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laire sous l'influence de l'inaction ou du repos trop prolongé.

§ 5. Il nous reste maintenant à justifier la dénomination d'aliments d'épargne que nous avons cru, malgré les critiques qui nous ont été adressées à ce sujet, devoir maintenir comme titre de ce travail, et que nous appliquons en même temps aux aliments thermogènes et aux aliments dynamogènes, parce que les uns et les autres, tout en agissant d'une façon bien différente dans l'économie, peuvent cependant être considérés, au point de vue hygiénique, comme des moyens d'économie pour les organes et les tissus vivants.

Cette façon d'envisager les aliments thermogènes ne soulève plus guère aujourd'hui d'objection et est admise généralement dans la science; on comprend facilement, en effet, que ces aliments, en servant de combustibles aux lieu et place des éléments organisés (qui sans eux devraient être rapidement détruits et employés à la production de la chaleur dont l'organisme a besoin pour son entretien et pour son fonctionnement), doivent naturellement économiser ou épargner les tissus vivants. Ainsi peut s'expliquer le pouvoir antidéperditeur de l'alcool, des corps gras, du beurre de cacao, etc., substances dont la combustion est capable de produire une certaine quantité de chaleur. Mais quand on applique, comme nous l'avons fait, cette dénomination d'aliments d'épargne à des substances qui, tout en ne pouvant pas elles-mêmes être considérées comme combustibles en

sorte d'équilibre trophique et que les recettes restent proportionnelles aux dépenses, c'est l'époque où les facultés intellectuelles, sensitives et motrices se manifestent avec le plus d'éclat et dominent toute la scène biologique. »

Telles sont les considérations pour lesquelles nous croyons devoir maintenir l'explication que nous avons donnée en 1870, pour rendre compte de l'influence des aliments dynamogènes comme antidéperditeurs ou comme antúlésassimilateurs; influence qui nous semble confirmée par la physiologie et qui s'explique naturellement, puisque toute cause d'excitation sur l'appareil cérébro-spinal semble se propager vers le grand sympathique et vers les nerfs vaso-moteurs, où elle se manifeste par une diminution des oxydations organiques et par un ralentissement de la dénutrition.

vertu même de leur composition chimique (caféine, théobromine, cocaïne), augmentent cependant la consommation de chaleur et la dépense de force dans l'économie, sans exagérer les déperditions organiques et les résidus, on rencontre quelques objections qui se réduisent en définitive à la suivante On ne peut appliquer, dit-on, la dénomination d'aliments d'épargne à des substances qui déterminent une augmentation de la force dans l'économie, car qui dit production de force dit consommation de chaleur; qui dit consommation de chaleur dit augmentation des déperditions organiques. Chaleur, force, dépense, transformations chimiques sont corrélatifs; chaleur, force et épargne des tissus sont contradictoires (1). »

Si l'on admet avec Liebig que la force ne se produit dans l'économie qu'aux dépens de l'usure des organes, la dénomination d'aliments d'épargne appliquée aux aliments nervosiques ou dynamiques est impropre et doit être repoussée de la science, car, d'après la théorie du savant chimiste allemand, les agents qui stimulent le système nerveux devraient naturellement augmenter la consommation de la matière et la dépense des éléments vivants. Mais si, comme nous croyons l'avoir démontré, la force qui se développe dans l'organisme résulte, non point de la combustion des éléments vivants eux-mêmes, mais bien de la combustion des substances étrangères (ingesta) et principalement des substances calorifiques (corps gras, amylacés, sucrés, etc.), introduites dans l'alimentation, si l'on peut admettre aujourd'hui qu'il puisse se produire dans l'économie une augmentation de force sans usure des organes et sans augmentation des résidus azotés, pourquoi refuser la qualification d'aliments d'épargne à des agents qui, tout en excitant le système nerveux, qui commande et règle l'effort, rendent en même

(1) Voy. Union médicale, 3o série, 1872, p. 524.

temps plus stables les éléments organiques, puisque sous leur influence l'urée, représentant l'élément principal des scories qui proviennent de la destruction des éléments vivants ou de la désassimilation, éprouve, tant d'après nos expériences que d'après celles qui ont été instituées par divers observateurs, une diminution manifeste.

