le caractère moral et intellectuel des individus, n'est pas plus surprenante, relativement à la folie, que relativement à la goutte, à la phthisie pulmonaire, etc. Elle se fait remarquer même dès l'enfance; elle peut expliquer une multitude de bizarreries, d'irrégularités, d'anomalies qui, de très bonne heure, auraient dû mettre en garde les parens. Elle peut être un avertissement utile à ceux qui président à l'éducation des enfans nés de parens aliénés. Il convient de donner à ees enfans une éducation particulière, de les exercer beaucoup à la gymnastique, de les endurcir contre les impressions extérieures; enfin, de les placer dans des conditions différentes de celles où étaient les auteurs de leurs jours; car, c'est ici le cas de mettre en pratique le précepte d'Hippocrate, qui veut qu'on change la constitution des individus, pour prévenir les maladies dont ils sont héréditaire

ment menacés. Ce que je dis pour l'éducation physique, je le dis pour l'éducation morale et intellectuelle: il faut être en garde contre tout ce qui pourrait exciter le cerveau.

Quelquefois c'est dans le sein maternel qu'il faut rechercher la cause première de la folie, non-seulement pour l'idiotie, mais pour les autres espèces d'aliénation. Je ne sais pourquoi cette circonstance a échappé aux observateurs. D'autres fois, c'est pendant l'allaitement, pendant la première dentition, que s'établissent les premiers élémens de la maladie, qui doit éclater plus tard. Au rapport de Van Swieten, presque tous les fous ont eu des convulsions pendant leur enfance. J'ai observé plusieurs jeunes aliénés qui, dans leur enfance ou à la puberté, avaient échappé à des fièvres cérébrales. Quelquefois de fortes impressions reçues dans le premier âge, sont aussi la cause éloignée de la folie. Plusieurs dames enceintes aux diverses époques de la révolution, ont mis au monde des enfans que la plus légère cause a rendus aliénés. Une femme du peuple est enceinte; son mari, pris de vin, menace de la frapper; elle s'effraie, accouche quelque temps après, d'un enfant qui a une santé délicate, qui est sujet à des terreurs paniques, et qui, vers l'âge de dix-huit ans, devient maniaque. Une dame enceinte expose mille fois sa vie pour sauver celle de son mari; elle a des convulsions; elle accouche; sa fille née faible, sujette aux frayeurs se marie, est mère de quatre enfans; à vingt-trois ans, des idées de terreur, d'assassinat, de meurtre, occupent seules sa pensée et la rendent furieuse. Un jeune enfant, âgé de trois ans, conduit à Bicètre, est effrayé par les

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