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par l'une de ces voies. Tiedemann et Gmelin, expérimentant sur un cheval auquel ils avaient administré de l'alcool ainsi que d'autres substances, avaient signalé l'odeur alcoolique. dans le sang de la veine porte, des veines splénique et mésentérique supérieure, odeur que n'offraient pas les liquides des vaisseaux chylifères et du canal thoracique. Magendie avait déjà constaté que l'absorption de l'alcool s'effectuait par les veines.

Bouchardat et Sandras (1), dans une série d'expériences faites sur divers animaux (chiens, poules, canards), confirmèrent les résultats précédents et démontrèrent la présence de l'alcool dans le sang, tandis que le chyle n'en renfermait aucune trace appréciable. Ils ont conclu de ces faits que les boissons alcooliques sont absorbées par l'unique voie des veines intestinales. Nous ferons remarquer, avec Longet, que cette conclusion est peut-être trop exclusive, en ce sens qu'une partie de l'alcool absorbé a pu, dans ces expériences, passer dans le système chylifère, mais que la faible proportion de ce liquide a empêché les observateurs d'en constater la présence.

Quoi qu'il en soit, sauf la faible partie d'alcool qui se transforme en acide acétique dans le tube digestif, ce liquide pé nètre en nature dans le sang, où sa présence a été démontrée par Magendie (2), par Ségalas (3), par Bouchardat et Sandras (4), et dans ces derniers temps par L. Lallemand, Perrin et Duroy (5).

(1) Bouchardat et Sandras, Annales de chimie et de physique. Paris, 1817, t. XXI.

(2) Magendie, Leçons sur les phénomènes physiques de la vie, Paris. t. III,

p. 55.

(3) Loc. cit., p. 103.

(4) Loc. cit., p. 63. (5) Loc. cit., p. 456.

CHAPITRE II

QUE DEVIENT L'ALCOOL DANS LE SANG?

§ 1er. Nous avons suivi l'alcool pendant son trajet dans le tube intestinal, où nous avons constaté ses principaux effets sur la digestion. Nous avons ensuite étudié son passage dans les veines mésentériques, par lesquelles il arrive dans la veine porte; nous avons constaté sa présence dans l'appareil circulatoire. Mais que devient-il maintenant? C'est là que commence l'inconnu; nous touchons à une discussion scientifique qui n'est pas encore terminée.

On croyait depuis longtemps que l'alcool, à la façon des aliments respiratoires, était brùlé sous l'influence de l'oxygène contenu dans le liquide sanguin, et arrivait, par une série de transformations successives, à former de l'eau et de l'acide carbonique. « L'alcool, disait Liebig, occupe un rang distingué comme aliment de respiration (1).

Cette opinion était partagée par Bouchardat et Sandras (2), qui avaient conclu de leurs recherches que l'alcool peut être <«< immédiatement converti en eau et en acide carbonique, tout en se transformant quelquefois, d'abord en un produit intermédiaire, l'acide acétique ».

(1) Liebig, Nouvelles lettres sur la chimie. Édition française publiée par Gerhardt, 1852, p. 244.

(2) Bouchardat et Sandras, De la digestion des boissons alcooliques, et de leur rôle dans la nutrition, p. 452.

Quelque temps après, Duchek (1) avait publié le résultat de ses expériences faites sur des chiens, et d'après lesquelles il avait admis que l'alcool subissait une série de transformations (aldehyde, acide acétique, acide oxalique, acide carbonique), et passait ainsi graduellement par divers degrés d'oxydation.

Aussi, cette oxydation de l'alcool dans l'organisme était-elle admise par tous les physiologistes, parmi lesquels nous nous contenterons de citer Woehler, Tiedemann et Gmelin, Longet, Béclard, quand apparut l'important mémoire de L. Lallemand, Perrin et Duroy, couronné par l'Académie des sciences en 1861 et destiné à battre en brèche les théories de Liebig, de Bouchardat et de Duchek, et à leur substituer une théorie nouvelle fondée sur de nombreuses expériences (2).

Ces auteurs se sont servis, comme on sait, de deux moyens d'investigation pour constater la présence de l'alcool dans les organes : quand ce liquide existait en quantité suffisante, ils le recueillaient en nature par la distillation et constataient directement ses caractères chimiques; quand il était en proportion plus faible, ils avaient recours à une autre méthode fondée sur la propriété que possède l'alcool d'entrer en vapeur à une température assez peu élevée et de déterminer la réduction de l'acide chromique en sexquioxyde de chrome, réduction qui s'accompagne d'une belle couleur vert-émcraude. Dans ce cas, le dosage de l'alcool se faisait par la méthode des volumes, au moyen d'une liqueur titrée, formée par une dissolution de 10 centigrammes de bichromate de potasse dans 30 grammes d'acide sulfurique.