Ainsi se justifient, suivant nous, la théorie de l'épargne introduite dans l'étude de l'alimentation, et la dénomination d'aliments d'épargne que nous avons cru devoir appliquer avec quelques auteurs aux agents modérateurs de la dénutrition ou antidéperditeurs, dénomination qui offre à nos yeux le grand avantage de faire comprendre l'utilité de certaines substances alimentaires dont l'influence dans la nutrition a été jusqu'ici habituellement contestée ou méconnue, et de faire entrevoir les précieuses ressources que peuvent offrir leur emploi modéré et leur consommation journalière, dans les cas où l'organisme, tout en étant faiblement et insuffisamment pourvu de matériaux plastiques ou réparateurs, est astreint à un travail plus ou moins pénible auquel doit subvenir une alimentation faiblement azotée. C'est ainsi que nous allons pouvoir expliquer naturellement pourquoi certaines substances alimentaires, graisses, féculents, comme aliments thermogènes; boissons spiritueuses et aromatiques, comme aliments dynamogènes, figurent si ordinairement et en si grande proportion dans le régime quotidien des classes pauvres et laborieuses.

CHAPITRE III

UTILITÉ DES BOISSONS SPIRITUEUSES ET AROMATIQUES DANS LE RÉGIME

ALIMENTAIRE.

Un des plus puissants arguments allégués par les défenseurs de l'usage des boissons spiritueuses et aromatiques, c'est l'universalité de leur emploi. Il est difficile d'admettre, en effet, que la plus grande partie de l'espèce humaine puisse commettre une erreur aussi grossière que celle d'attribuer une certaine valeur hygiénique à des substances qui n'auraient aucune utilité, prises à doses modérées, et dont la plupart, absorbées à doses un peu élevées, seraient nuisibles et préjudiciables au plus haut degré à la santé des individus.

Nous avons appelé l'attention du lecteur sur cette tendance de tous les peuples à introduire dans leur régime une boisson artificielle, tendance qui ne fait qu'augmenter et se généraliser, à mesure que grandissent et se répandent cette activité incroyable et cette agitation incessante que présente la société moderne, sous l'influence des occupations multipliées que nécessitent ses nouveaux besoins. Nous espérons, dans l'étude suivante, pouvoir expliquer cette tendance, en insistant sur l'utilité des boissons spiritueuses et aromatiques dans le régime alimentaire.

I. Utilité des boissons spiritueuses et aromatiques comme aliments dynamogènes; excitation à la veille et au travail intellectuel.

$1. Dans l'introduction qui précède ce travail, nous avons vu que dans le cerveau comme dans les nerfs, comme dans les muscles, l'aptitude à agir et à fonctionner est essentiellement subordonnée à l'influence du sang oxygéné sur l'élément vivant, et que cette influence s'arrête dès que le sang ne se renouvelle plus, soit qu'il cesse de parvenir aux centres nerveux, d'où anémie; soit qu'il stagne dans le cerveau, d'où congestion de cet organe. Nous avons démontré ensuite que c'était aux excitants de la circulation qu'il fallait recourir quand on cherchait à combattre le sommeil, à prolonger la veille et à activer les facultés intellectuelles.

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Ainsi s'explique en grande partie l'influence cérébrale de l'alcool et des boissons aromatiques, qui, comme nous l'avons vu, en accélérant la circulation, et par conséquent en augmentant l'afflux du sang vers les centres nerveux, procurent à ces organes une quantité plus grande de matériaux réparateurs, et les débarrassent des déchets qui résultent de leur fonctionnement.

Mais en dehors de l'influence cérébrale exercée par l'alcool et les boissons aromatiques, par suite des modifications que ces agents déterminent dans la circulation, il faut tenir compte également des principes volatils qu'ils renferment et qui impressionnent plus ou moins vivement les centres nerveux. Si le café et le thé ont été qualifiés de boissons intellectuelles, ce n'est pas seulement parce qu'ils agissent sur le cerveau plus que les liqueurs alcooliques, mais encore et surtout parce que l'excitation intellectuelle qu'ils déterminent est plus douce, plus régulière, plus calme, plus en rapport avec les conditions normales de notre existence et habituelles à la vie, que celle qui est consécutive à l'ingestion des boissons spiritueuses. Ces dernières boissons exercent

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