L. Lallemand, Perrin et Duroy ont consigné les résultats de leurs expériences dans les conclusions suivantes :

(1) Duchek, Vierteljahr schrift für die praktische Heilkunde, 1853. Über das Verhalten des Alkohols im thierischen Organismus.

(2) Lallemand, Perrin et Duroy, Du rôlé de l'alcool et des anesthésiques dans l'organisme. Paris, 1860.

<< On constate la présence de l'alcool en nature:

» a. Dans les principaux liquides et solides de l'économie, principalement dans le sang, dans le cerveau et dans le foie, d'où on l'extrait par la distillation, dans les proportions sui

vantes :

Sang..
Foie..

Cerveau.

1,00

1,48

1,34

» b. Dans les produits de l'expiration pulmonaire, dans les sueurs et dans les urines.

» 2° Les liquides et les solides des animaux alcoolisés ne renferment ni aldéhyde, ni acide acétique, ni acide oxalique, par conséquent aucun des produits intermédiaires à l'oxydation de l'alcool, comme l'avait admis Duchek.

» L'alcool passe inaltéré à travers l'organisme et est éliminé en nature par les sécrétions (poumons, peau, reins) » (1).

En 1862, Strauch confirma les expériences de Lallemand, Perrin et Duroy, en démontrant comme eux la présence de l'alcool en nature dans les divers organes (cerveau, foie, reins, poumons, rate) et dans le sang.

§ 2.

Cette nouvelle théorie fut acceptée avec étonnement, mais avec enthousiasme, par le monde savant, et le rôle de l'alcool sur la nutrition fut complétement rejeté, malgré tous les travaux antérieurs qui avaient été entrepris pour le démontrer.

Cependant les expériences de Lallemand et Perrin n'étaient pas assez rigoureuses pour ne pas rencontrer de contradicteurs; déjà Racle (2), auquel ils avaient communiqué leurs travaux pour sa thèse de concours d'agrégation publiée avant l'apparition de leur mémoire, avait été frappé des conclusions si absolues qu'il y avait rencontrées.

(1) Loc. cit., p. 230 et 231.

(2) Racle, Etude sur l'alcoolisme, thèse de concours d'agrégation. Paris, 1860.

Peu de temps après, Gallard (1) avait appelé l'attention sur la faible proportion d'alcool trouvée dans les sécrétions comparativement à la quantité qui avait été absorbée.

En 1863, E. Baudot (2), dans un travail très-intéressant publié dans l'Union médicale, contesta la valeur et la légitimité des conclusions que les savants professeurs du Val-deGrâce avaient tirées de leurs expériences.

Il compara la quantité d'alcool recueillie dans les sécrétions à la quantité d'alcool absorbée, ainsi que l'indique le tableau suivant, où sont consignés les résultats des principales expériences de Lallemand et Perrin:

Ire expérience: Alcool ingéré, 120 gr. Alcool recueilli, 0

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-

2 centim, cub. 2 grammes.

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traces.

traces.

Il constata que l'aréomètre est suffisant pour déceler la présence de l'alcool dans l'urine, et même pour en mesurer la quantité, quelque minime qu'elle fùt; sur vingt-deux expériences qu'il institua avec plusieurs sujets auxquels il fit ingérer une certaine quantité de vin, et en employant l'aréomètre pour déterminer la richesse de l'urine en alcool, deux fois seulement il trouva ce dernier liquide en quantité appréciable, 0, 75 d'une part et 10 gr. de l'autre; le premier de ces chiffres correspondait à l'ingestion de 4 litres de vin, le second à l'ingestion de 305 centimètres cubes d'alcool. Dans les vingt autres expériences, l'alcoomètre ne décela même pas la présence de ce liquide; on en constata des traces seulement dans quelques produits, avec la liqueur d'essai (solution de bichromate de potasse dans l'acide sulfurique (1) employée par Lallemand et Perrin.

Mais Baudot va plus loin, trop loin selon nous, en con

(1) Gallard, Union médicale, nouv. série, t. X, p. 170.

(2) E. Baudot, Union médicale, 1863, 4o trimestre, p. 273, 357, 374 et 390.

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